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Arthur Tress : Musée de la photographie de Thessalonique

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On ne parle pas assez souvent de la programmation du Musée de la photographie de Thessalonique, en Grèce, qui pourtant, sous la direction de Vangelis Ioakeimidis, ne manque jamais d’intérêt. En ce moment, par exemple, se tient une grande rétrospective d’Arthur Tress, riche de 145 tirages : un labyrinthe surréaliste où, mis en scène à outrance, le rêve règne. Un rêve un peu désolé… Et ce, quel que soit l’âge qu’avait le photographe au moment de la conception de ses images.

Déjà dans ses premières photos, prises au milieu de la rue, il aimait pointer les possibilités tristement absurdes de la réalité : celles, mises en scène ou non, nées des coïncidences visuelles et de l’imaginaire collectif. La réalité qu’il capture n’est pas toujours malheur. Elle est fantaisie aussi. Ses photographies sonnent comme des tragédies légères. Elles reconstituent la réalité dans la réalité, définie par Arthur Tress dans les deux cas.

Scène 1 : un gendarme à cheval fixe l’objectif du haut de sa monture, posant devant l’objet du délit : un tricycle dont le propriétaire de 3 ans a probablement déjà les menottes aux poignets.

Scène 2 : une femme attend, inquiète, assise sur un muret, dans le prolongement de deux jumelles touristiques — celles qui ressemblent à des personnages en métal. Elle a des lunettes de soleil rondes et noires et un air pâle qui pourraient faire d’elle un membre de leur famille.

Scène 3 : un ado boutonneux à lunettes présente à l’objectif son calme trophée : un canard immobile. Il porte une passoire en guise de couronne. Derrière lui s’épaissit une brume très humide qui pourrait à tout moment l’emporter.

Scène 4 : dans une salle à manger à double-miroir, une couple prend son petit déjeuner. Le majordome octogénaire qui sert la soupe pourrait être le mari. Assis à table à ce qui aurait pu être la place du mari, c’est un barbu de 20 ans, qui pourrait être le petit-fils. Il essaie de se réveiller avec une tasse de thé.

“Tout le monde était heureux dans ce cirque qui n’avait rien de naturel. Le clown sur le fil de fer jouissait d’une totale sécurité et en dix jours, je ne l’ai pas vu tomber une fois, et s’il tombait je savais qu’il ne pouvait pas se faire mal. C’est vraiment autre chose, quoi. J’étais tellement heureux que je voulais mourir parce que le bonheur, il faut le saisir pendant qu’il est là”, constate le petit Arabe sans famille fixe inventé par Romain Gary dans La Vie devant soi.

On retrouve cette urgence de vivre et de mourir en même temps dans la poésie visuelle de Tress. Les opposés fusionnent étrangement, comme dans la photographie d’un couple déconfit déambulant d’un seul corps — robe de mariée à droite, tuxedo à gauche — dans une église éventrée. A mesure des photographies, le théâtre s’organise, et chaque courte pièce est une variation autour de « l’aliénation mélancolique ». L’expression, tirée du dossier de presse, est attribuée à Arthur Tress et décrit le résultat, pervers pour les victimes, de l’oppression des minorités. Et l’on en comprend tout le sens au déroulé des photos.

Arthur Tress. The Photograph as Magical Image 1956-2006
Février 2014.
L’exposition est présentée en collaboration avec le Château d’Eau de Toulouse et les éditions Contrejour.
Musée de la photographie,
Entrepôt A’, Port de Thessaloniki
3, Navarchou Votsi str.
54624, Thessaloniki
Grèce
Tel:  +30 2310 566 716

http://www.thmphoto.gr
http://www.arthurtress.com

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