Rechercher un article

Peter Turnley : A New York-Paris Visual Diary – The Human Face of Covid-19 : Interview par Alain Mingam

Preview

Samedi 3 Octobre à 20H 45 au Cinéma «L’Etoile » de Carantec Rencontre -conférence- et débat avec Peter Turnley, auteur d’un «Journal visuel du Covid- 19 de New-York à Paris »

Peter est plus qu’un excellent professionnel – maintes fois primé à travers le monde. Il demeure après plus de 30 ans de guerres « couvertes »un photojournaliste, fidèle à ses convictions humanistes. Tous ses portraits de New-York à Paris arrêtent le temps et incrustent dans la mémoire de tout citoyen du monde de fortes images – vrais remparts contre le linceul de l’oubli. Œil témoin, cœur témoin qui sera présent pour nous faire respirer un grand moment de lucidité et de solidarité.

 

Interview de Peter Turnley par Alain Mingam

A.M: Votre «  Journal visuel du Covid-19 de New-York à Paris » a fait l’objet d’un succès mondial – tant à « Visa pour l’image » à Perpignan, que sur les réseaux sociaux, pourquoi et comment a –t-il débuté ?

P.T: Parce que je suis un parfait nomade qui fait de là où je suis, mon chez moi à tout moment. Je savais en rentrant de Cuba à New-York que le Covid -19 allait être un sujet mais pas à ce point .Le 21 mars à New-York je me réveille et réalise que ma vie personnelle est totalement bloquée.

A.M: Et sur quelle envie vous vous projetez ?

P.T: J’ai fait ce qui m’a paru le plus naturel –sortir dans la rue mais avec beaucoup d’angoisse, de peur. Malgré le fait d’avoir couvert- à l’exception du Liban – toutes les guerres –depuis plus de trente ans, j’avais conscience d’un danger mortel et en même temps de la réalité d’un conflit mondial exceptionnel en devenir. C’est la seule fois de ma vie ou j’assiste à un événement qui touche à l’ensemble de la planète, sans savoir où est la ligne de front.

A.M: Photographier c’était aussi pour vous une manière d’exister ?

P.T: Parfaitement, quand je suis sorti avec mon appareil photo – c’était avec des références tout à fait nouvelles pour moi : sans commande de magazines, sans esprit journalistique. Je suis allé vers Time Square au sud et en marchant j’étais complétement renversé .Je ne voyais qu’une ville totalement vide. Je n’apercevais que des « homeless » des SDF, ou des ambulances toutes sirènes hurlantes.

A.M: Est-ce choc émotionnel qui provoque en vous cette quête d’une humanité masquée en état de survie et le besoin de témoigner ?

P.T: Oui, car face à ce nombre surprenant de SDF, c’est la 1ére fois que j’ai un sursaut de neurone dans mon cerveau. J’ai connu le 9/11 – j’y ai passé la 1ére nuit – sur Ground Zéro dans les décombres des tours jumelles. Le « Covid 19 » est mon 9/11. En croisant surtout des SDF, chômeurs, personnels soignant, je m’arrêtais par respect, par élémentaire décence. Je me présentais toujours par mon prénom, pour leur demander le leur et leur âge. Je sentais leur désir de raconter leur histoire. Tout le monde avait besoin de se parler.

A.M: Pour capter des yeux une complicité immédiate qui permet de photographier et de révéler au dessus du masque ou de la beauté d’un regard, la force d’une résistance ?

P.T: Tout à fait. A la suite de chaque réponse j’avais besoin qu’il m’interroge : « comment allez vous ? » car ma vie était renversée comme pour tout le monde. Je n’allais pas bien du tout. Un jour dans une rue, un jeune homme qui m’a reconnu, me demande conseil. J’avais simplement l’impression d’exister et je lui ai vivement suggérer de faire son journal en photos et récits quotidiens. C’est de là que tout est venu.

A.M: 43 couvertures de Newsweek en témoignent. Avez vous puisé dans votre expérience de grands reportages menés à l’échelle de notre bas-monde, pour aller jusqu’au bout de votre démarche en ces temps de Covid-19 ?

P.T: Parfois bien sûr car j’étais très fatigué en marchant beaucoup – pour faire une moyenne de 50 portraits quotidiens. Le 1er jour à New-York, je n’avais ni masque ni gants mais j’ai quand même décidé de prendre le métro. C’était terrifiant dans cet espace en huis-clos. J’ai voulu voir. C’était une « tombe vivante » avec des pauvres, des sdf obligés. Je n’avais jamais vu de regards aussi angoissés, avec la peur des uns aux autres.

A.M: N’était-ce-pas une réaction excessive sous l’effet de la fatigue ?

P.T: Pas du tout et je vous fais une confidence. Quand je quitte chez moi je fais comme d’habitude. J’embrasse les murs près de la porte de mon studio parisien ou new-yorkais comme avant de partir en Tchetchénie en Irak, ou en Afghanistan, car j’ai envie d’y revenir. C’était exactement la même superstition face aux 700 ou 800 morts quotidiens à New-York !

A.M: Vous aviez donc le sentiment que la mort « vous avait aussi à l’œil » que tout pouvait forcer le destin ?

P.T: Plus encore c’est la 1ére fois que cela m’est arrivé. Une fois de retour chez moi – je n‘ai pas honte de le dire .J’ai « chialé » sur le bord de mon lit. Ma vie était affectée .Je pleurais aussi pour tout le monde .Je me disais : « C’est très grave, pas anodin. La notion de liberté est complètement bouleversée pour tout le monde comme la vie économique.

A.M: Parmi tous ces portraits très attachant – quel est celui qui, selon vous, est le plus parlant pour symboliser la mission de partage que vous revendiquez avec force et le succès qui est le vôtre ?

P.T: J’en ai édité 200 qui sont tous à mes yeux – très touchant mais celui d’Erika, immigrée cubaine – infirmière itinérante à l’hôpital Léonix Hill de New-York est celui que j’ai choisi pour être la couverture de mon livre.                      Sa souffrance endurée auprès des malades du Covid-19 traverse le temps, les frontières pour nous atteindre solidairement. Les mots ne suffisent pas et c’est ça la puissance de l’image. On laisse ce qu’on voit pou raconter ce qu’on ressent.

A.M: Et les élections et Trump au milieu de cette crise sanitaire ?

P.T: Il fait tout pour générer une guerre civile !

Propos recueillis par Alain Mingam

Cet article a d’abord publié dans le Telegramme de Brest.

vente en précommande: https://www.peterturnley.com/books-2/book-pre-sale

Website: https://www.peterturnley.com/

 

Un «  Télégramme » à l’international

Fidèle à sa raison d’être, la presse quotidienne régionale ou PQR, a toujours prêté attention à une photographie de proximité, entre banquets, vie associative ou évènements sportifs et culturels locaux.

Le Télégramme (près de 190 000 exemplaires vendus et plus de 900000 lecteurs quotidien papier et digitaux) n’a jamais fait dans la caricature – éponyme et express de son appellation – pour pratiquer une réelle politique de l’image et sensibiliser son public, à l’image de toutes les politiques sans sectarisme aucun.

Le quotidien reste toujours au plus près des actualités les plus signifiantes de notre monde aujourd’hui en conflit permanent avec cet ennemi invisible mais encore plus dévastateur qu’est le Covid-19.

Cette pandémie n’a de cesse de causer des ravages sans frontières géographiques ou sociales. Le Télégramme s’en fait l’écho journalier à l’échelle de toute la vie associative qui anime l’ensemble de la Bretagne.

C’est pourquoi il a assuré la promotion d’un documentaire ou d’une « projection -débat » pour un très large public exigeant et demandeur.

Ce fût le cas avec Peter Turnley – photojournaliste franco-américain venu présenter son « Journal visuel du COVID -19 de New-York à Paris » au cinéma l’Etoile de Carantec. Une soirée mémorable – samedi 3 octobre – autorisant une femme dans le public nombreux à le souligner en ces termes : « Un moment très fort et qui ne laisse pas indemne avec Peter Turnley , comme une incarnation de l’humanité… Cette soirée a mis à vif et conforté des sentiments que j’ai ressentis pendant le confinement et l’isolement qui en découlait. Sans nier les malheurs collatéraux et l’exacerbation des injustices sociales, je veux aussi croire que l’on a gagné là un supplément d’humanité… »

Grand merci au «Télégramme » d’avoir été l’indispensable lanceur d’alerte en devanture de ce décryptage très bienvenu !

 Alain Mingam

 

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android