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Galerie L’Entrée des Artistes : Stéphane Mahé : Rêver dans les ailes du vent

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 Stéphane Mahé présente sa nouvelle exposition a la Galerie L’Entrée des Artistes jusqu’au 12 novembre. C’est Alexandra Palka qui a écrit ce texte !

Nimbé d’une aura à l’orée du fantastique, les images de Stéphane Mahé nous perdent dans la narration labyrinthique d’un carnet de bord mystérieux offrant un vagabondage de l’esprit sur les sentiers de l’imaginaire. Le photographe au pinceau alerte et fugitif manie les effets de lumière avec la délicatesse du funambule pour nous révéler les patientes inventions de l’ombre. Évanescentes esquisses lovées dans des clairs-obscurs crépusculaires, entre réalisme magique et symbolisme onirique, ses photographies dépouillent la réalité de ses insipides oripeaux pour mettre notre sensibilité à fleur de peau. La fable, le conte, l’odyssée, s’épanouissent dans le hors champ et titillent l’imagination. La couleur vibrante de spontanéité nous emporte et l’artiste réussit à saisir nos états d’âme, dans leur solitude résolue, comme si cette éternelle ronde de scènes « pictoralistes » déterminait l’histoire tragique du monde.

Car capter l’essence fébrile d’un paysage, sa respiration intime, pour révéler le drame perpétuel des forces en conflit — l’affrontement de l’espace et du temps — permet de redéfinir les liens qu’entretient la photographie avec le monde comme l’avait fait les « impressionnistes » à leur époque pour la peinture. Ici aussi, la matière, la texture, le grain sont utilisés pour créer une nouvelle topologie émotionnelle, un univers coloré, flottant, nappé du brouillard du ressenti. L’étrangeté de cette atmosphère picturale surréaliste bouscule les repères. Le figuratif et l’abstraction se mêlent. Le réel et la fiction se confondent. Pourtant, tout est au monde. Ainsi, la démarche d’instinctif rêveur du photographe Stéphane Mahé n’est pas en reste: l’alchimie des états changeants du ciel est bien présente avec des échappées vivement ébauchées, une lumière mouillée de grain, une densité des voûtes célestes faisant ployer les astres, une matérialité picturale qui exalte la sombreur et des personnages énigmatiques qui silhouettent les perspectives en déchirant l’obscurité.

Mais la narration n’est pas absente dans la série de l’artiste photographe. En effet, il y là un dynamisme, tout cinématographique, qui statufie l’instant pour mieux décomposer, dégingander, le réel. Ce temps subjectif devient signifiant dès lors qu’il introduit une imminence, un suspens, alors que l’œil est happé par le tourbillon des possibles. Une métaphysique de la traversée du miroir, en quelque sorte, qui permet ce décalage vaporeux, ce pas de côté, cette victoire sur la rationalité pour réunir le tangible et l’imaginaire. Dans ces instantanés du temps égaré que propose Stéphane Mahé, chaque image — prise dans son individualité ou comme l’élément d’un tout — crée cette écriture serpentine, ce langage sensitif et poétique, qui raconte l’invisible. Et la rétine rejoue le film des mythes impalpables traversés par le chant de l’oubli. L’ombre portée qui caresse le regardeur semble posséder une volonté propre, les paysages déserts, mais pourtant très habités font naître des espoirs, les cadrages surprenants en plongées et contre-plongées divaguent le réel tandis qu’une palette singulière et un traitement synthétique des formes apportent cette unité de temps et de lieu propre aux films noirs. Un rythme surgit, généré par les jeux d’ombres et de lumières. Ils animent l’espace en attirant inexorablement le spectateur qui, emporté, se met à rêver dans les ailes du vent.

Alexandra Palka

 

Stéphane Mahé : Rêver dans les ailes du vent
du 19 octobre au 13 novembre 2022
Galerie L’Entrée des Artistes
25 rue des Tournelles, 75004 Paris
https://www.galerie-lentreedesartistes.com/

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