Rechercher un article

Le Questionnaire : Philippe Moisan par Carole Schmitz

Preview

Tendre vers la beauté

Philippe Moisan n’est pas homme a aimer la facilité, d’ailleurs son parcours ne ressemble pas à un long fleuve tranquille. Ce qui est conventionnel et tout tracé ne l’intéresse pas. A la place il préfère mixer les influences, jouer avec les souvenirs ou s’envoler vers d’autres horizons.

Lorsqu’il a découvert la photographie, elle s’est imposée à lui comme vecteur évident dans cette quête du monde. Ses grands-pères ont été ses influences premières. L’un fut peintre et caricaturiste politique au Canard enchainé et l’autre paysan poète. Tous deux libres penseurs, ils lui ont transmis l’amour et le respect de l’art.

Avec un tel héritage, les compositions fortes sont devenues aussi naturelles qu’une respiration.

Coté études, il intègre en 1983, l’Ecole du Louvre pour y suivre les cours de l’Egyptologue Christiane Desroches-Noblecourt, ainsi que ceux de Pierre Amiet conservateur du musée Guimet et spécialiste des Arts de l’extrême Orient. Puis, suit les cours de l’école SPEOS, section photographie.

Mais ces années sont aussi celles des très courues fêtes parisiennes du Palace et des Bains Douches. Ou encore, le temps de son premier voyage à New York. Inspiré par l’asphalte, les verticales urbaines, les courbes du Guggenheim, il y reviendra souvent.

En 1984 pendant la guerre froide, Philippe Moisan passe un an à Berlin dans le cadre de ses obligations militaires. Là, il traine dans les musées, celui de Dahlem notamment, ou encore va écouter Karajan à la Philharmonie, l’opéra romantique dans l’ex Berlin Est à l’abri d’un hiver glacé.

Les traversées hivernales des campagnes et forêts Allemandes en train sont un marqueur visuel puissant pour ses photographies futures. Des sensations que le photographe a retrouvé plus tard dans le travail du peintre Caspar David Friedrich sur la nature.

A partir de 1987, Philippe travaille pour une grande compagnie aérienne française. Dès lors, il ne cesse de voyager à travers le monde. C’est là, qu’il commence la photographie en autodidacte. Dès lors, sa vie sera partagée entre les odeurs de kérosène et le son du déclencheur de sa caméra. L’aventure durera plus de 20 ans. Il sillonnera les cinq continents. Cette liberté de déplacement influencera très fortement et en profondeur ses recherches et ses découvertes visuelles.

Entre 1998 et 2000, il passera beaucoup de temps à Miami, dans le nouveau quartier savoureux de « Little Cuba ». C’est le temps de l’apprentissage des codes de la lumière en studio et en extérieur, par des collaborations avec des magazines de mode.

Passionné également par ce qui se passe après la prise de vue, il se forme de manière approfondie à la technique des tirages argentiques noir et blanc auprès de Georges Fevre, dit le magicien fut le tireur argentique des plus grands photographes des années 1920-2000.

Tout en continuant a travailler pour la mode et les agences de publicité il décide de prendre un virage et de consacrer de plus en plus de temps aux vagabondages et errances photographiques au hasard de ses voyages.

Plongé d’abord dans la verticalité architecturale de Sao Paulo, Philippe commence une longue série de portraits de personnages étonnants qui hantent les rues et les nuits de cette mégapole tentaculaire.

Plus tard, dans l’esprit des voyageurs romantiques du XIXe siècle, il sillonnera pendant douze ans, sans réel but réel ni finalité, un grand nombre de pays très différents. Travaillant occasionnellement pour la presse il découvre Buenos Aires et le désert Argentin d’Ischingualasto, le Nevada et la vallée de la mort, les jeunes Citées plantées dans le sable de la péninsule d’Arabie, les temples Zen cachés par d’immenses arbres autour de Koyasan et de Kyoto au Japon, les Indiens Embera du Panama, les fulgurantes totalités esthétiques et graphiques de Hong Kong, New York, Shanghai, Bangkok et tant d’autres…

Depuis 2014 il vit à Bangkok, nouvelle mégapole de contrastes, ville en constante accélération. Il y travaille en duo avec le plasticien Thaïlandais Rush Gaspard Pleansuk. Ensemble, ils développent une collaboration artistique sur le theme des arbres et de la foret.

Depuis quelques années, Philippe travaille principalement sur un phénomène très ancré dans la culture Japonaise, le “ Shirinyoku ”. Il s’agit de la sensation que l’on éprouve lorsque la lumière descend en pluie entre les arbres et le feuillage jusqu’à soi. Il arpente ainsi pour ce projet, les forets d’Europe et d’Asie en préparation d’un livre et de plusieurs expositions.

Son secret : tout oublier pour laisser s’exprimer le naturel une fois la maîtrise de la technique photographique intégrée. Philippe Moisan aime travailler à l’argentique notamment avec un Fuji 6×9 et il ne prend qu’une image, une seule, mais celle-ci est réfléchi, pensée et composée avec soin. Avec lui pas de frénésie du déclencheur, son travail est trop méticuleux pour cela.

Inspiré par le cinéma, il opte souvent pour le plan américain lorsqu’il s’agit de mettre en scène son personnage principal

Lorsqu’il aborde le paysage, la construction de l’image se fait avec le même soin, cadrage, lumière angle sont pensés dans les moindres détails, transformant la banalité en véritable oeuvre d’art. Mais ne vous y trompez pas, cette recherche d’une certaine perfection n’exclue en rien la spontanéité ni même l’humour. Ses images sont poétiques et pleines de liberté sans jamais distordre le réel.

 

Votre premier déclic photographique ?

Philippe Moisan : Le jour ou j’ai posé mon oeil derrière le Nikormat de mon père autour de ma dixième année. Je voyais quelque chose d’irréel. C’était au bord de la Méditerranée et je découvrais l’horizon comme dans un périscope . Et le « clic » qui suivi !

 

Lhomme dimages qui vous inspire ?
Philippe Moisan : Il y en a trois. Alexandre Rodtchenko, Sergueï Eisenstein, et Paul Strand.

 

Limage que vous auriez aimé faire ?

Philippe Moisan : Buzz Aldrin sur la lune photographié par Neil Armstrong en 1969 . Tous les symboles y sont. Le portrait , le paysage, la photo scientifique, historique, l’exploration, les pas de l’homme, la couleur, et même l’autoportrait d’Armstrong dans la visière du casque.

 

Celle qui vous a le plus ému ?

Philippe Moisan :« The vanishing race » Navaho de Edward S Curtis. Le Mystère et la puissance narrative qui se dégage de ces indiens sur leurs chevaux s’en allant sur une route au dernier rayon de soleil est un conte magnifique.

 

Et celle qui vous a mis en colère ?
Philippe Moisan : En général tous les selfies. C’est plus de la consternation que de la colère !

 

La qualité nécessaire pour être un bon photographe ?

Philippe Moisan : L’éveil.

Le secret de limage parfaite, si elle existe ?
Philippe Moisan : Celle qui changerait irrémédiablement et immédiatement le cours de l’histoire. L’image parfaite a un très fort pouvoir de révélation pour la mémoire enfouie . Je pense qu’elle doit réactiver un élément inconscient majeur qu’il soit artistique, politique ou spirituel.

Lappareil photo de vos début ?

Philippe Moisan : Un Rétina de Kodak .

 

Celui que vous utilisez aujourdhui ?

Philippe Moisan : Un Fuji 6X9 pour le moyen format argentique. Un vieux Nikon F2. Un Sony R4 et des optiques Leitz pour le numérique.

 

Votre drogue favorite ?

Philippe Moisan : L’embrun.

 

Votre plus grande qualité ?

Philippe Moisan : La lenteur.

 

Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?

Philippe Moisan : Un champignon Atomique.

 

Le métier que vous nauriez pas aimé faire ?

Philippe Moisan : Employé de banque.

 

Votre plus grande extravagance en tant que photographe ?

Philippe Moisan : Avoir réussi à faire le portrait nu d’un pompier dans ma baignoire à Sao Paulo alors qu’il venait pour une urgence dans mon immeuble.

 

Votre plus grand regret ?

Philippe Moisan : Ne pas encore être conscient de ma passion photographique lorsque j’ai passé un an dans l’armée à Berlin en 1984. Je vagabondais dans la ville, passais check point Charlie régulièrement; sans oublier mes promenades nocturnes l’hiver le long du mur. Avec le recul cette année aurait pu être majeure.

 

Instagram, Facebook, Tik Tok ou Snapchat ?
Philippe Moisan
: Instagram. A contrecoeur . J’ai du mal avec les avalanches d’images.

 

Couleur ou N&B ?

Philippe Moisan : Plus Noir et blanc.

 

Lumière du jour ou lumière artificielle ?

Philippe Moisan : Lumière du jour.

 

Si Dieu existait lui demanderiez-vous de poser pour vous, ou opteriez-vous pour un selfie avec lui ?

Philippe Moisan : Qu’il pose pour moi, tout en redoutant qu’il me propose un selfie.

 

Limage qui représente pour vous l’état actuel du monde ?

Philippe Moisan : Une image de John Moore récompensé par le World Press en 2019 ou une petite fille Hondurienne pleure alors que sa mère est fouillée par un garde cote avant qu’elles soient placées en garde à vue et séparées. La surveillance et l’incarcération des idées qui malheureusement suivent leurs chemins.

 

Instagram : philippemoisan
www.philippemoisan.fr

https://www.saatchiart.com/philippemoisan.

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android