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Librairie Ombres Blanches : Bernard Plossu, Françoise Nuñez : Modus Vivendi

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Derrière cette exposition, il y a aussi une très jolie histoire d’amour. Celle qui a commencé il y a plus de 35 ans entre Florence Nuñez et Bernard Plossu. Ils la racontent très bien !

 

Les photographes par eux-mêmes

« Françoise et Bernard se rencontrent lors d’un pique-nique il y a de cela… des années ! À la campagne chez les Dieuzaide, chez qui Françoise était stagiaire. Bernard avait croisé Jean Dieuzaide lorsque celui-ci était venu à Taos sur les hauts plateaux du Nouveau-Mexique, sur les traces de Strand et Weston. Plus tard, Françoise et Bernard se retrouvent et voyagent ensemble au Mexique. Au retour définitif des Usa de Bernard, mariage en 1986. Naissance de leur fils Joaquim la même année, puis de Manuela, leur fille, en 1988. Françoise et Bernard voyagent encore beaucoup ensemble, quelques fois avec les enfants, quelques fois sans, tant que ceux-ci sont petits (merci aux parents de Françoise !). Ils voyagent en Inde, à Jaisalmer, en Turquie à Malatya et au Nemrud Dag, en Grèce plusieurs fois, soit dans les îles du Dodecanese, soit à Athènes et à Thessalonique. Ces voyages ont lieu à la fin des années 80. De même, ils vont avec Joaquim bébé, à Stromboli en 1987 et avec Joaquim et Manuela vivre dans l’île de Lipari. Ils se rendent aussi au Portugal, à Coimbra. Et ils partent avec les enfants dans la région de la famille paternelle de Françoise, à Almeria, où ils s’installent finalement pour de bon 4 ans, dans la région de Cabo de Gata, avec les enfants à l’école communale se mettant à apprendre ainsi l’espagnol, avec… l’accent andalou ! Puis c’est le retour à la vie rangée en France. En 1991 ils s’installent dans le sud de la France et commencent une vie plus sédentaire : fini le nomadisme ensemble !… Les voyages continuent, mais séparément. »

Françoise Nuñez 

Bernard Plossu

 

« Ils ont fait des enfants, des voyages et des photos. Non ! Des voyages, des enfants et des photos. Ou peut-être des voyages, des photos et des enfants. Ou plutôt des photos, des voyages et des enfants. C’est compliqué d’autant que Françoise, en voyage, est sur des photos, parfois avec des enfants, et que Bernard a donc pris ces photos, en étant en voyage avec elle et les enfants. À moins que ce ne soit avant tout pour le voyage, et dans ce cas les photos de Françoise prises par Bernard sont la raison du voyage, mais il manque alors des photos de Bernard prises par Françoise. Enfin on ne sait pas, peut-être en ont-ils décidé ainsi pour cette exposition. Car par-delà les voyages, les photos et les enfants, il y a aussi les expositions et les livres publiés avec les photos que l’on veut montrer. Donc on est d’accord pour montrer les voyages, les photos, et aussi les enfants. Le voyage est dans les photos mais les photos ne sont pas le voyage, même si ce sont elles, et uniquement elles, qui restent du voyage. C’est compliqué. Tout est dans tout, il est extrêmement difficile de trier. Dans ce sens, on pourrait croire qu’il manque des photos des enfants prises par Françoise, sauf qu’il y a des enfants du Mexique, d’Éthiopie, d’Inde, d’ailleurs. Des photos de femmes et d’hommes prises par Françoise et réciproquement par Bernard. En fait tout se mélange, et peu à peu l’humanité transpire des photos, elle suinte, s’extirpe… sauf des photos de Méditerranée sans âme qui vive. Pourquoi ? Il faut demander à Bernard, et s’il ne répond pas, poser la question aux enfants. Pourquoi ces photos sans personne ? L’avenir sans avenir ? Françoise ne s’en mêle pas, il n’y a pas toujours des êtres humains sur ses photos du bout de monde. Ne nous écartons pas. Il y a des voyages, des photos, des enfants, des hommes et des femmes, de la terre, il y a des paysages, des fragments de paysages, ceux-là mêmes que les gens derrière le photographe aperçoivent sans jamais bien sûr les voir. Bref il y a l’humanité, en puzzle, mais tout entière, dans sa misère et son arrogance, dans sa défaite et sa félicité. Donc il y a des voyages, des photos et de l’humanité. À moins que ce ne soient des voyages et de l’humanité. Ou juste de l’humanité, les voyages et les photos ne servant à rien. À moins qu’il n’y ait plus rien. En Méditerranée, le berceau de notre civilisation, en fait de notre humanité, semble vide. Peut-être est-il déjà dans l’attente de la suivante… » Alain Monnier 

 

« Je voulais faire le tour de ma table, aller ouvrir ma bibliothèque vitrée, sortir un appareil photo, n’importe lequel, dévisser l’objectif qui serait dessus et plonger mon regard dans le creux du boîtier à la recherche de ce trouble et de cette douceur que la mélancolie de cet art y mise depuis le début. » Denis Roche 

 

« Accompagnant le geste de la prise de vue, décisif, le photographe mise aussi sur la possibilité de la lumière. Plus tard, le tirage devient l’espace d’une deuxième décision et d’un deuxième risque. C’est dans la succession de ces deux gestes originels que la photographie se donne à voir et aux risques évoqués qu’elle s’expose. Avant même de lire, de prendre de vue, ce qu’il offre à notre regard de spectateurs, nous ne recevrons de l’image développée que l’énergie d’un court moment de lumière. Cette image n’aura retenu ni l’avant ni l’après de sa prise de vue, seulement la courte fraction de seconde de l’obturateur. Ainsi le photographe propose-t-il des instanta-nés. Ces infimes fragments de temps sont capturés dans l’impressionnant vide du temps et de l’espace qui les précèdent et qui les suivent, et qu’on pourrait dénommer instanta-non-nés, moments à jamais perdus pour la mémoire des hommes, ces hommes qui suivent depuis deux siècles l’invention près de Chalon-sur-Saône de la photographie, et qui depuis cette révélation ne cessent de courir après les « instants » à saisir, à faire naître, alors même que tout est englouti dans la disparition. Serait- ce là, dans cette perte, mais aussi dans ce qui subsiste sous l’apparence d’images en deux dimensions, l’étrange émotion produite par l’art photographique, par ce que Denis Roche appelle justement boîtier de mélancolie ? Il reste que l’image choisie par le photographe, tant dans la décision de son déclenchement que dans l’élection sur la planche-contact, devient la trace unique visible de toutes les autres, la trace en creux de ces images qui ne sont pas. Et elle devient la preuve d’une éternité, celle du plus bref instant, instant à la fois intentionnel mais offrant la perspective du hasard et de la liberté qui s’en nourrit. Les images de Françoise Nunez et celles de Bernard Plossu expriment au plus près cette tension entre l’affirmation d’une présence et la conscience de l’absence, dans le renoncement. Sitôt extraites de l’enveloppe qui les protège avant la mise sous cadre, observées sur le mur qui les expose, lues dans leur reproduction dans un de ces nombreux livres où elles trouvent un refuge, on est frappés par l’évidence qui s’y affiche, comme s’il ne nous avait manqué que leur regard pour retrouver du monde ce qui nous en avait échappé, un modeste éblouissement. Il en est des portraits comme des paysages ou des murs des maisons, des places et des rues des villes. Tout y est fragile, éphémère, comme la vie, puissant comme l’eau ou comme le ciel, comme la pierre ou comme le sable. Dans ces cadres vers lesquels la main aura hésité, le spectateur cherchera un regard, un détail d’architecture, un objet, et c’est la vibration de l’air, sa lumière, qui vont rester en mémoire, tant ils sont la matière première de ces papiers révélés depuis l’invention de la photographie, de cette chimie des ombres noires et blanches qui unit Françoise et Bernard dans leur rapport singulier et commun aux choses et aux êtres. » Christian Thorel

 

Modus Vivendi. Orientations bibliographiques Parmi les « modes de vie » des deux photographes invités, la présence des livres… Si le travail de Françoise Nuñez fait l’objet d’une vingtaine de livres, on trouve le nom de Bernard Plossu sur plus de deux cents titres, consacrés à ses images ou accompagnant des publications d’amis, poètes, artistes, écrivains… Nous proposons ci-dessous quelques-uns des derniers livres parus de l’un et de l’autre. Durant l’exposition, la librairie proposera une plus large sélection encore des productions éditoriales des deux photographes.

 

Françoise NUÑEZ

  • De Djibouti à Addis (Yellow Now 2018)
  • Kalari (Arnaud Bizalion 2015)
  • À Valaparaiso (Filgranes 2013)
  • Mu-Jo. Une invitation à Nara (Yellow Now 2010)

 

Bernard PLOSSU

  • Tirages Fresson (Textuel 2020)
  • Roma : 1979-2009 (Filigranes 2019)
  • Lire-Écrire, avec Bernard Noël (Yellow Now 2019)
  • Paris (Marval 2018)
  • À boire et à manger (Yellow Now 2017)
  • Glamour, avec Dominique Païni (Filgranes 2017)
  • Western Colors (Textuel 2016)
  • Periferia, avec Alain Bergala (Yellow Now 2015)

 

Françoise NUÑEZ et Bernard PLOSSU

  • Journal fugitif au Moyen-Orient. Vers Alep

(Le Temps qu’il fait 2012)

  • Ensemble (Éditions Libel 2010)

 

Bernard PLOSSU, Françoise NUÑEZ : Modus Vivendi Photographies

du 9 janvier au 27 février 2021

librairie Ombres Blanches

https://www.ombres-blanches.fr/

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