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Les Arènes : Vincent Jarousseau : Les femmes du lien

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Elles sont aide à domicile, auxiliaire de vie sociale, assistante maternelle, aide-soignante, infirmière, assistante familiale, technicienne d’intervention sociale et familiale, éducatrice spécialisée. La crise sanitaire a mis en évidence le caractère essentiel de leurs fonctions. Lors de son allocution télévisée du 13 avril 2020, le président de la République, Emmanuel Macron, reconnaissait que notre pays tenait « tout entier sur des femmes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal ». Mais très vite, ces femmes sont retournées dans l’ombre. Pourtant le souci des autres que l’on définit par le concept de care est une question politique cruciale recoupant l’expérience quotidienne de la plupart d’entre nous. Il concerne aussi bien le domaine du travail, que ceux du genre et de la santé.

Elles sont 3 millions, 1 femme active sur 4. Mais que sait-on réellement de ces femmes ? Que sait-on de leurs conditions de travail ? Comment-nous représentons-nous la journée d’une aide à domicile, d’une assistante maternelle ou d’une travailleuse sociale ? Que connaît-on des trajectoires de ces femmes, pour certaines venues des DOM-TOM ou de l’étranger ? En réalité, on ne sait pas grand-chose. Cet « autre » monde populaire au féminin a longtemps été occulté des espaces de représentation.

Aussi, pendant plus de deux ans, avant et pendant la pandémie du Covid-19, Vincent Jarousseau est allé à la rencontre de celles qu’il a dénommé Les femmes du lien, celles qui sont au service des autres, dans un territoire rural et post-industriel du nord de la France, aux alentours de Fourmies et en région parisienne, principalement en Seine-Saint-Denis. Il a écouté les paroles de ces femmes qui répondent à des enjeux contemporains majeurs comme la fin de vie, la santé ou la petite enfance. Il s’est intéressé à leurs parcours et leurs destins. Il a voulu montrer par l’intermédiaire de la photographie leurs vies au travail et leur intimité familiale.

Dans la continuité de ses deux précédents ouvrages (L’illusion nationale et Les racines de la colère), il livre aujourd’hui un récit choral autour de neuf femmes, qui mêle roman-photo-documentaire (cf publication de la chercheuse Danièle Méaux*) et BD (avec les dessins de Thierry Chavant). Dans les bulles, ce sont les paroles de ces femmes qui sont restituées fidèlement.

Décrire et documenter ces vies, rendre compte de la condition de ces femmes laissées dans l’ombre, faire ressentir la complexité et la diversité des expériences, loin des clichés misérabilistes : ce documentaire adopte le point de vue de celles qui vivent de l’intérieur ce monde quasi invisible.

L’occultation de ce monde populaire au féminin n’est en rien surprenante. Cela tient à la nature même de la besogne de ces femmes et à la place qui leur est réservée dans la division des tâches au sein de l’économie. Quand on s’occupe des autres, que l’on nettoie, soigne, lave, si cela peut être un choix, c’est le plus souvent la nécessité qui commande l’exercice de ces professions. Or, la contrainte, c’est exactement le miroir opposé du choix, et de l’autonomie de l’individu, qui sont les valeurs célébrées et valorisées à tour de bras par notre société libérale.

* https://journals.openedition.org/focales/1002

 

Vincent Jarousseau : Les femmes du lien
Les Arènes Editions
Format 22cm x 29cm
Nombre de pages 222
ISBN 979-10-375-0583-5
24.9€
https://arenes.fr/livre/les-femmes-du-lien/

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