Alors que ses portraits photographiques de Serge Gainsbourg sont actuellement exposés à Paris à l’occasion des 25 ans de la mort du célèbre auteur, Gérard Schachmes nous parle de son travail et nous a édité une sélection de quelques uns de ses portraits réalisés entre le début des années 80 et 2008.
Depuis plus de 40 ans je photographie les stars et les célébrités pour les magazines du monde entier. J’aime les artistes, ils ont peur mais ils y vont quand même. Ils sont courageux. J’ai eu la chance d’en suivre certains pendant des années, Brigitte Bardot, Céline Dion, Philippe Noiret… J’aime quand ils m’oublient. J’ai suivi Céline Dion pendant une année entière pour une tournée autour du monde. J’étais partout, sur scène avec elle, dans sa loge, pendant ses loisirs, dans l’avion privé. Au bout de quelques temps elle ne voyait plus mon appareil photo. Ce sont les photos les plus fortes. On est dans l’intimité.
Je me suis toujours considéré comme un portraitiste. J’aime aussi le studio qui implique une relation directe avec la personnalité que je photographie. Il n’y a pas de décor, rien sur quoi se reposer. C’est l’échange, entre le modèle et le photographe, qui se dégage de la photographie. Chaque séance est unique. Si la technique est importante, elle ne m’a jamais posé de problèmes car je la maîtrise parfaitement et je ne me laisse jamais surprendre par elle. C’est ce qui me rend disponible. En Studio, mon organisation est chirurgicale. Je suis totalement libre pour la rencontre.
C’est au début de l’année 1989 que Philippe Lerichomme, Directeur Artistique de Serge Gainsbourg me choisit pour une séance photo destinée à la promotion de l’album de Bambou. Serge et Bambou posent ensemble, d’abord en studio d’enregistrement puis lors d’une grande séance dans un studio photo. Je demande à Serge de laisser lunettes noires et cigarettes de côté. Pas d’artifice, pas de mise en scène, juste eux, beaux. Les photos leur plaisent à tous les deux et quelques jours plus tard j’enchaîne avec une séance de Bambou seule. Puis Serge tombe malade et se réfugie à l’Hôtel Raphaël pour sa convalescence. Les paparazzis attendent rue de Verneuil et pour sa tranquillité Serge me propose de faire des photos au Raphaël avec Bambou et Lulu. Philippe Lerichomme est d’accord et la séance paraîtra en couverture de Paris-Match.
Serge va mieux et commence le tournage de son 4ème film long métrage « Stan The Flasher » avec Claude Berri comme acteur. J’ai fait au cours de ma carrière plusieurs tournages avec les plus grands et je suis à l’aise dans cet exercice. Je propose à Serge de venir sur le tournage, il accepte et c’est tout naturellement qu’il me demande de faire une nouvelle séance photo en studio avec Claude Berri. On fait venir sur le plateau une caméra de cinéma. Serge et Claude sont très amis et leur complicité est totale. Ils se taquinent mutuellement pendant toute la séance. Serge dira plus tard en voyant les photos, «je suis pas mal quand je souris ».
Avec Serge Gainsbourg nous parlions de photos ou de cinéma, on travaillait. Pour chaque séance, nous donnions l’un et l’autre le meilleur de nous-mêmes. Il y avait entre nous une forme de reconnaissance, un lien invisible, celui de nos origines communes, sans doute.
Gérard Schachmes
EXPOSITION
« Serge Gainsbourg par Gérard Schachmes »
Les tirages de cette exposition ont été réalisés par le laboratoire Picto.
Du 25 février au 11 avril 2016
Hôtel Raphaël
17 avenue Kléber
75116 Paris
France