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Musée de l’Elysée–Tod Browning, Freaks

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Freaks, La Monstreuse parade

Tod Browning connaissait intimement l’univers du cirque et des Freaks Shows. Avant de débuter une carrière remarquée au cinéma, il fit ses premiers pas dans le monde du cirque. L’esprit de Phineas Taylor Barnum, décédé quelques années plus tôt, marquait encore tous ceux qui travaillaient dans des cirques. Le maître du genre avait transformé la profession à coups de publicité, de supercherie et d’effets d’annonces. Son musée des horreurs trônait encore au centre de Manhattan, il y exhibait sans aucune retenue les monstres et les sauvages qu’il avait su recruter.

De ces premières années, Tod Browning avait retenu le goût du public pour les spectacles mêlant un sentiment d’effroi, de dégoût et d’attraction ; cette peur de l’autre, mélangée à sa fascination ; la découverte d’une créature qui, sous ses traits anthropomorphes, nous rappelle à son humanité.

Cette leçon, il l’avait faite sienne lorsqu’au cinéma il donnait vie à une créature légendaire. En 1931, Dracula, jusqu’alors personnage romanesque et théâtral, prit les traits de Bela Lugosi pour hanter les salles obscures de son réalisme cinématographique. Dans la catégorie des créatures, le vampire – cet homme-chauve-souris qui se nourrit de sang humain pour se régénérer – occupe une belle position. Et la magie du cinéma, associée au jeu de Bela Lugosi et au talent de Tod Browning, allait convaincre le public de se laisser aller au frisson.

Quelques années plus tôt, dans The Unknown, Browning avait mis en scène une sorte de monstre. Le décor était campé dans l’univers d’un cirque et Alonzo – incarné par Lon Chaney, acteur fétiche de Browning – est l’homme sans bras, l’incroyable lanceur de couteaux. Le handicap n’est que supercherie pour attirer le public. Pourtant lorsque la police est sur le point de démasquer l’imposteur, Alonzo se fait réellement amputer des deux membres.

En 1927, avec The Unknow, Tod Browning fait une entrée remarquée dans le monde spectaculaire des Freaks. Cinq ans plus tard, il poursuit l’incursion en réalisant Freaks, la Monstrueuse parade. Le casting est spectaculaire, plus de la moitié des acteurs sont de véritables phénomènes de foire (créatures, monstres), recrutés auprès du cirque Barnum.

Pourtant, avec Freaks, il y a un point de rupture dans la longue histoire des exhibitions. Si Tod Browning, lorsqu’il avait mis en scène Dracula, avait joué de l’illusion réaliste du cinéma pour effrayer son public, avec Freaks, c’est le cinéma qui s’empare de la réalité. En choisissant de montrer les coulisses d’un cirque, Tod Browning peut à sa guise présenter l’humanité de ses monstres. Car être monstre n’est pas un état mais bien une composition, un rôle. Certes, l’atrocité d’une malformation intrigue, éveille une certaine curiosité, mais c’est sa mise en scène qui captive.

La photographie de cinéma prend ici la suite de la photographie foraine ou de la photographie anthropologique, pour offrir aux « monstres » de Freaks une destinée hollywoodienne…

Sam Stourdzé, directeur, Musée de l’Elysée, Lausanne

L’histoire
Le film Freaks (1932) raconte l’histoire de Hans, un « nain » de cirque, qui délaisse sa fiancée Frieda pour la belle trapéziste Cléopâtre. Apprenant que Hans a hérité d’une fortune, Cléo conspire alors avec son amant Hercule, le colosse, pour épouser Hans en vue de l’empoisonner, et ainsi hériter. Dans la fameuse scène du banquet de noces, les freaks organisent une cérémonie pour accueillir Cléo dans leurs rangs. Ils entonnent en coeur « Nous l’acceptons, l’une des nôtres, nous l’acceptons, l’une des nôtres (…) », tandis que le rire ironique de Cléo vire au dégoût, puis à la rage. Elle se met à hurler sur ses invités, les traitant de « saletés, de monstres dégoutants » devant son nouveau mari embarrassé. Très vite, les amis de Hans découvrent les intentions de Cléo et, fidèles à leur précepte « offenser l’un d’entre eux, c’est les offenser tous », ils décident de s’unir pour infliger une terrible vengeance.
Rampant dans la boue et la crasse à la poursuite de Hercule et de Cléo, les freaks assassinent le colosse et mutilent la trapéziste. Cléo finit à jamais dans le goudron et les plumes, réduite à l’état de « femme poule » grotesque, éructant des gloussements au milieu d’un carnaval de monstres.

Freaks, La monstreuse parade
Photographies de la collection Enrico Praloran, Zurich

Exposition du 21 septembre 2012 au 6 janvier 2013.
Commissaires : Sam Stourdzé et Anne Lacoste

L’exposition est accompagnée d’un livre co-édité par IDPURE Editions et le Musée de l’Elysée.

Projection exceptionnelle de The Unknown (1927) de Tod Browning, accompagnée par les musiciens Rodolphe Burger et Alberto Malo, le samedi 22 septembre 2012 à 20h30 dans les jardins de l’Elysée. Projection organisée en partenariat avec la Cinémathèque suisse.

Projection quotidienne de Freaks (1932) de Tod Browning à partir du 7 novembre 2012 dans la Salle Lumière du Musée de l’Elysée. Projection organisée en partenariat avec le Cinéfestival.

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