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Miquel Dewever-Plana et Isabelle Fougère : Potosí en sol mineur

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Après avoir passé plus 9 mois avec les mineurs de Potosi en Bolivie, Miquel Dewever-Plana vient de publier le livre Potosí en sol mineur aux éditions Artem&Cetera/Blume, accompagné d’un roman inédit d’Isabelle Fougère. À partir de 1545 les conquistadors espagnols ont exploité pendant trois siècles le Cerro Rico ( « La montagne riche »), devenue la plus grande mine d’argent au monde. Le petit hameau, perché à plus de 4000m d’altitude, construit au pied de cette montagne, deviendra en quelques décennies une ville aussi grande que Londres ou Paris. Cinq siècles plus tard, la montagne est toujours exploitée par quelque milliers de paysans devenus mineurs, dans des conditions de travail extrêmement précaires, qui rappellent celles du Germinal de Zola. Les deux auteurs et l’association Artem&Cetera ont mis en place un modèle économique qui leur permet de consacrer les bénéfices de la vente des livres au financement d’une édition gratuite en espagnol destinée aux mineurs de Potosi.

 

 

 

Les mots de Miquel Dewever-Plana :

« Je souhaitais, depuis plus de 20 ans, retourner en Bolivie afin de réaliser un projet à Potosí avec les mineurs du « Cerro Rico » (La montagne riche). Cette montagne qui, du haut de sa splendeur, domine la ville de Potosí, fût la plus grande mine d’argent au monde. Elle est et restera le symbole du pillage des ressources naturelles dont parle Eduardo Galeano dans son livre Les veines ouvertes de l’Amérique latine. Cette histoire est un nouveau chapitre de la radiographie que je tente de réaliser depuis près de 25 ans de ce vaste continent.

Là-bas, à plus de 4000m d’altitude, des hommes et des femmes, des paysans quechuas pour la plupart usent, depuis cinq siècles, leur brève existence à arracher le métal précieux du ventre de la montagne. La souffrance est telle que j’ai vu leurs visages se transformer jusqu’à ne plus les reconnaître au sortir de ce monde du dessous. Obscurité, chaleur, poussière, vapeur d’arsenic, manque d’oxygène sous la terre pour les hommes. Soleil éblouissant, pluie, vent et le froid qui brûlent les yeux et la peau sur les pentes arides de la montagne pour les femmes, qui exploitent le minerai à ciel ouvert ou travaillent comme gardiennes de mines. Malgré les dangers et la maladie c’est pour eux l’unique moyen d’échapper à un destin écrit d’avance, hérité dès leur naissance d’une terre qui ne les nourrit plus.

Emblématiques d’un monde qui n’offre plus de place aux petits, aussi valeureux soient-ils, ils ont cependant la fierté d’appartenir à une véritable corporation, soudée par de nombreux rituels et croyances.

J’ai, pendant neuf mois, eu le privilège de les accompagner et de partager leur quotidien chez eux, dans les mines ou dans leur village d’origine, invités à partager leurs rituels. Complices, voire demandeurs, ils ont accepté de m’emmener avec eux au creux de la montagne. Je pense n’avoir jamais autant souffert physiquement, et pourtant je savourais chaque instant passé en leur compagnie, parce que même si elle empoisonne au quotidien leur santé, la mine reste leur domaine d’hommes forts. Les joues gonflées par les feuilles de coca pour faire taire la faim et la souffrance physique, ils continuent de creuser, toujours plus loin, à la poursuite du même rêve, celui de trouver le filon d’argent tant fantasmé qui mettrait fin à cinq siècles d’infortune. Ils ont voulu se montrer tels qu’ils sont, tels qu’ils font, dans un sursaut de dignité, alors que, chaque jour, les frêles couloirs qu’ils parcourent menacent de s’écrouler et de les ensevelir.

On découvre, au travers de la photographie et des témoignages, la manière dont ils interprètent l’histoire de Potosí, depuis l’arrivée des Espagnols jusqu’à aujourd’hui. Une vision bien différente de l’Histoire officielle.

Le résultat est « Potosí en sol mineur », un livre écrit comme une partition à quatre mains : d’un coté, un essai photographique qui raconte ce quotidien édifiant des mineurs de Potosí,  et de l’autre un roman inédit d’Isabelle Fougère où, sur fond de drame social, elle fait la part belle aux croyances ancestrales des mineurs tout en inscrivant leur réalité dans un contexte de monde globalisé et livré à la loi du plus fort. C’est un « livre-double » de 336 pages, avec deux couvertures, qu’il suffit de retourner pour passer de l’essai photographique à un roman et du roman à l’essai photographique. Deux récits autonomes qui se répondent en écho, du réel le plus rigoureusement documentaire à la fiction à portée plus universelle. C’est toujours la même histoire, explorée sous deux facettes.

Ils et elles ont voulu ce livre, pour eux, pour leurs enfants, mais aussi pour les autres, leurs voisins, leur pays, et, encore plus loin, pour nous. C’est pourquoi, comme à chacun de mes projets éditoriaux, j’ai voulu qu’une édition gratuite en espagnol de ce livre puisse être destinée à ces hommes et ces femmes du Cerro Rico. C’est dans cet échange que mon métier de photojournaliste prend tout son sens. C’est pourquoi ce livre ne peut être acheté qu’au travers de la plateforme « Helloasso ». Les bénéfices d’un livre vendu nous permettent ainsi de financer un exemplaire pour les mineurs de Potosí.  Au total ce seront 500 exemplaires qui seront distribués aux familles de mineurs de Potosí.

Le livre Potosí en sol mineur est disponible sur Hello Asso.
336 pages, 42 € (ou plus, selon le montant de votre don).
Un livre acheté finance le don d’un livre aux mineurs de Potosí.

Le site de Miquel Dewever-Plana. 
Lesite de

 

À propos du projet NewsFromPhotographers, les mots de Serge Challon, son fondateur :

« Pendant toutes mes années de collaboration avec les photographes, et notamment au sein de l’agence Editing, j’ai toujours été frustré de voir qu’il n’y avait aucun espace disponible pour publier ce qu’ils nous racontaient à leurs retours de reportage. La presse utilisait leurs images, respectaient parfois leurs légendes mais n’exploitait que rarement les informations collectées par ces hommes et ces femmes qui n’ont d’autre choix pour travailler que de s’approcher au plus près de ceux qui vivent les soubresauts du monde.

Chaque reportage est l’objet d’une collecte d’informations précieuses mais aussi une expérience et une aventure qui, associées, permettent d’apporter quelques réponses à la question que nous partageons avec Aragon : Est-ce ainsi que les hommes vivent ?

NewsFromPhotographers inscrit cette interrogation dans le développement d’une proposition que j’avais déjà initiée et réalisée sous le titre Temps de Pose pendant plusieurs années pour Arte Reportage. Les retours des téléspectateurs disaient leur plaisir d’apprendre des informations complémentaires et nouvelles sur des sujets qui étaient parfois largement traités par les grands médias et par ailleurs leur émotion à l’écoute des voix des photographes et face à la puissance de leurs témoignages.

Les premiers entretiens et films courts que nous avons réalisés avec Vartan Ohanian et les photographes Ulrich Lebeuf, Antoine Agoudjian et Miquel Dewevere Plana s’inscrivent dans cette ligne éditoriale en associant une narration visuelle et le témoignage à voix haute des auteurs des images. Nous ne nous imposons aucune contrainte dans la fréquence de nos publications mais, de manière naturelle, nous travaillons sur un ou deux sujets par mois. Les  contributions d’autres éditeurs photo indépendants, ou en activité dans les médias, qui proposeront et réaliseront avec nous d’autres sujets, nous permettront d’augmenter ce rythme et de diversifier nos contenus, avec le souhait particulier de toucher le public jeune en plus de ceux de tous âges qui restent curieux du devenir des hommes et attentif à celui de notre planète.

La deuxième étape de ce projet, avec la création d’un véritable site de presse en ligne, que nous élaborons en équipe avec Xavier Gautruche, David Morel (ancien photojournaliste) et l’agence Digital Cover, nous permettra bientôt d’associer à ces films courts les podcasts des entretiens et d’autres textes de contextualisation historique et géopolitique ainsi que des contributions complémentaires, plus engagées, de personnalités pertinentes et concernées par les sujets traités.

 

La chaine Youtube de NewsFromPhotographers.

Le site de NewsFromPhotographers.

 

 

 

 

 

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