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Le coup de gueule de Françoise Huguier

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Petit billet d’humeur:

Défilé VALENTINO dans l’ancien temple de la photographie rue Berryer

Où comment on transforme les photographes en chimpanzés disciplinés !!

Munie de mon accréditation pour faire des photos backstage et podium , je pensais que ces deux badges étaient des sésames, malheureusement non. Depuis quelques années le backstage donne uniquement l’autorisation de photographier les coiffeurs, les maquilleurs et éventuellement les mannequins. Un nouveau badge est apparue le FIRSTVISION. Il consiste à photographier à la queue leu leu les mannequins habillés avant qu’elles rentrent sur le podium.

Ayant une certaine expérience des défilés, je suis arrivée rue Berryer une heure et demi avant munie de mes badges. Premier barrage, on me dit qu’il est trop tard et que je ne peux plus entrer. J’insiste, finalement j’ai la permission mais accompagnée. On me présente un monsieur de la sécurité, un malabar charmant qui m’accompagne, nous prenons l’ascenseur Il me confie qu’il est le cousin d’un chef Bamilékés, ça me rassure. Au deuxième étage, second barrage, deux jeunes hommes de la sécurité en cravates noires me reconfirment à leur tour qu’il est trop tard. On appelle l’attaché de presse qui me précise que j’ai dix minutes pour faire les photos dans la salle où l’on maquille et coiffe les mannequins. Encadrés des « deux cravates noires » nous pénétrons dans le backstage et là quelle ne fut pas mon étonnement quand à chaque fois que je prenais une photo ils regardaient l’écran de mon numérique pour surveiller ce que je faisais. Je réussis à larguer « mes deux commissaires politiques « pour me faufiler dans la pièce où sont suspendues toutes les robes car comme à mon habitude j’aime regarder les tissus, la forme des robes pour me sensibiliser au défilé. L’attaché de presse et « les deux commissaires politiques » reviennent en force et me somment de quitter la pièce en hurlant. Je leur demande pourquoi .Ils me répondent : « vous les photographes vous ne pensez qu’à Photographier les mannequins à poil » et me ils me reconduisent sur le palier. Là, j’attends une demi heure avant qu’on m’ordonne de descendre au rez-de-chaussée, le seul endroit où j’ai le droit d’aller.

Au pied de l’escalier deux cravates noires et une autre attachée de presse qui me hurle de nouveau dessus et m’ordonne d’aller derrière un cordon noir : la place des photographes pour la FIRST VISION. Cet espace derrière ce cordon, au bas mot 3 mètres carrés où vont s’agglutiner une vingtaine de photographes .

Au bout d’une heure, toujours sous les insultes pour avoir avancé un ou deux doigts de pieds au delà du cordon l’attaché de presse revient et diminue encore notre espace. Puis « les cravates noires »se mettent devant nous de l’autre coté du cordon, arrivent les coiffeurs et maquilleurs pour le dernier relookage, enfin les mannequins en file indienne prêtes à se lancer sur le podium. Malgré tous ces obstacles devant moi, j’aperçois enfin deux robes en toile de Jouy qui me rappellent les murs des chambres du château de ma grand-mère.

Le défilé commence, l’attachée de presse re-hurle « vous pouvez commencer à prendre les photos ». Et là commence pour moi un slalom photographique.

Comment faire des images quand devant moi j’ai « les commissaires politiques », les coiffeurs , les maquilleurs et les mannequins qui pour la plupart nous tournent le dos et derrière moi un photographe italien qui me colle aux fesses pendant tout le défilé et me hurle à l’oreille : « Salope, casses-toi espèce d’enculée » , à l’autre oreille « nos commissaires politiques : « Reculez, y’en a marre, vous les photographes vous êtes tous des voyous .

Un peu assommée , en sortant de la rue Berryer, je me disais : comment se fait-il que l’ambiance se soit dégradée à ce point, que le respect des maisons de coutures et des créateurs pour notre métier ait disparu ? Faut il en déduire que pour eux nous sommes des chimpanzés qu’on peut parquer derrière un cordon noir en leur lançant quelques cacahouètes pour les calmer ?

Ce billet d’humeur je l’écris comme un manifeste contre le mépris du travail et du talent des photographes qui ont un vrai point de vue photographique et qui aiment la mode.

Françoise Huguier
[email protected]

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