La galerie Metro Pictures présente les nouvelles photographies de Cindy Sherman qui s’était faite discrète depuis son exposition au Museum of Modern Art à New York en 2012. Comme à son habitude, l’artiste s’est maquillée, déguisée et mise en scène, inspirée par des portraits d’actrices vieillissantes d’Hollywood. La référence aux stars du cinéma muet, oubliées à l’arrivée du cinéma parlant, prend la forme d’un hommage à ces femmes tourmentées par leur gloire et leur jeunesse passées et remplacées par une nouvelle génération d’actrices. Cindy Sherman joue volontiers d’un certain anachronisme entre leurs portraits des années 1950 et 1960 et les codes propres à l’époque de leur âge d’or dans l’entre deux guerres. Ces images déplacent l’esthétique glamour dans une atmosphère surannée : les poses sont pétrifiées et raides, le regard divague au loin, les expressions sont figées dans le maquillage. La lumière est parfois théâtrale et dramatique et les décors retouchés sur Photoshop donnent à l’ensemble une vibration étrange. Les photographies sont des grands formats tirés avec une nouvelle technique d’impression sur métal qui permet de se passer de verre antireflet. Leur qualité est remarquable et laisse voir, quand on s’approche, l’imperfection et la facture incertaine des tenues et des accessoires, les mains vieillies de ces femmes qu’elles ne savent pas bien où poser.
Dans un entretien au New York Times le 26 avril dernier, Cindy Sherman s’interrogeait, non sans sarcasme et en toute lucidité : « c’est la dernière fois que je fais cela, je suis fatiguée d’être mon propre sujet, qu’est-ce que je peux faire de plus pour me transformer ? » C’est une question légitime et elle l’est aussi pour le spectateur qui garde à l’esprit ses anciennes séries, mais l’artiste montre dans ces nouvelles photographies une peur du ressassement et de la répétition ; c’est dans cette inquiétude que ces images prennent une autre dimension et que réside toute leur beauté. S’il est toujours difficile d’évaluer les nouvelles propositions de grands photographes au regard de leur œuvre passée, on s’attendait à voir « du » Cindy Sherman mais on a finalement cru entrevoir quelque chose de plus. Ces images ne sont pas que des mises en scène un peu baroques, elles sont comme de véritables autoportraits, détournés mais authentiques. La photographe l’assume sans réserve : « c’est la chose la plus sincère que j’ai pu faire ».
EXPOSITION
Cindy Sherman
Du 5 mai au 11 juin 2016
Metro Pictures
529 West 24th Street
New York
Etats-Unis
http://www.metropictures.com
http://www.cindysherman.com
http://hugofortin.fr/blog/photoshows-nyc/