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Centre Pompidou : Qu’est-ce que la photographie ? Interview de C. Chéroux et K. Ziebinska-Lewandowska

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Clément Chéroux est conservateur et chef du cabinet de la photographie au Musée national d’art moderne. Karolina Ziebinska-Lewandowska est conservatrice au cabinet de la photographie. Ils sont co-commissaires de l’exposition Qu’est ce que la photographie ?, qui montre des œuvres des artistes suivants : Joseph Beuys, Brassaï, Michel Campeau, Paul Citroen, Jean-Louis  Garnell, Jochen Gerz, Douglas Gordon, Mariusz Hermanowicz, Mishka Henner, John Hilliard, André Kertész, Man Ray, Abelardo Morell, Robert Morris, Ugo Mulas, Giulio Paolini, Florence Paradeis, Timm Rautert, Józef Robakowski, Denis Roche, Jan Saudek, Patrick Tosani, Jeff Wall, James Welling. Ils nous racontent la galerie de photographies et l’exposition.

LODLP : Parlez-nous de la galerie de photographie…
Clément Chéroux : Qu’est-ce que la photographie ? est la deuxième exposition de la galerie de photographies. La galerie est un nouvel espace au Centre Pompidou, créé en novembre 2014, et qui a pour ambition de mieux montrer la collection de photographies du centre. La collection abrite 40 000 œuvres : c’est la plus grande collection d’Europe pour la photographie et l’une des deux ou trois grandes collections internationales par la richesse des pièces qui y sont conservées. 300 ou 400 pièces de cette collection sont montrées en moyenne dans le parcours permanent du musée. Il  y a une discrépance entre ces 300 ou 400 œuvres et les 40 000 de la collection : nous avions envie d’un espace qui lui donne plus de visibilité. Nous allons continuer à montrer de la photographie dans les salles du musée, et à faire des expositions de photographie dans les autres espaces. Ce n’est pas un espace qui remplace ou qui concentre toute l’activité photographique du musée, c’est un espace qui vient se rajouter à l’activité du centre Pompidou en matière de photographie. Nous allons y présenter trois expositions par an : une exposition historique — nous avons commencé avec une exposition Jacques-André Boiffard en novembre dernier ; une exposition contemporaine — ce sera la prochaine, qui sera consacrée à Anna et Bernhard Blume ; et une exposition thématique — c’est le cas de cette exposition intitulée Qu’est-ce que la photographie ?

LODLP : Comment aborde t-on un sujet comme celui-là ?
C. C. : Quand on présente des expositions thématiques, l’enjeu est d’avoir une grande question de l’histoire de la photographie, de l’histoire de l’art et puis de parcourir la collection depuis le début du XXe siècle, jusqu’au début du XXIe. Nous ne commençons pas par la question la plus simple, au contraire. Elle n’est pas nouvelle, elle se pose depuis les débuts de la photographie. Nous avons choisi de ne pas la poser de manière abstraite, mais à partir des œuvres des artistes. Nous présentons dans l’exposition une trentaine d’artistes, de Man Ray jusqu’à Jeff Wall en passant par Ugo Mulas ou André Kertész, qui se sont eux-mêmes posé cette question et qui ont tenté d’y répondre à travers une photographie ou une série de photographies. Ce qui nous intéressait, c’était d’aborder cette problématique à travers les pratiques plutôt qu’à travers les théories, d’exposer des praticiens qui font de la théorie en actes. C’est peut-être la différence et aussi la nouveauté de cette proposition.

Karolina Ziebinska-Lewandowska : Il s’agissait de voir ce qui dans la collection réagit avec cette question. Parfois, ce sont les œuvres qui la posent ou y répondent en direct et parfois, elles réagissent avec cette problématique mais n’en sont pas si proches. C’est une lecture intéressante de la collection. Clément Chéroux avait lancé la recherche avant mon arrivée (il y a un an). Ensuite nous avons du prendre des positions. Comme c’était notre premier projet en commun, c’était intéressant de regarder tout ce matériel rassemblé d’un œil critique et de déterminer ce qu’il signifiait pour nous, avec quoi nous étions d’accord ou pas, quelle direction prendre. Nous sommes parti d’une sélection de 1 000 œuvres et nous avons fini avec une trentaine.

C. C. : Nous n’avions, dans les premiers résultats de la recherche, que des appareils photo ou des gens avec un appareil photo, des autoportraits de photographe… Il fallait donc complexifier un peu le propos. Certaines des œuvres répondent à cette question avec subtilité, de façon métaphorique. Je pense par exemple à la pièce de Patrick Tosani qui représente des petites figurines de modélisme emprisonnées dans un glaçon. Au premier abord on pourrait se demander quel est le rapport direct avec la photographie : à travers cette œuvre, Tosani nous parle de la capacité de la photographie à figer, à arrêter le mouvement humain.

LODLP : Les photographes exposés ont des pratiques très différente les unes des autres : avez-vous joué sur cela aussi ?
C. C. : Oui. C’est important. Nous avons dans la collection des pièces qui viennent d’horizons très différents, c’est ce qui fait sa richesse : de la photographie documentaire, plasticienne, des expérimentations de l’entre deux guerres, de la photographie conceptuelle des années 60 et 70… L’enjeu de cette exposition est de montrer les différentes réponses à cette unique question. Il faut bien comprendre que nous ne cherchons pas à y répondre, mais plutôt à dire qu’il y a finalement autant de réponses que de photographes ou d’artistes.

K. Z.-L. : Et autant de réponses que de lecteurs. C’est une exposition qui ouvre un dialogue. C’est aussi pour cela que nous ne voulions pas donner de réponse définitive. Chacun de nous pourrait dire ce qu’est la photographie pour lui. De même, chaque spectateur peut le dire. Cette ouverture est là aussi pour laisser les spectateurs donner leur propre réponse : par exemple, les jeunes, les enfants qui ont une approche de la photographie très différente de celle de notre génération.

C. C. : Le pari pédagogique de l’exposition est que le spectateur qui va voir le titre de l’exposition dans la presse ou sur une affiche va se dire : «  Je vais aller au Centre Pompidou pour avoir une réponse à la question : Qu’est ce que la photographie ? » Il va rentrer dans l’exposition et avoir une quarantaine de réponses différentes. Il va voir des artistes pour qui la photographie c’est la lumière, d’autres pour qui c’est le temps ; pour d’autres encore, c’est le grain ou l’instant ou la mémoire, le décalage, la technique : des réponses très terre à terre ou beaucoup plus philosophiques. Et finalement, à force de voir qu’il y a autant de réponses que de gens qui se posent la question, nous pensons qu’il va se la poser à lui-même.

K. Z.-L. : Une trame organise l’exposition en sections dont les titres évoquent les sujets qui ont été décrits par les théoriciens : comme la représentation, la matérialité de la photographie, la question de la distribution. Nous n’écartons pas totalement la réflexion théorique mais elle est peu présente, juste évoquée : ceux qui veulent l’activer peuvent le faire. Mais ce n’est pas nécessaire pour rentrer dans l’exposition et pour y trouver une réponse personnelle.

LODLP : Il y a dans l’exposition plusieurs artistes qui sont des artistes plasticiens et pas uniquement des photographes, comme Joseph Beuys, mais il n’y a pas de photo de reportage…
C. C. : Vous avez raison. Nous n’avons pas trouvé, dans le cadre des reportages qui sont conservés dans les collections du Centre Pompidou, des images qui répondaient à cette question. Mais, ça me paraît logique, parce que quand un photographe fait du reportage, sa question ce n’est pas tant la photographie que le sujet même de son reportage. Il faudrait creuser cette jolie question : est-ce qu’il y a des reportages qui répondent à la question : « Qu’est ce que la photographie ? ».

K. Z.-L. : Cela dépend aussi de comment se définit le reportage. Pour moi par exemple, la série de Michel Campeau sur les laboratoires photographiques est un reportage : on ne le voit pas ici parce que les formats sont assez grands, il faudrait voir toute la série pour le comprendre. À l’inverse, dans le cas de Brassai, on a l’impression que ce pourrait être un reportage alors que ce n’en est pas un. Il y a cette confusion de genre qui rentre presque dans la réponse à la question. Une des pièces d’Ugo Mulas montre tout le concert de Yannis Kounellis : c’est un reportage mais il le détourne, il joue avec.
Aujourd’hui, il y a moins de distinction entre les différents genres. Surtout au sein d’un musée d’art où tout se confond : il y a une partie de la production photographique qui est rentrée dans les collections et ce passage vers la production d’art en général dans lequel on retrouve aussi la photographie, ou des objets sur lesquels les photos sont collées… Nous n’avons pas cette façon de penser par medium d’une manière très pure. Nous réfléchissons de manière plus ouverte à la photographie comme représentation, comme outil que différentes personnes utilisent.

C. C. : Néanmoins, je pense que nous avons réussi à réunir dans l’exposition beaucoup de styles de photographies : expérimentale, conceptuelle, plasticienne, documentaire. Cela reflète notre approche : là où des générations plus anciennes de conservateurs avaient pour idée de défendre un type de photographie, de choisir la photographie plasticienne, ou la photographie faite par les artistes, nous avons tous les deux plutôt comme volonté d’ouvrir au maximum, de considérer la photographie comme un grand ensemble.

LODLP : Nous passons dans la galerie de photographies pour une visite commentée de l’exposition et de quelques unes des œuvres qui y sont présentées.
C. C. : Nous sommes accueillis dans l’exposition par une œuvre de Paul Citroen (Im Theater, vers 1930), un artiste hollandais qui a été proche du Bauhaus. Il propose une image métaphorique dans laquelle on voit un personnage en train de regarder à travers de petites jumelles une scène qui est hors champ. Elle représente pour nous l’envie de voir, cette espèce de pulsion scopique qui est à l’origine de toute photographie.
L’exposition est constituée de huit sections qui nous semblent réunir les différentes thématiques — la photographie, ce sont des envies, des matériaux, des principes… —  qui sont des réponses métaphoriques ou prosaïques à la question. Dans la section “Des envies”, la photo d’André Kertész (Autoportrait, 1927) est justement assez métaphorique. La section suivante est plus terre à terre : la photographie ce sont “Des matériaux”, une physicalité. Pour James Willing (Gelatin Photograph 40, et Gelatin Photograph 45, 1984), par exemple, pour faire de la photo il faut de la gélatine qui va emprisonner les grains. Il répond de façon très pragmatique à la question. Giulio Paolini (Sette fotogrammi della luce, 1969) nous dit que la photographie ce sont des grains d’argent qui s’obscurcissent à la lumière. Nous sommes vraiment là dans une réflexion sur le matériau qui est intéressante parce que, à force de se poser la question « Qu’est ce que la photographie ? », on en perd la raison pour laquelle la photographie existe, c’est à dire qu’on en perd la capacité de la photographie à  montrer les choses de manière réaliste : à tellement vouloir rentrer dans la photographie, dans le grain, Paolini finit par produire des images abstraites qui ne donnent plus rien à voir si ce n’est le matériau.

K. Z.-L. : Toujours dans la même section, cette pièce de Joseph Beuys (Sans titre, 1963) est un bon exemple de ce qui raisonne avec la question titre. Je ne sais pas si Beuys se la posait, mais c’est une œuvre qui réagit à la problématique peut-être mieux que certaines réponses qui ont été données. On y voit un négatif obstrué, obscurci : on a l’impression que quelque chose a été enregistré mais cela reste caché.

C. C. : Beuys a posé cette espèce de croix marron, que l’on voit ici peinte sur le négatif, sur beaucoup de ses œuvres : c’était presque devenu sa signature. Je crois que le fait d’apposer cette croix — comme il l’a fait sur le feutre ou sur la graisse — était sa façon de révéler qu’il s’agissait là d’un matériau qui l’intéressait. Il aimait les surfaces tactiles, les matières sensibles : il a signé ce négatif comme une matière sensible.
Chaque œuvre est accompagnée d’un petit texte très court qui rappelle d’où elle sort et pourquoi elle nous intéresse dans ce contexte là. Nous voulions expliquer que cette pièce par exemple (Abelardo Morell, Camera Obscura. Image of Boston, 1998) va parler d’un principe photographique, celui de la camera obscura, cette autre de celui de la fixation. Mais nous ne voulions pas non plus fermer les œuvres, chacun va pouvoir y voir autre chose.

K. Z.-L. : Cela permet aussi d’expliquer de façon pédagogique quel est le principe de la photographie, d’où le titre de cette section “Les principes”. Très peu de personnes ont l’expérience de la camera obscura. C’est une expérience étonnante quand on voit qu’il suffit d’un trou pour qu’une image apparaisse.

C. C. : Avec la pièce de Tosani (Le Marcheur, tryptique, 1982-1983), nous passons du très technique au très métaphorique : la photographie fige ce marcheur comme le glaçon. Il y a aussi des choses plus techniques dans cette autre section, “Une praxis”, sur la pratique photographique, le cadrage, le point de vue, la profondeur de champ. Là, nous aurions pu multiplier les exemples, nous nous sommes restreints à quelques-uns seulement. Comme cette œuvre de Mariusz Hermanowicz (Le Vieil Appareil photo, 1981), un photographe polonais qui est arrivé en France au début des années 80. Il y parle des surprises de la photographie : il construit une petite fiction dans laquelle il raconte qu’il a trouvé un vieil appareil et que des fantômes apparaissent dans les images qu’il fait d’un mur. Comme la photographie est un objet technique, on peut avoir l’impression que l’on peut maitriser cette technique, alors qu’il y a toujours des éléments surprenants qui apparaissent. C’est une donnée cruciale de la pratique photographique : les meilleurs photographes sont ceux qui précisément laissent advenir ces hasards là. Il y a beaucoup de récits dans ce sens.

K. Z.-L. : Nous arrivons dans une section sur le laboratoire, “Une alchimie”, qui aborde la pratique et l’expérience. L’expérience de la chambre noire est magique, c’est de l’alchimie. Même si ces œuvres-là en parlent d’une manière assez objective. Cette pièce de Timm Rautert (Sonne und Mond von einem negativ, diptyque, 1972), très dans l’esthétique des années 70, le montre bien. Ce sont deux tirages d’un même négatif qui sont contraires : le jour et la nuit. Cela montre aussi que la photographie est pleine de manipulations, non seulement au niveau du cadre comme on le voit dans la pièce de John Hilliard (Plundered/Dug/Dry/Prepared, 1975) dans laquelle les significations changent, mais aussi au niveau du tirage. La photographie dit la vérité autant qu’elle ment. Cela permet d’aborder la réalité et sa représentation : un grand sujet théorique et artistique. Il y a quantité de textes là-dessus que l’on peut illustrer avec de très belles pièces de la collection de manière très différente.
Ce qui nous emmène dans la section suivante, ”Un écart”, vers cette pièce de Jeff Wall (Picture for Women, 1979). C’est sa seconde light box. Elle débute une époque dite post moderniste dans laquelle la réflexion autour de la représentation, de l’image photographique, entre d’une manière nouvelle dans la pratique artistique : on voit que l’esthétique change radicalement de celle des années 70. C’est une pièce qui m’intimide toujours avec toutes ses références non seulement à l’histoire de la peinture, à l’histoire de la modernité mais aussi à ce qu’est l’image. L’image comme reflet de la réalité : ici, on ne regarde que le reflet. Ce n’est pas la représentation photographique et l’image de cela, ce n’en est que le reflet : c’est très trompeur parce qu’on ne sait plus ce que l’on voit. Le rôle de l’appareil photographique y est central. Jeff Wall a coupé l’image en deux à cause de raisons techniques, mais il a élaboré toute une réflexion autour de cette division. Cette composition, la répartition de l’espace : c’est une œuvre très construite.

C. C. : L’œuvre suivante est une vidéo. Nous souhaitions montrer plusieurs supports : des photographies en noir et blanc, en couleurs, une light box, des objets, une vidéo. C’est une pièce de Jochen Gerz (Exposition de Jochen Gerz à côté de sa reproduction photographique, documentation de la performance, 1972) : une performance filmée dans laquelle il pose pendant plusieurs heures à côté de sa représentation photographique dans une rue de Paris. C’est fascinant de voir que certaines personnes s’arrêtent et regardent d’avantage la photographie que le personnage réel. Cette section s’intitule un écart, parce que ce qui nous voulions parler des écarts qui peuvent exister entre la photographie et son original. Beaucoup de photographes s’y sont intéressé. Quand Gary Winogrand, par exemple, disait  : « Je photographie pour comprendre à quoi ça va ressembler en photographie », nous sommes dans cette volonté de mesurer l’écart entre la photographie et la réalité.

K. Z.-L. : C’est aussi une section autour de la compréhension de l’image : comment se constitue le sens dans le processus de la lecture.

C. C. : Dans la section suivante, “Des ressources”, nous abordons la question de la photographie comme ressource, qui nous donne accès au monde, notamment à travers les images des journaux. Il y a une sorte de chronologie dans l’exposition : nous commençons par le photographe qui a envie de voir, le photographe qui choisit son sujet, puis qui photographie, qui développe… Ici, nous sommes dans le monde des images qui inclut la question du regardeur, du collectionneur. Avec, par exemple, cette pièce de Florence Paradeis (Les images, 1995) : elle montre une femme qui découpe des images dans les journaux, qui les classe, les organise, constitue des collections. Je trouve très beau le tatouage de dragon qui apparaît sur son épaule, et qui est une image sur le corps lui-même, comme si elle avait incorporé les images.

K. Z.-L. : Il y a également une œuvre de Jean-Louis Garnell (Tryptique #1, 1992) qui montre un livre, un CD et un négatif. On pourrait la comprendre comme elle est : différents matériaux de diffusion. La photographie c’est donc tout ce que nous avons montré précédemment, mais c’est aussi l’autre vie de ces images. La pièce parle également du côté muet de la photographie, quand il n’y a pas de légende. On ne sait pas de quoi il s’agit tant que ce n’est pas commenté. Tous ces supports dans lesquels les images sont enfermées, il faut les activer. Le support ne donne pas d’accès direct au contenu, mais il est ce qui permet de diffuser les images.

C. C. : Toujours dans cette section, nous arrivons à une pièce de Man Ray (Boîte d’allumettes fermée, vers 1960) qui nous intrigue beaucoup. À la fin de sa vie, quand il habitait rue Férou, Man Ray rangeait tous les objets de petite taille dans des boîtes d’allumettes qui étaient marquées. Il décorait ces boîtes d’allumettes avec ses propres photographies. Ici c’est un fameux portrait de Miro où le voit poser avec des ficelles sur le côté. La boîte contient des clés. C’est cette métaphore qui nous intéressait : la photographie est aussi une clé qui permet d’ouvrir des serrures ou de comprendre le monde.
La dernière section de l’exposition, “Des vérifications”, contient une œuvre d’Ugo Mulas (Le Verifiche, 1968-1972), qui lui donne son titre. C’est une série de 12 pièces qui est une sorte d’œuvre programmatique réalisée par Mulas à la fin de sa vie. Quelques années avant sa mort, il a ce besoin urgent de se consacrer à une exploration du medium. Il se pose la question : « Qu’est-ce que la photographie ? » de diverses manières : est-ce que c’est le film, le portrait, le temps… Il interroge cette pratique, ce métier. C’est presque un résumé, une synthèse du reste de l’exposition. Il y a certaines questions que l’on retrouve comme le cadre, le grain. Cela nous semblait important de montrer cette œuvre, qui est très importante pour l’histoire de la photographie : quelqu’un qui se pose avec beaucoup d’intelligence et de sensibilité cette question.

K. Z.-L. : Cette pièce a un second niveau grâce aux commentaires qu’Ugo Mulas donne à chacune de ses images. Il s’y réfère autant à l’histoire de la photographie qu’à l’histoire de l’art : on y trouve Marcel Duchamp mais aussi Nicéphore Niépce. C’est une réflexion qui est importante, elle arrive plus tôt et de façon plus directe dans cette réalisation pratique que dans les textes ou dans les pratiques institutionnelles.

C. C. : La dernière œuvre, et aussi la plus récente de l’exposition, est de Mishka Henner, et date de 2010. Mishka Henner est un jeune artiste anglais qui a beaucoup travaillé avec les outils d’Internet : il ne produit pas lui-même des images, mais il s’approprie ce qui est sur le net. Il a rentré dans un moteur de recherche le segment de phrase “photography is” et en a retiré les milliers de réponses à la question qu’il a trouvées. L’œuvre est emblématique de cette multiplicité de réponses à la question de l’exposition. Nous aurions pu en proposer plus que celles qui sont ici, nous avons parfaitement conscience que cette exposition est parcellaire et qu’il y a des milliers, voir des millions de réponses à cette question : Qu’est ce que la photographie ?

EXPOSITION
Qu’est ce que la photographie ?
Jusqu’au 1er juin 2015
Centre Pompidou
Galerie de photographies
Place Georges-Pompidou
75004 Paris
France

www.centrepompidou.fr

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