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Anvers : The Continuity of Man, portrait de la Méditerranée, de Nick Hannes, au FoMu

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Riche en histoire, la Méditerranée est la destination touristique la plus populaire au monde. Mais ses rivages sont aussi la proie des promoteurs, le théâtre de beaucoup de combats et le lieu où atterrissent les immigrés désespérés originaires d’Afrique et d’Asie.
L’exposition Mediterranean,The Continuity of Man, actuellement au FoMu, est le résultat du périple de Nick Hannes autour de la Méditerranée pendant cinq ans pour en saisir les divers enjeux contemporains : tourisme, urbanisation, migrations, crises, conflits.

ODLP : Comment est née l’idée de ton périple autour de la Méditerranée ?
Nick Hannes : J’ai été fasciné par la région, son histoire, sa réputation en tant que berceau de la civilisation, sa position géographique au carrefour de trois continents. En plus, c’est une mer que nous connaissons bien, puisque nous l’étudions dans les cours d’histoire et géographie à l’école et que nous y passons nos vacances. C’est un lieu que je comprends, que je sens. Ce qui me permet de commenter visuellement ce qui se passe là-bas. En outre, la région est pleine de failles (nord-sud, est-ouest, judéo/arabo- chrétiennes, riches et pauvres, etc.), ce qui est intéressant pour un photographe parce que cela enrichit visuellement son sujet.

Qu’essaies-tu de transmettre ? Est-ce qu’il y a un côté militant, un appel aux consciences ?
J’essaie de faire des images “multicouches”, qui provoquent des questions plutôt que donner des réponses. Je confronte des réalités parallèles, je rassemble des mondes différents d’une manière subtile qui laisse place à l’interprétation. Évidemment, il y a une critique dans mon travail. Chacun peut se demander si The Continuity of Man, La Continuité de l’homme, est en fait une chose positive. Nous butons contre les limites sociales et écologiques de notre planète, et peu de gens semblent s’en soucier, et surtout pas ceux au pouvoir.

Quel constat tires-tu de tout ce que tu as vu ? Si tu devais malgré tout trouver un message positif, lequel serait-ce ?
A un niveau supérieur, il n’y a pas beaucoup de choses positives qui se passent. Les choses positives sont à un niveau plus élémentaire et personnel, entre les gens. Les êtres humains, où qu’ils vivent, peu importe à quoi ils croient, ont plus en commun que nous le pensons.

Comment es-tu “tombé” sur ces scènes fortes ? Tu as rencontré des tas de gens, tu as eu des fixeurs, tu t’es juste promené partout longtemps ?
Je n’utilise pas de fixeurs, sauf dans les pays dangereux comme la Libye. Je dois être seul quand je prends mes photos, car il m’est impossible d’être visuellement 100% concentré lorsque quelqu’un marche à côté de moi et me parle. Je marche et je me promène du matin au soir, seul, en essayant de trouver des situations qui sont différentes de ce que j’ai déjà vu. C’est très fatigant de chasser quelque chose sans savoir vraiment ce que tu es en train de chercher. Il s’agit de coïncidences, de sérendipité et de magie. Il est important de laisser place à l’improvisation et de ne pas planifier longtemps à l’avance. Gardez les yeux et les oreilles ouverts, tout le temps.

Chacune des situations de tes photos est forte. Parfois presque caricaturale, à la Martin Parr. C’est pour mieux appuyer ces décalages ?
Il n’y a pas tellement de photos caricaturales. The Continuity of Man est en fait un sujet très grave, soulignant les problèmes cruciaux tels l’impact du tourisme de masse sur le paysage, la migration et comment l’Europe forteresse tente de garder en dehors les conflits (Chypre, Gaza, Libye, le printemps arabe), la crise… Je pense qu’il y a une grande différence avec le travail de Martin Parr, que j’aime beaucoup par ailleurs. Son travail est souvent drôle et parfois ridicule. Je ne considère pas que mon travail soit drôle. Beaucoup de mes photos montrent ​​la manière dont nous traitons notre environnement. Pour cela, je photographie souvent de loin. Les émotions individuelles ne sont pas importantes. Et je ne fais pas de gros plans. Je veux l’horizon dans mes images .

Quel matériel utilises-tu ?

Je ne vais pas répondre à cette question, parce que le type d’appareil que j’utilise n’est pas important. Ce que je fais avec cet appareil est important.

Quelle est pour toi la différence entre le reportage et le documentaire–photojournalisme versus exposition ?
La photographie documentaire va plus loin, elle est plus personnelle, subjective et intemporelle. Le photojournalisme est souvent illustratif et plus instantané. Un photographe documentaire a plus de temps pour penser et repenser à ce qu’il veut dire, et comment il va le montrer. Alors que le photojournaliste doit être rapide pour être au bon moment et à la bonne place pour ne pas manquer l’événement. Les deux genres ont leurs défis spécifiques.

Tu enseignes la photo à l’Académie de Gand. Quelle valeur essentielle essaies-tu de communiquer à tes étudiants ?
Le plus important est votre motivation. Pour être pertinent vous devez travailler dur et aller jusqu’au bout des choses. Ne pas arrêter de travailler, même si vous pensez que c’est déjà presque ok, on peut toujours s’améliorer. Arrêtez-vous lorsque vous devez vous arrêter, à cause du timing ou autre chose. En plus, choisissez un sujet qui vous motive et qui vous intéresse. Informez-vous, lisez des articles et livres sur le sujet. Et surtout: ne vous perdez pas seulement dans les commandes. Essayez de faire un travail personnel, essayez d’être un auteur et pas seulement l’exécutant des idées de quelqu’un d’autre.

Quelles sont tes influences, qu’est-ce qui te nourrit en littérature, en philosophie, en photographie ?
J’aime le travail de photographes comme Mitch Epstein , Nadav Kander, Carl De Keyzer, Sara Pickering, Simon Norfolk, Stephen Shore, Ed Van der Elsken. J’aime regarder les films de Jacques Tati, Werner Herzog, et les vieux Italiens tels Fellini et Antonioni. La philosophe Lieven De Cauter a écrit un livre, La société capsulaire, qui m’a beaucoup inspiré lors de The Continuity of Man. Il y aussi les livres d’Alessandro Baricco, de W. G. Sebald, d’Italo Calvino, d’Orhan Pamuk quand je voyage.

Quel est ton prochain voyage, quel nouveau documentaire prépares-tu ?
Je vais retourner vers l’est de la Turquie, mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant…

 

EXPOSITION
Mediterranean, the Continuity of Man, de Nick Hannes
Jusqu’au 1er février 2015
FoMu (FotoMuseum Provincie Antwerpen)
Waalsekaai 47
2000 Antwerpen
Belgique

www.continuityofman.com
www.fotomuseum.be/fr
www.nickhannes.be

LIVRE

Mediterranean, the Continuity of Man, de Nick Hannes
Editions Hannibal Veurne

www.uitgeverijkannibaal.be

 

 

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