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40 ans de photojournalisme, Génération agences, par Michel Setboun et Marie Cousin #15

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Cette image est extraite du troisième livre de Michel Setboun et Marie Cousin sur les agences. Le livre est intitulé 40 ans de photojournalisme, génération agences. Quatre-vingts photoreporters ont choisi et commentent une image emblématique de leur parcours. L’image que nous publions aujourd’hui est une photographie réalisée par Alain Bizos.

Je me présente comme “artiste photoreporter”. Photographe, plasticien de fait. Je suis d’abord l’assistant du sculpteur Arman à partir de 1969. Quand je me lance dans le reportage au début des années 1980, j’ai la volonté de sortir des clichés “paris-matchesques”. À ma première expo photo à Paris en 1981, des photographes de Magnum se moquent même de moi parce que j’utilise le flash en plein jour. Mais ça ne me gêne pas. J’ai adoré toutes les facettes de mon métier, y compris ma période avec Actuel. Jean-François Bizot, le fondateur, voulait un photographe avec un regard décalé. Il connaissait mon travail sur la couleur. Alors, entre deux portraits de musiciens et de scientifiques, j’enchaînais les zones de guerre : Afghanistan, Iran, Liban… Je pars en Érythrée en 1982. Comme d’habitude, je ne m’encombre pas avec trop de films. Je préfère tirer peu de photos, mais prendre le temps de réfléchir avant de “déclencher”.
Le temps d’apprivoiser le cadrage, la lumière. Parfois même, je demande à mes sujets de poser. Pas cette fois. C’est une alerte au gaz moutarde. Les soldats ont fabriqué des masques de fortune. Ils les enfilent à la hâte. Moi, je n’ai rien pour me protéger. Tout juste une petite seringue d’atropine en cas d’inhalation. L’Érythrée a été, de loin, mon reportage le plus dur. C’est une guerre de tranchées, des bombardements non-stop. Je suis seul avec un médecin de MSF, qui quitte très vite les lieux. Et pour cause. On voyage principalement de nuit pour ne pas se faire repérer. Cette guerre, c’est 14-18 ! La moindre erreur peut être fatale. Un jour, j’enlève ma veste à cause de la chaleur. Je me retrouve en tee-shirt blanc, visible de loin. Une erreur de débutant. Aussitôôt un MIG russe nous localise et nous bombarde sans relâche… Mon sac est truffé d’éclats. En y repensant les jours suivants, j’ai des frayeurs nocturnes.
En 1991, j’arrête de couvrir les guerres. Mon ami Jean Hatzfeld est grièvement blessé en couvrant les conflits à Sarajevo, ma fille est née et je veux la voir grandir…

Propos recueillis par David de Araujo

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