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Oliviero Toscani – Cretto Di Burri – Éditions Louis Vuitton – Paris Photo 2018

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Les Éditions Louis Vuitton donnent à voir une dimension étonnante du travail d’Oliviero Toscani. Loin des campagnes publicitaires, le livre retrace l’affrontement entre sa photographie et le paysage façonné par Alberto Burri, Cretto.

De l’utilisation de l’image comme médium choquant, de l’affrontement entre les conventions et ses mises en scène provocantes, de l’exploitation des médias comme plateforme d’exposition, il ne sera dit mot ici.

Cretto di Burri symboliseplutôt une confrontation, un duel amoureux entre le paysage façonné par Burri et la photographie en mouvement. Sa photographie se rapproche du minimalisme traversant les oeuvres de Burri des années 1970. Toscani se penche sur les couloirs, les réseaux de lignes, les tournants, arrondis et textures de l’œuvre d’Alberto Burri.

Le photographe adhère ainsi à l’ensemble cohérent de l’œuvre (de grandes travées blanches formant un parcours) tout en jouant avec ses composantes (craquelures du temps, jeux d’ombres, poussières d’oxyde de zinc, épaisseurs de la peinture). Dans cette partie de la série, Toscani oscille entre poésie et documentation. Il montre avec simplicité le potentiel géométrique que la photographie offre à qui sait jouer d’une œuvre et rappelle la fascination des œuvres simples, épurées, telles la Spiral Jettyde Robert Smithsonou la série To the islands d’Agnès Martin.

Mais ce minimalisme trouvé dans des jeux de forme disparaît avec le mouvement. Toscani impose à sa caméra de la vitesse. Ses œuvres se floutent, il semble courir, gesticuler, comme pour briser l’immobilité statiques des crevasses de Burri.

L’écrivain Alain-Paul Mallard, auteur d’une enquête fouillée et surprenante à la fin du livre, ressent les mêmes impressions. « Après une journée passée à l’explorer, à essayer de le ressentir, je me dis que le Crettone vise pas à représenter la tragédie, mais plutôt à l’annule, à immobiliser son souvenir. Que cet ensemble de craquelures renvoie à la terre qui a tremblé est plus qu’eun évidence. Mais seulement pour l’intellect. »

L’agitation du photographe provient, supposons-le, de cet écueil entre l’histoire porté par le lieu – détruit par le séisme de janvier 1968 en Sicile puis reconstruit en 2005 – et son expérience physique. Toscani est ainsi, il a besoin de saisir l’œuvre à l’envers, de la parcourir à contre-courant, de la renverser, de troubler son immobilité.

Avec la vitesse, Toscani retrouve la mémoire fantomatique des ruines. Avec le flou, l’agitation du tremblement de terre et sa surprenante violence. En l’étudiant de près, Alain-Paul Mallard note : « il arme, il vise, il déclenche » et Toscani éructe : « Le Cretto di Burri est un châtiment infligé à la nature. […] Il faut nous protéger d’elle ! Il faut la dompter ! La Nature, qu’est-ce qu’elle vous offre, la Nature ? Un tremblement de terre ! »

Arthur Dayras

 

https://fr.louisvuitton.com

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