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NFT … Inquiétudes !

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Chronique Mensuelle de Thierry Maindrault

Je vais partager aujourd’hui avec vous les dernières aventures des NFT. Ce nouveau serpent de mer qui nous vient des sombres abysses pour faire surface, par intermittences, sous la lumière des médias.

Petit rafraîchissement de nos mémoires. Un NFT (« Non Fungible Token » ou jeton non fongible) est un titre de propriété numérique unique, qui est créé par une blockchain (principalement Ethereum), et indissociable à un actif numérique (photo, vidéo, etc.). Dans le principe, cette clé absolument unique est impossible à reproduire, elle est utilisée pour l’émission de crypto-monnaie et pour permettre des transferts pour des œuvres artistiques numérisées et dématérialisées.

Je vais essayer d’être plus concret et assez imagé dans ma simplification. Tu es photographe et tu regrettes amèrement que les clients (amateurs avisés) ne se précipitent pas, ou plus, dans ton studio-galerie pour s’esbaudir et pour acquérir moult de tes œuvres impérissables. Pour rester dans l’air du temps, ton copain informaticien te rassure avec son plein de solutions magiques à toutes sortes de préoccupations. Il va te mettre en relation, directement ou avec des intermédiaires ayant une grande et longue expérience de quelques mois, voire quelques semaines. Ce petit marathon arrive à un spécialiste, dit « fondeur », qui pour quelques menues monnaies (attention prévoir souvent l’obligation de passer par une crypto-monnaie). Ce dernier va identifier définitivement votre œuvre numérique. Un code – ultraconfidentiel – est incorporé dans la structure de votre œuvre-fichier-numérique. La vente de votre photographie se fait par transfert de ce code variable qui atteste de la propriété enregistrée de l’image. Comme exposé dans une précédente chronique, vous cédez votre réalisation – en principe inoubliable- à un tiers contre bitcoins, ethers ou l’une des milliers de crypto-monnaies (des centaines fleurissent chaque jour comme pissenlits au printemps). N’allez pas vous gausser d’avoir trouvé un admirateur de vos talents. Votre acquéreur est un petit malin qui a déjà remis en vente son nouveau bien immatériel, avec une plus-value substantielle, pour un légèrement moins malin qui refait la même opération et ainsi de suite. Comme il est de notoriété publique que tous les combats cessent faute de combattants, lorsque votre œuvre arrive au pas malin du tout, plus personne n’en veut (le prix est devenu trop élevé pour espérer rendre un rendement financier attractif). Le malheureux, dernier de la liste, se retrouve seul propriétaire de votre image qui dans le même temps continue de cavaler sur tous vos réseaux sociaux et sur ceux des quidams qui le souhaitent. Tout va bien sauf pour le dernier de la liste : notre pigeon devenu collectionneur de vent malgré lui et pas toujours flatté de s’être fait financièrement plumer (ainsi va la spéculation !). Toutefois, tout reste juridiquement légal. La morale n’a jamais eu sa place dans les mondes financiers, qu’ils soient fictifs ou matérialisés.

Le problème surgit lorsque le bien, fut-il fantomatique, disparaît. Imaginez un actif (au sens financier évidement) dont la matérialité n’existe pas qui se volatilise. Rien s’évapore pour être remplacé par rien. Nos grands génies de l’informatique ont réussi cet exploit, inimaginable même par Houdini et ses confrères.

Un petit gars qui s’y connaît un peu, ingénieur chez Solana (blockchain) nous informe : « Les NFT hébergés sur la plate-forme FTX sont désormais corrompus et invisibles ». Qu’en est-il de leur valeur ? Lors de la faillite du 11 novembre 2022 de FTX, le monde, stupéfait (sic), découvrait que FTX vendait, à ses clients naïfs, de faux bitcoins et aussi que ses procédures utilisées pour la gestion des NFT n’étaient pas vraiment fiables et exemplaires. Nombre de spécialistes se penchent sur le problème. Car s’il semble que les NFT existent encore, bien que les images ne soient – à ce jour – plus visibles. Les propriétaires possèdent des NFT aux métadonnées corrompues alors que vous avez compris que ces dernières sont la composante indispensable et essentielle d’un NFT.

Des milliers de professeurs « Nimbus » du numérique, tant du côté obscur de la force que chez les bons Samaritains, se penchent sur la possibilité de recouvrir les propriétés attachées aux fichiers. Ils tentent la régénération de ces fameuses informations qui à l’origine étaient certifiées comme totalement inviolables, jusqu’au prochain chapitre de cette passionnante saga.

Au passage se pose la question des responsabilités de cette brillante chaîne d’intervenants qui ne fera sûrement plus bloc dans les méandres de la Justice. Notre pauvre photographe, en mal de reconnaissance financière, risque de se retrouver aux premières loges si l’un des heureux ex-propriétaires de ses œuvres dépose une plainte pour défaut (par vice caché par exemple) d’accès à sa propriété immatérielle. En effet, c’est bien l’auteur à l’origine du fichier numérique et de sa mise sous protection inviolable le responsable du dol. Les acheteurs, même successifs, n’ont fait que transmettre le trésor photographique. Comme répétait assez souvent mon grand aïeul : « avant de perdre ta main, méfie-toi des mécanismes inconnus ».

Finalement, tout cela n’est pas très grave, puisque la plupart des NFT ont été payés en crypto-monnaies. Si les propriétaires n’avaient pas vu leurs œuvres d’art exceptionnelles partir pour un paradis numérique, il y a de très forte chance que cela aurait été le cas de leur magot numérique fictif, au sens des jeux d’écritures virtuelles. En matière de jeux de toutes sortes, le joueur est rarement gagnant.

La photographie est à la première loge dans ce nouvel aléa mortifère de la communication numérique. Cela n’a rien d’étonnant, car ses vrais adeptes ont tellement besoin d’une oasis dans leur traversée du désert ; mais, se n’est pas une raison pour ignorer la mystification des mirages.

Thierry Maindrault, 13 janvier 2023

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