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Mort de Horacio Coppola

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« Les yeux du XXe siècle », selon la presse de son pays

Le photographe argentin Horacio Coppola, un ancien du Bauhaus, l’école d’art devenue un mouvement artistique majeur du XXe siècle, est décédé lundi à l’âge de 105 ans à Buenos Aires, sa ville natale.
Dès 1930, une de ses oeuvres orne un recueil de son célèbre compatriote Jorge Luis Borges. Il réalise aussi pour les Cahiers d’art, à partir des collections du Louvre et du British Museum, L’art de la Mésopotamie.
Marié à la photographe allemande Grete Stern, il s’emploie tout comme elle à renouveler le regard dans les arts plastiques. Stern travaille à cette époque avec Ellen Auerbach au studio Ringl + Pit, où l’on explore notamment le photomontage. Coppola rencontre Stern à Weimar, lors d’études au Bauhaus.
À Berlin en 1933, alors qu’Hitler accède au pouvoir, il réalise le film Traum (Rêve, en 16 mm) avec Walter Auerbach. Il visite la Suisse, de même que Vienne, Budapest et Prague. Il séjourne en 1934 et 1935 à Londres, où il tourne en 16 mm Un dimanche à Hampstead Heath, et à Paris, où il réalise des portraits devenus classiques des peintres Marc Chagall et Joan Miró. À Paris, il fait aussi la connaissance de l’historien de l’art Elie Faure de même que de l’architecte Le Corbusier.
Fasciné par la photographie depuis son plus jeune âge, il acquiert en Europe un petit appareil Leica modèle III dont il ne se séparera plus. Il a appris très tôt les techniques de la photographie. Dès 1924, il reconnaît Nadar, Edward Weston et David Hill comme ses mentors. Cependant, il va perfectionner son savoir dans le cadre artistique particulièrement stimulant du Bauhaus. Son regard sur le réel s’étoffe surtout alors au contact d’artistes de l’avant-garde.
Fuyant l’Europe où flotte déjà un parfum de guerre, Stern et Coppola installent leur studio de photographie publicitaire en Argentine. Coppola s’y fait un nom avec le livre Buenos Aires 1936. Tous les deux fortement influencés par l’esthétique du Bauhaus et de rapports avec le photographe et professeur Walter Peterhans, ils incorporent dans leur sens du cadrage et de l’éclairage un rapport nouveau à la photographie. Ce qui les conduit à être reconnus comme les références de la photographie moderne en Argentine. Les images de Buenos Aires que produit Coppola deviendront exemplaires de son travail.
Il consacre des ouvrages aux céramiques précolombiennes du Pérou et aux sculptures de Rodin. Au Brésil, il photographie le travail du sculpteur et architecte Antonio Francisco Lisboa. Après la guerre, il retournera en Europe où il photographie désormais avec une chambre photographie grand format.
Avec Grete Stern, Annemarie Heinrich, également née en Allemagne, Anatole Saderman, né en Russie, et Juan di Sandro, né en Italie, Coppola fera partie du cercle restreint des grands photographes argentins de l’avant-guerre. Le groupe Imagema profite de l’apport de sang neuf dans la mesure où, jusqu’aux années 1950, l’Argentine voit l’arrivée de plusieurs photographes européens qui imposent une nouvelle vision de cet art et contribuent ainsi à situer la photographie argentine au sein de l’histoire de l’art. Coppola est le seul de ce groupe qui soit né en Argentine.
À la fin des années 1950, il se remarie puis s’intéresse à la photographie couleur avant de tomber dans un oubli relatif, même s’il enseigne et que son travail fait l’objet d’expositions. Plusieurs livres paraissent en collaboration avec son épouse Raquel Palomeque.
Né à Buenos Aires en 1906 dans une famille d’immigrés aisés, Horacio Coppola est élevé dans un milieu épris de musique, de littérature et de philosophie. En 1929, à 23 ans, il fonde le premier ciné-club de Buenos Aires. Coppola se fait remarquer avec une série de photographies consacrées à Buenos Aires qui allait illustrer ensuite la première édition de l’ouvrage Evaristo Carriego de son célèbre compatriote Jorge Luis Borges.
Redécouverte à partir des années 1980, son oeuvre fait l’objet d’ouvrages et d’expositions à un rythme accéléré depuis. Il a obtenu le grand prix du Fondo National de las Artes en 1985. Le grand quotidien argentin La Nación, dans son édition de ce mardi, dit adieu à rien de moins qu' » aux yeux du XXe siècle « .

Jean-François Nadeau

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