Le roman algérien de Katia Kameli
L’artiste joue avec les images de son pays pour éveiller les consciences autour de la mémoire et de l’identité algérienne. Un travail à voir au Centre Régional de la Photographie Hauts-de-France à Douchy-les-Mines.
C’est l’histoire d’un kiosque à Alger que tout le monde connaît. Ce kiosque vend des cartes postales et des photographies anciennes : la ville pendant la colonisation, les différents chefs d’Etat qui se sont succédés à la tête du pays, les traditions qui datent parfois d’avant la période coloniale…Tout un condensé d’histoire de l’Algérie réuni sur un mur au beau milieu de la ville. Katia Kameli a réalisé un film autour de ce kiosque. On y voit les gens acheter ces cartes postales collector tandis que certains sont interviewés et disent à l’artiste ce qu’ils viennent chercher, ce qu’ils trouvent avec ces images : nostalgie, mémoire collective, morceau d’histoire qu’ils veulent garder quelque part…L’historienne de l’image Marie-José Mondzain, dans un autre film, analyse les images de ce kiosque filmé par l’artiste et donne une merveilleuse réflexion sur cette étonnante tentative de faire l’histoire.
Patchwork
Si Katia Kameli a vu dans ce kiosque une formidable façon d’interroger la mémoire de son pays, pour aller plus loin, elle a elle-même collecté des cartes postales et en a fait d’étonnants tableaux. Elle a, pour cela, réuni divers images sur la couverture d’un livre d’histoire algérien – livre qui passe sous silence un grand nombre de faits historiques – et compose une sorte de patchwork de couleurs et de formes variées pour livrer une sorte de regard sur l’identité et la mémoire algérienne. A côté, elle a conçu une installation sur une image : la photographie d’un monument à Alger. Ce monument a été transformé en 1978 et, au lieu de raser l’ancien pour placer le nouveau, l’architecte a décidé de le cacher sous un coffrage. Ainsi, Katia Kameli a fabriqué un faux coffrage qui s’ouvre et nous livre des cartes postales de l’ancien monument. Une manière de voir un morceau d’histoire enseveli dans l’oubli et contre lequel l’artiste a décidé de mener une guerre.
Jean-Baptiste Gauvin
Katia Kameli – À l’Ombre de l’Étoile et du Croissant
22 septembre – 25 novembre 2018
CRP/ Centre régional de la photographie
Galerie de l’ancienne poste
Place des Nations
59282 Douchy-les-Mines / France
