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Hommage à Xavier Barral

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Il avait un air débonnaire, avec ses lunettes rondes et son esprit futé, toujours à l’affût des nouveautés, de ce qui pouvait l’enchanter ou le troubler, et le décider d’en faire un livre. Avec lui, les projets ne manquaient pas. Récemment, il avait par exemple accompagné le photographe Alain Willaume dans une saisissante monographie, Coordonnées 72/18. Ce dernier était, on le comprend, absolument ravi de travailler avec un homme au regard si juste et si doué sur les choses, qui savait donner corps à un ouvrage et en faisait plus qu’un livre, un véritable objet d’art jalonné de tirages éblouissants et de papiers soigneusement choisis. Xavier Barral avait un savoir-faire édifiant qui l’a conduit à devenir une référence dans le monde de l’édition, un aster incontournable dans la panoplie des livres dédiés à la photographie. Pour ne citer que quelques exemples, il avait récemment publié le magnifique travail de Matthias Bruggmann sur la guerre en Syrie et celui, non moins intéressant, de Mathieu Pernot sur la prison de la Santé à Paris. Engagé, il l’était, sur tous ces sujets et vous regardait d’un air inquiet et contrarié quand il vous en parlait, soucieux d’être compris et notamment sur l’intérêt qu’il y avait de défendre ces travaux. On se souviendra aussi d’une myriade de magnifiques ouvrages, comme celui qu’il a consacré récemment au photographe japonais Masahisa Fukase ou bien le catalogue de l’exposition « Images à charge » au BAL, réflexion passionnante sur la preuve par l’image et sa force de frappe, ou encore le livre sublime dédié au travail du pasteur Martin Gusinde en Terre de Feu que Xavier Barral a redécouvert au Chili avant de retrouver la trace des négatifs en Allemagne. L’éditeur ne se contentait pas de créer des livres somptueux, il avait aussi le regard d’un critique et d’un commissaire d’exposition, rôle qu’il jouera plusieurs fois et notamment récemment à la Fondation Cartier pour une exposition consacrée à la photographie et l’automobile, ou, encore plus récemment, pour une exposition des photographies de son ami Patrick Gries qui a fixé dans d’élégants clichés en noir-et-blanc les squelettes d’une palette immense d’animaux, sujet qui fascinait Xavier Barral. Avec sa disparition brutale, le monde de la photographie perd un oeil magnifique, sensible, curieux et complice, un oeil qui savait choisir avec soin et donner à voir comme il faut, un oeil de photographe et d’esthète, un oeil qui manquera.

Jean-Baptiste Gauvin

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