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Best Of 2018 – Hommage à Jean-Luc Monterosso

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Le départ du fondateur et directeur historique de la Maison Européenne de la Photographie, qui laisse sa place à l’anglais Simon Baker, annonce une nouvelle ère au sein de l’institution parisienne. L’Œil de la photographie lui rend hommage au travers de belles anecdotes.

Le 31 mars, Jean-Luc Monterosso a quitté la MEP. Il n’y reviendra que pour les conseils d’administration et Simon Baker, son successeur, est désormais en place. Souvenirs, souvenirs : il y a quarante ans exactement, je rencontrais Jean-Luc pour la première fois et nous eûmes au début avec lui et Photo, le magazine dont je m’occupais, quelques jolies aventures ensemble !

En 1978, c’est à Orsay, pour sa première exposition, intitulée 20 fois Paris. Deux ans plus tard, avec son complice de toujours Joël Brard, qui fut l’âme de novembre, il lance le premier Mois de la Photographie. Bernadette Contensou, la directrice du Musée d’Art Moderne de Paris, lui offre alors deux espaces fabuleux. Il donne le premier à Cartier-Bresson et propose le second à Photo. Nous y exposerons notre premier concours amateur avec 100 photos en grand format. L’exposition gratuite fait un triomphe. La dernière nuit, un nu sublime est volé. Son auteur en est fou de bonheur. C’est Philippe Garner le commissaire-priseur, celui qui officiera notamment chez Sotheby’s et Christie’s durant quarante-cinq ans.

Quelques mois plus tard, nous nous retrouvons à New York. Jean-Luc me présente deux personnes : Bernard Pierre Wolf, formidable photographe de rue qui sera l’une des premières victimes du sida, et Sophie Elbaz une jeune photographe alors assistante d’Ernestine Ruben, avec qui Jean-Luc a une histoire d’amour passionnée. Toutes les nuits, le Roxy, la boite de nuit mythique de l’époque sera le témoin de leurs ébats.

En 1982, Jean-Luc partagera notre passion pour Helmut Newton et organisera au Musée d’Art Moderne sa première grande rétrospective. En 1984, Guy Bourdin vient de rompre avec Vogue. Avec Jean-Luc, nous décidons de lui faire attribuer le Grand Prix National de la Photographie doté d’un montant de 100 000 francs. Nous créons un jury totalement favorable à Guy a l’exception d’un notoire anti Bourdin qui découvrira dès le premier tour l’absence totale de ses chances et s’en ira se plaindre dans tout Paris. Le chèque est envoyé à Guy. Il nous le retourne dès sa réception avec ces mots : « Merci de cette jolie viennoiserie, mais je suis diabétique ».

Par contre, nous réussirons, Jean-Luc et moi, notre deuxième tentative d’aide, cette fois ci pour Romeo Martinez, le mythique éditeur du magazine Camera et notre mentor à tous. Son antre du 21 rue de Seine, à Paris, qui a vu défiler tous les photographes au monde va être mis en vente et Romeo n’a pas le premier sou pour l’acheter. La mobilisation va être formidable. Jean-Luc achète sa bibliothèque pour la Maison Européenne qu’il est en train de concevoir et Sotheby’s, par l’intermédiaire de Philippe Garner, organise la vente de sa collection. Romeo restera jusqu’à sa mort dans son endroit mythique qui lui appartient désormais.

En 1987, avec Eric Colmet-Daâge, le directeur artistique de Photo, nous organisons grâce à Jean-Luc, qui intervient auprès de Françoise de Panafieu, une exposition à Bagatelle intitulée Jardins secrets de photographes. C’est une provocation gigantesque : pas une seule photo, mais des peintures, sculptures, dessins, collages donnés par Cartier-Bresson, Bailey, Donovan, Lartigue, Brassai, Mapplethorpe… Jean Luc vient lors du montage, accompagné de Keichi Tahara. « Je fais des installations de sable, puis-je en réaliser une pour vous ? », dit l’artiste. C’est ainsi qu’il créera la pré-installation de ce qu’il installera dix ans plus tard devant la MEP.

La dernière complicité, c’est avec Roger Thérond, l’œil de Paris Match et l’un des plus grands collectionneurs contemporains qu’il l’a vivra, quand il lui confiera, quelques mois avant sa mort toute la MEP pour son exposition Une passion française.

Voilà quelques souvenirs d’une très jolie époque. Jean-Luc va ouvrir en région Champagne un centre d’art contemporain. Il ne veut pas s’arrêter, il ne le peut pas d’ailleurs. C’est la voyante Madame Alberte qui lui a dit quand il était gamin : « Vous aurez une vie fabuleuse, vous voyagerez énormément. Pourquoi ? Je ne sais exactement. Je vois plein de carrés et de rectangles de papier ! »

Je vous embrasse Jean Luc.

Jean-Jacques Naudet

 

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