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Clark et Pougnaud : Le Secret

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La Galerie Photo12 expose au public Le Secret, la nouvelle série du couple d’artistes Clark et Pougnaud. Les images de cette série sont pensées comme des scènes de théâtre, sur lesquelles le rideau vient de se retirer. Les lieux irréels et mystérieux relèvent plus de l’évocation que de la représentation ; les personnages féminins, pensifs, aux visages immobiles évoluent dans leur monde intérieur.

Au travers de cette nouvelle série, les artistes invitent le spectateur à imaginer et à se projeter dans l’invisible : au dos de chaque photographie se cache une seconde, intime, porteuse d’un secret. Un « secret » tenu entre les artistes, les modèles et qui se révèlera aux seuls yeux du collectionneur.

La Maison de la Photographie à Lille expose également le duo d’artistes du 29 octobre au 29 novembre 2015.

Entretien avec les deux artistes

Nous vivons aujourd’hui dans une surabondance d’images. Comment avez-vous eu l’idée de cette série où l’image, à l’inverse, en cache une autre et se soustrait à l’oeil du spectateur ?

D’une manière générale, nous essayons de lutter contre cette tendance de production massive d’images, en privilégiant la lenteur et la rareté. C’est pourquoi nous réalisons une série tous les deux ans, pratiquement. Il est plus difficile d’en faire moins, que d’en faire plus.

Pouvant accéder à toutes les images, les gens ont tendance à en vouloir toujours plus et à aller chercher au-delà de ce qui est montré, sans prendre le temps de regarder ce qui est juste sous leurs yeux. Ils veulent voir ce qu’il y a avant et ce qu’il y a après, en oubliant l’instant présent.

Dans une société bombardée d’images de toutes sortes et régie par la vitesse et l’immédiateté, nous proposons ainsi, avec notre travail, un courant inverse, une suspension du temps. Laquelle est indispensable pour stimuler l’imaginaire et l’envie du spectateur. Pour Le Secret, nous voulons faire en sorte qu’il se questionne plus longuement sur l’image visible et se demande au-delà : « À quoi peut bien ressembler celle qui m’est cachée ? ».

De chacune de vos photographies émane une forme de « sacré », comme un éloge au silence ou à la solitude….

Les modèles que nous choisissons ont en elles quelque chose de sacré. Elles sont lumineuses de l’intérieur. C’est ce silence de l’intériorité que nous essayons de capturer. La pudeur du modèle mêlée à notre concentration font de la prise de vue un moment extrêmement solennel. Les modèles – qui ne sont pas des mannequins, apportent ainsi avec elles cette sincérité naturelle. Elles se positionnent devant l’objectif comme devant un miroir, face à elles-mêmes, en elles-mêmes, isolées par la distance qui les sépare de nous.

Vos modèles sont des femmes, pourquoi cet attachement exclusif à la féminité ?

Nous aimons photographier les femmes car, malgré la solennité précédemment évoquée, celles-ci portent en elles une légèreté, une sensibilité que nous n’arrivons pas à saisir chez les hommes. L’homme est plus sérieux, presque sous contrôle. Nous avons besoin au contraire que les modèles se livrent, s’offrent à nous et nous surprennent constamment.

Pouvez-vous nous mettre dans la confidence d’une prise de vue ?

La prise de vue pour la première scène est assez directive, car nous savons à l’avance par la réalisation de la maquette, l’univers dans lequel nous souhaitons plonger les femmes. Les décors et les éclairages leur sont révélés en amont et parfois les modèles elles-mêmes nous proposent des accessoires : un ballon, un violoncelle, un chapeau…. Alors que pour la seconde prise de vue, le modèle nous donne ce qu’elle est, ce qu’elle veut, ce qu’elle peut.

Les modèles, en posant pour la première photographie, pensent à celle qui va suivre, ce qui influence particulièrement leurs attitudes. Il est étonnant de constater que les deux images communiquent.

Nous avons réalisé cette série avec lenteur et patience, sans jamais brusquer les modèles. Cette série a créé un sentiment que nous n’avions pas appréhendé au départ : s’est instaurée entre elles et nous, une sorte de connivence que nous n’avions encore jamais ressentie.

Vos oeuvres, composites, sont pensées comme des scènes de théâtre, avec un décor, des éclairages et un personnage. Vous aimez créer l’illusion…

Tout notre travail s’inscrit dans un paradoxe, conjuguant l’ultra réalisme des personnages et la fiction créée par les décors. Nous souhaitons amener les gens dans des petits mondes fantastiques et imaginaires, mais pour autant, nous voulons que les personnages soient les plus naturels possible. Ils sont totalement eux, dans un décor qui est faux. Les deux niveaux se brouillent et recréent une réalité nouvelle, autre…

Nous laissons beaucoup de petits détails, qu’il serait aujourd’hui très facile de gommer ou « photoshoper », mais c’est le réel et le naturel de leurs perceptions qui nous intéressent avant tout. Nos photographies sont sérieuses mais l’humour réside dans ce décalage entre les décors en carton et le réalisme des modèles. En prônant le naturel et la sincérité nous avons le sentiment de lutter et de combattre les codes imposés.

En plus du théâtre, vous êtes très influencés par la peinture comme le montre votre série Hommage à Hopper. Dans Le Secret, on perçoit une très grande influence du surréalisme : est-ce un hommage déguisé ou une référence assumée ?

Nous avons toujours baigné dans le milieu artistique, nous aimons ça et cela se ressent. Ce qui nous attire dans le surréalisme, c’est l’absurdité et la légèreté de la vie. Ce mouvement est à la croisée de divers arts, poésie, théâtre, musique, cinéma… C’est une vision totale de l’art à laquelle nous sommes sensibles. Notre pensée est décloisonnée et tout notre travail au sens large est pluridisplinaire, mêlant peinture, théâtre, maquettes…

Dans cette dernière série, nous avons eu envie d’afficher ouvertement l’influence surréaliste, là où précédemment elle pouvait se dérober à la perception…

EXPOSITIONS
The Secret
Clark & Pougnaud
Du 21 Octobre au 28 Novembre, 2015
Galerie Photo12
14 rue des Jardins Saint-Paul
75004 Paris
France
http://www.galerie-photo12.com

Clark & Pougnaud
Du October 29th to November 29th, 2015
Lieu : Maison de la Photographie
28, rue Pierre Legrand
59000 Lille
France
http://maisonphoto.com

Les tirages sont produits par le laboratoire Picto.

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