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Bruno Mouron & Bernard Wis : HCB piégé par les paparazzi

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En 1980, tout jeune photographe à Paris Match, je suis convoqué, avec mon comparse Bernard Wis, par Roger Thérond. Croyant à une remontrance, nous nous traînons penauds dans son bureau ; c’est alors qu’il nous confia en toute confidentialité une mission à laquelle il tenait particulièrement. Ravis de sa confiance, nous acquiesçons sans la moindre discussion.

Cette tâche consistait à suivre et photographier Henri Cartier-Bresson, prendre évidemment les photos à son insu. Nous avions carte blanche.

Ce que je crus très simple s’avéra l’un des plus épuisants reportages que j’eus à faire, car le monsieur galopait tel un jeune homme. Il traversait Paris à grandes enjambées, s’engouffrait dans le métro, en ressortait à la dernière minute, s’arrêtait brusquement scrutant l’environnement à 360° de son œil averti et sans que l’on puisse l’apercevoir, dégainait son Leica à la vitesse d’un cow-boy.

Nous croyant repérés, nous devions prendre mille précautions, ce qui était épuisant après une journée passée derrière ce marathonien.

Le shootant très rapidement, adoptant à sa façon de faire, nous réussîmes à prendre des clichés.

Les images que nous prîmes jour après jour furent satisfaisantes.

Puis un jour, Henri Cartier-Bresson abandonna son Leica pour un grand carton à dessins. Toujours à ses trousses, nous le suivions sur les quais de Seine, en face du musée du Louvre et là, il s’asseyait tranquillement sur un banc, saisissait une feuille de son carton à dessins et commençait à croquer les passants et quelques badauds allongés sur les bords du fleuve.

C’est alors qu’il me vint l’idée d’être le badaud qu’il allait pouvoir dessiner. Profitant des rayons du soleil, j’ôtais ma chemise, m’allongeais torse nu face à lui. J’étais le parfait touriste, mais c’était bien sûr sans oublier mon petit appareil photos camouflé dans un foulard. Face à lui, à moins de 3 mètres, j’attendais le moment opportun pour déclencher, quand soudain, arrivant au loin sur le quai, je vis un énorme chien saint- bernard.

Henri Cartier-Bresson, concentré sur ses croquis, ne le vit pas et, cadré au 1er plan, c’est ce gros chien qui contribua à donner à cette image une telle esthétique.

Les jours suivants, nous poursuivîmes notre longue marche en prenant d’autres clichés de Henri Cartier-Bresson sortant de ses cours de dessin qu’il prenait boulevard Raspail et des photos tendresse avec sa fille.

Alors que nous pensions en avoir terminé, nous montrâmes nos images à Roger Thérond qui nous demanda de continuer. C’est comme cela que, pendant plus d’un mois, je pus photographier Henri Cartier-Bresson à la manière de Henri Cartier-Bresson !

Ces photos ne sont jamais parues mais Roger Thérond fût satisfait de notre travail, ce qui, pour nous, était suffisant.

Bruno Mouron

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