Devant la chapelle du Méjan un arbre, que l’on ne dirait pas en bronze, supporte en équilibre sur ses branches coupées un linteau de pierre gravé qui dialogue avec les linteaux décoratifs que l’on peut apercevoir sur quelques façades environnantes. C’est une création de Guisepe Penone pour Arles 2013.
Au rez-de-chaussée de l’ample chapelle, une manière de rétrospective – qui n’en est pas une mais évoque toutes les étapes du travail – fait dialoguer les travaux photographiques peu connus avec quelques pièces tour à tour sublimes et explicites. Un arbre, coupé en deux mais inversé, occupe le centre de la nef, débarrassé de son aubier, il laisse voir le cœur et les départs des branches, en épineux. Un classique de l’artiste, mais plus troublant que d’autres avec son inversion du mouvement. La découverte, ce sont ces photographies en noir et blanc dans lesquelles le corps de l’artiste et les arbres se trouvent, s’ajustent, se repoussent, se transforment. Une image de 1968, prémisse d’une pièce qui verra plus tard une main en bronze agripper un tronc est particulièrement émouvante et troublante et renvoie à la verticalité d’une radiographie récente – 2010 – dans laquelle la main, encore, occupe une place prépondérante. L’empreinte du corps dans l’amas de feuilles de buis séchées qui parfument l’exposition, le dialogue des pommes de terre avec les photographies qui se souviennent des sculptures que l’artiste, jeune, tailla dans des tubercules, la sculpture en pain et sa photographie puis, dans le cœur, une extraordinaire séquence de mains enserrant la lumière et ses variation quand, au premier plan l’imposante et subtile main de bronze décline un des motifs récurrents de l’œuvre.
On n’avait jamais vues réunies ainsi ces approches photographiques qui culminent dans des séries ou séquences dans la nature ou, définitivement explicite comme métaphore du regard, cet autoportrait aux yeux devenus miroir par le port de lentilles qui tout à la fois réfléchissent le monde et le rendent inaccessible à celui qui regarde.
A l’étage, juste un carnet d’études, deux mains en couleur, une pièce en noir et blanc qui accumule les vues et une extraordinaire pièce en noir, graphique sur toile dont le relief illusoire et la profondeur sont vertigineux, pour dessiner l’élégance d’une branche, complexe, vitale, dans laquelle on chemine et se perd jusqu’à n’en plus finir.
Cette poésie pure, cette confrontation au plus profond de la création fait que l’on sort en se sentant plus disponible, plus heureux sans doute, plus ouvert. Troublé aussi par l’évidence que la beauté est avant tout une cohérence du regard porté sur le monde, avec exigence et modestie, Entre les lignes.
D’autres oeuvres sont présentées au musée Réattu.
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