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Sony World Photo Awards 2023 : Le début du cauchemar

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415.000 photos ou supposées telles ont été reçues pour le Sony World Photo Awards 2023 : parmi les primées, une création par intelligence artificielle !
Sony a essayé d’étouffer l’affaire et la plupart des médias se sont tus.
Pourtant, ce n’est que le début : imaginez demain !
Et lisez le formidable compte rendu de notre collaborateur Thierry Maindrault.
JJN

 

J’étais informé que la triste comédie théâtrale du gamin surprit les doigts dans le pot de confiture se terminerait par un tragique éclat de rire. J’aurais pu dès vendredi dernier vous livrer cette information qui est loin d’avoir fait le tour du Monde ; mais, trois jours de réflexion et les divers avis m’ont semblé importants pour rester dans une actualité qui doit faire réfléchir. Bye Bye fake news prédigérées.

Le SWPA, (abréviation pour les intimes) c’était pour 2023, la réception de 415 000 images photographiques, venues de 200 pays. L’objectif étant de sortir la crème de la crème de la production photographique mondiale, avec prix, expositions et toutes sortes de privilèges médiatiques pour les heureux élus. Ce qui explique la bousculade au portillon.

C’est également un Jury que l’on imagine trié sur le volet avec de la compétence pour les différentes catégories récompensées. Et un super jury pour le choix final de la meilleure photographie mondiale de l’année.

Tout se déroule à la perfection et le Jury de la catégorie création désigne la photographie « electrician » de Boris Eldagsen, comme la meilleure photographie de sa catégorie, partie pour être la meilleure photographie mondiale 2023.

Boris, photographe depuis plus de trente années, chercheur passionné et fort honnête homme, dès qu’il a connaissance de la sélection, avise l’organisateur. Il n’a pas mis un pixel, ni un grain d’argent personnel dans cette photographie qui a été entièrement réalisée par un ordinateur binaire, à la demande.

L’organisateur n’entend pas se déjuger et prétend que peu importe la façon de réaliser l’image, il maintient son choix et convie le « pseudo-auteur » à venir chercher sa récompense.

Arrivé à Londres, Boris annonce clairement son opinion et renonce au prix (voir ses textes ci-dessous).

Sony, mauvais joueur, fait décrocher l’image binaire qui trônait dans son exposition et qui a été vue par tous les journalistes lors de la visite de presse quelques heures avant la remise des prix. Les classements de la catégorie création ont été modifiés sur le champ.

Sans entrer davantage dans les détails, assez révélateurs de notre monde moderne, il reste quelques questions en suspens.

En regardant toutes les photographies primées sur 415 000 (supposées être bien photographiques), on comprend que cette image ait été retenue. Inquiétant, pour l’avenir et pour la photographie, n’est-il pas ?

En regardant, même distraitement, cette image numérique, il saute aux yeux que malgré le travail et les recherches très avancées de Boris, il ne s’agit pas d’une prise de vue, ni même d’un montage cohérent de laboratoire.

En regardant attentivement, cette image, je me suis demandé comment un Jury que j’imagine de personnalités ultra-compétentes a pu passer à côté. Sauf la fatigue si cette image était dans les cents dernières des 415 000 visionnées consciencieusement.

Cette affaire, grâce au prestige de la SWPA, devrait amener chacun à réfléchir sur le rôle effectif des uns et des autres et sur ce qui est acceptable coté vérité et refusable du côté des fausses vérités.

Les deux interventions phares de Boris Eldagsen dans cette triste mascarade.

« MA DÉCLARATION  14.3.23
QUAND LA SÉLECTION DE MON IMAGE A ÉTÉ ANNONCÉE PAR SWPA (sans qu’ils ne communiquent, qu’elle a été générée par l’IA ou sans répondre correctement aux demandes de la presse)

Je suis très heureux d’avoir remporté la catégorie créative des Sony World Photography Awards 2023 / Open Competition / Single Image.

Je photographie depuis 1989, je suis un artiste photomédia depuis 2000. Après deux décennies de photographie, mon objectif artistique s’est déplacé vers l’exploration des possibilités créatives des générateurs d’IA.

Le travail que SWPA a choisi est le résultat d’une interaction complexe d’ingénierie rapide, « d’inpainting et d’outpainting » qui s’appuie sur ma richesse des connaissances photographiques. Pour moi, travailler avec des générateurs d’images IA est une cocréation, dont je suis le réalisateur. Il ne s’agit pas d’appuyer sur un bouton – et c’est fait. Il s’agit d’explorer la complexité de ce processus, en commençant par affiner les invites de texte, puis en développant un flux de travail complexe et en mélangeant diverses plates-formes et techniques. Plus vous créez un tel flux de travail et définissez des paramètres, plus votre part créative devient élevée.

J’ai été le premier en Allemagne à enseigner cela comme un métier dans des ateliers en ligne ouverts : www.promptwhispering.ai

J’appelle mes images « images ». Elles sont produites synthétiquement, utilisant « le photographique » comme langage visuel. Ce ne sont pas des « photographies ».

En participant à des appels ouverts, je souhaite accélérer le processus des organisateurs du prix pour prendre conscience de cette différence et créer des concours distincts pour les images générées par l’IA.

En faisant des conférences publiques et en étant consultant pour des universités, des magazines, des agences, des festivals, des musées et des organisations, je vois mon rôle comme un praticien du transfert de connaissances. En tant que « Head of Digital » de la Deutsche Fotografische Akademie, je suis membre du groupe de travail sur l’IA de Deutscher Fotorat, dans lequel les associations allemandes de photo discutent des chances et des risques de cette technologie perturbatrice au sens large. » – Boris Eldagsen

 

« MA DECLARATION 13.4.23
REFUS DU PRIX des Sony World Photography Awards, Open Competition / Creative Category lors de la cérémonie des London Awards :

« Merci d’avoir sélectionné mon image et d’en avoir fait un moment historique, car il s’agit de la première image générée par l’IA à gagner un premier prix dans un prestigieux concours international de PHOTOGRAPHIE.

Combien d’entre vous savaient ou soupçonnaient qu’elle était générée par l’IA ? Quelque chose à ce sujet ne va pas, n’est-ce pas ?

Les images d’IA et la photographie ne devraient pas se concurrencer dans un prix comme celui-ci. Ce sont des entités différentes. L’IA n’est pas la photographie. Par conséquent, je n’accepterai pas le prix.

J’ai postulé comme un singe effronté, pour savoir si les compétitions sont préparées pour que les images AI entrent dans la compétition. Ils ne le sont pas.

Nous, le monde de la photo, avons besoin d’une discussion ouverte. Une discussion sur ce que nous voulons considérer comme la photographie et ce qui ne l’est pas. Le parapluie de la photographie est-il assez grand pour inviter des images d’IA à entrer – ou serait-ce une erreur ?

Avec mon refus du prix, j’espère accélérer ce débat.

Ayant été photographe pendant 30 ans avant de me tourner vers l’IA, je comprends les avantages et les inconvénients de ce débat et serai heureux de participer à la conversation.

Si vous ne savez pas quoi faire avec le prix, veuillez en faire don au fotofestival d’Odessa, en Ukraine. Je serai heureux de vous fournir les contacts.

Merci beaucoup. » – Boris Eldagsen

Écrit par Thierry Maindrault, Lundi 17 avril 2023

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