Né en 1949, particulièrement célèbre pour ses re-photographies de cow-boys des campagnes publicitaires Marlboro ou pour sa série de toiles de Nurses, Richard Prince est certainement l’artiste qui raconte le mieux l’Amérique fin de siècle. La Bibliothèque nationale de France accueille sa première exposition de grande envergure à Paris et pour cet événement l’invite à s’approprier les collections de la Bibliothèque.
L’exposition Richard Prince: American Prayer (en référence à la poésie de Jim Morrison dont il est un fervent collectionneur) révèle les relations entre l’art contemporain et le livre. Elle met pour la première fois en lumière l’influence essentielle, mais méconnue, du livre et de l’imprimé sur l’œuvre protéiforme de Richard Prince. En effet, depuis près de trente ans, Richard Prince collectionne avec passion livres, manuscrits et documents relatifs à la culture populaire et aux contre-cultures américaines des années 1950 à 1980, destinées à aboutir un jour ou l’autre et sous des formes diverses dans son travail de peintre et de photographe.
Sur fond de musique de Jimi Hendrix, de Jim Morrison, de Bob Dylan et du Velvet Underground dont il possède des archives étonnantes, et avec la complicité du scénographe anglais David Adjaye, Richard Prince nous emmène dans une Amérique d’après-guerre mythique, l’Amérique «Beat, Hippie, Punk», qui berça les rêves de toute une génération de baby-boomers en Europe.
L’exposition est construite autour d’une installation de l’artiste: une maison américaine typique rassemblant sa collection d’American/English, soit une quarantaine d’éditions originales américaines et anglaises de titres emblématiques de la littérature américaine, traitées comme des sculptures. Le parcours fait la part belle à sa passion pour les écrivains de la «Beat Generation», tels que William Burroughs, Jack Kerouac ou Allen Ginsberg, pour les écrivains hippies tels que Richard Brautigan, pour les auteurs de science-fiction, tels que Philip K. Dick ou les auteurs de polars, tels que Jim Thompson ou Chester Himes.
«Je me réjouis que Richard Prince, pour sa première grande exposition dans notre pays, ait choisi la BnF et accepté de relever le défi de la carte blanche.» Bruno Racine, président de la BnF.
En dialogue avec une sélection de livres rares et de manuscrits de Rimbaud et Céline qui vont résonner avec les auteurs de la «Beat Generation», de fanzines comme Actuel ou L’Écho des Savanes, de livres populaires érotiques puisés dans les collections de la BnF et jamais montrés, sur lesquels Richard Prince fera des interventions surprenantes, l’artiste dévoilera pour la première fois au grand public quelques-uns des trésors de sa bibliothèque personnelle: des documents des principales figures de la «Beat Generation», comme un exemplaire annoté par William Burroughs du Festin Nu ou le rouleau manuscrit de Big Sur de Jack Kerouac, sa collection de «pulp fiction» autour du personnage érotique et troublant de l’infirmière, ou sa collection des éditions de Lolita de Nabokoven une vingtaine de langues. Tableaux, dont deux Nurses jamais exposées et conservées par l’artiste, dessins, photographies, livres d’artistes, manuscrits et objets illustreront donc son univers personnel entre culture savante et culture populaire, entre Amérique et Europe, selon une démarche artistique unique.
L’exposition présente un choix des pièces maîtresses de cette collection «BeatHippiePunk» – selon les termes de Richard Prince – c’est-à-dire essentiellement tournée vers la culture populaire et vers les contre-cultures américaines de l’après-guerre (science-fiction, pulp fiction, polars, bandes dessinées, littérature sulfureuse ou pornographique et écrivains de la Beat Generation). En regard de ces documents, on trouve exposée une sélection d’œuvres picturales et photographiques de Richard Prince. En lui, l’artiste et le bibliophile apparaissent indissociables : il procède dans son art comme il constitue sa collection, par répétition et variation, accumulation et continuation. Il possède ainsi vingt-deux premières éditions de Lolita de Nabokov parues à travers le monde. Une grande partie de sa production artistique des dix dernières années peut être considérée comme un prolongement de sa collection.
Né en 1949 dans la zone américaine du Canal de Panama, il grandit près de Boston. Arrivé à New York dans les années 1970, il est employé au département des archives de Time Life, chargé de classer des coupures de presse par sujet ou par auteur. Passant son temps à découper des journaux et des magazines, il s’intéresse à tous les déchets qui restent de son travail, les publicités, les bandes dessinées, les annonces, etc. qu’il commence à collectionner. À cette époque, il côtoie la mouvance «Pictures Generation», une génération de jeunes artistes qui compte entre autres Cindy Sherman, Robert Longo, Barbara Kruger ou encore
Jeff Koons. Richard Prince commence à photographier des images publicitaires, présentes dans la sphère quotidienne et qui font partie de l’univers culturel de tout un chacun. Champion d’un art appelé «appropriation art», son travail consiste donc à re-photographier des photographies existantes, comme si elles étaient ses propres œuvres .