La Galerie Steven Kasher a inauguré la semaine dernière sa nouvelle exposition dédiée aux premières œuvres de Meryl Meisler, présentant plus de 35 tirages en noir et blanc. Ces photos expriment la force émotionnelle et l’exubérance des années 1970, quand la Psychologie Populaire encourageait les individus à devenir eux-mêmes et à s’accomplir, depuis les femmes au foyer des banlieues de Long Island jusqu’aux drag-queens et aux reines du disco. Les photos montrent les intérieurs remplis d’objets kitchs dans la ville natale de Meisler à Long Island, mais aussi les clubs sinistres et les rues de New York à l’époque disco.
Meisler trouve ses repères stylistiques dans l’esthétique de l’instantané, au cœur des débats dans le monde de la photo à New York depuis l’exposition New Documents organisée par John Szarkowski au MoMA en 1967. Elle s’inspire des carnets photographiques tenus par Jacques Henri Lartigue pendant plusieurs dizaines d’années, de la rétrospective Diane Arbus au MoMA en 1972 et des photos de l’effervescence des nuits parisiennes prises par Brassai dans les années 1930. Ces influences définissent son approche, centrée sur le récit intime, l’esthétique instantanée et la vie nocturne. Sa vision singulière de la ville de New York dans les années 1970 en fait l’un des maîtres de l’héritage culturel américain.
Les premières images de l’exposition datent de 1973. Ce sont des autoportraits où elle pose en habits de scout, de ballerine ou autres tenues d’enfance. Elle a ensuite tourné son objectif vers toute une troupe de personnages décalés, ses amis, parents, proches et voisins. La ville natale de Meisler, Massapequa, était surnommée « Matzoh Pizza », en raison de la forte présence de familles juives et italiennes. Les décors étranges dominent, inspirés par tout et n’importe quoi, depuis l’Empire français jusqu’à la modernité du milieu du siècle. Toute une série de personnages pleins de vie prêts à en faire des tonnes à la moindre occasion. « Les maisons sont des scènes de théâtre », explique Meisler. Les gens de « Matzoh Pizza » aimaient s’amuser et voulaient connaître leur heure de gloire.
Beaucoup des photos de Meisler montrent les membres du « Mystery Club », groupe de onze couples de voisins qui se relayaient pour organiser des sorties « mystères ». Ils se rendaient ainsi partout, dans les maisons hantées, les studios d’enregistrement, chez les hypnotiseurs des Continental Baths de New York ou dans un camp naturiste au sud du New Jersey. Posant pudiquement devant leur papier peint coordonné ou leurs couvre-lits, entourés de bibelots décoratifs, les sujets de Meisler expriment la fierté et le plaisir de ceux pour qui les banlieues représentaient des foyers abordables et une chance de fuir les rues de la ville, devenues de plus en plus désagréables.
Quittant le Wisconsin en 1975 pour retourner en ville, Meisler a travaillé comme illustratrice indépendante. Elle fréquentait les clubs et les discothèques newyorkais malfamés, suivant une communauté éclectique et très unie d’artistes, féministes, drag-queens, musiciens et auteurs. Elle a photographié les punks du CBGB, les noctambules du Studio 54 et les danseuses du Playmates, du Winks et du Magic Carpet, où elle travaillait comme hôtesse. Ses photos de la vie nocturne la plongent avec le spectateur au cœur de l’hédonisme sans limite des clubs comme Hurrah, Les Mouches, Xenon et autres lieux de débauche cathartiques.
EXPOSITION
Meryl Meisler
A voir également : Brian Griffin, Capitalist Realism
Du 25 février au 9 avril 2016
Steven Kasher Gallery
515 W. 26th St.
New York, NY 10001
Etats-Unis
Ouvert du mardi au samedi de 10h à 18h