J’ai souvent dit que si vous vouliez laisser votre empreinte en ce bas monde, vous deviez simplement écrire un livre ou construire votre maison. Tout deux sont imprégnés d’un sentiment de permanence, une touche d’éternité qui perdure autant à l’intérieur qu’à l’extérieur, nous élevant à un nouveau plan d’existence du Soi. La demeure se hisse comme un testament de grandeur, en combinant notre besoin de refuge avec une structure qui change notre relation à l’espace ; dès que nous devenons intérieurement un avec notre création et que nous devons nous aligner avec ses axes afin de ressentir l’existence, d’être et de la respirer à plein poumons.
Un ouvrage exprime et témoigne du génie, associant notre besoin de compréhension à une composition qui change notre relation à notre connaissance sur le monde. Le livre nous entraîne plus profondément en nous-mêmes, nous invitant à entrer dans un monde que nous ne pourrions seulement connaître que par la vertu du fait que l’auteur l’aura créé à dessein. Et une fois que nous nous engageons dans ce voyage, nous en découvrons tous les aspects. Ce qui donne sa force au livre est représenté par la manière dont il transforme notre vision du monde. Non pas une fois, ni deux fois mais à chaque nouvelle incursion. L’art le plus précieux ne change jamais mais il nous change et lorsque nous prenons de l’âge, nous le redécouvrons, nous y trouvons quelque chose de frais parce que c’est nous qui avons changé et en cela, l’art reflète cette croissance.
Mais nos constructions peuvent être détruites et nos livres ne plus être imprimés et les plus grandes œuvres de l’humanité peuvent s’éteindre sans laisser de traces. Une fois que la génération sera passée, le savoir disparaît et au mieux, nous ne gardons qu’un vague souvenir de ce qui n’existe plus. La bibliothèque d’Alexandrie représente le parfait exemple de la mort; le bâtiment qui abritait le savoir fut brûlé et avec lui, l’occident tout entier fit un bond en arrière.
Il est difficile de savoir si une telle chose pourrait à nouveau se reproduire mais ce n’est pas improbable compte tenu du fait que tout devient numérique. A vrai dire, pas tout. Il reste encore des bâtiments et des livres et ce qui est beau, c’est lorsqu’un classique retourne en rayons. Paris by Night par Brassaï représente ce genre d’ouvrage, aujourd’hui fidèlement réimprimé par Flammarion. Ce qu’elle est et ce qu’elle fait est devenu encore plus important à une époque où de nombreux arts et livres de photographies sont devenus des fourre tout. Car il y a trop de produits et pas de marchés suffisants pour un résultat qui reflète une industrie souffrant de la surabondance et de la difficulté à soutenir sa propre existence.
Vous pouvez lire l’intégralité du texte de Sara Rosen dans la version anglaise de La Lettre.
Brassai: Paris by Night
Flammarion, 2012
US Price: $45.00
ISBN: 978-2-08-020099-0
