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Ludovic Bruneaux, Égyptiens à Paris

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Certaines rencontres se font naturellement, comme celles que j’ai faites avec ces hommes égyptiens.

En nouant ces relations, j’ai pu découvrir autre chose que ce qui m’avait été transmis à l’école et par les médias. Ayant moi aussi vécu à l’étranger, j’ai mis en regard leur situation et mon propre parcours.

Mon émigration était un choix personnel. J’ai voulu aller vivre cinq ans au Japon pour découvrir une autre culture. Cette expérience, avec ses difficultés (d’intégration, de lecture…) m’a donné cette empathie qui m’a permis de mesurer le tragique, parfois, des vies de ces jeunes hommes dans notre capitale.

Au fur et à mesure de ces rencontres, j’ai fait la connaissance de personnalités, souvent discrètes, aux parcours touchants.

J’ai découvert des gens travailleurs, sérieux, drôles, dignes, désireux de s’intégrer, studieux, voulant progresser, développer – pour certains – une activité professionnelle propre, soutenant leur famille ou envisageant de fonder une famille.

Malheureusement, certains de leurs projets (retrouver leur famille, se marier dans leur pays, créer leur entreprise) ne sont pas possibles en raison de leur situation irrégulière.

Lors d’une visite à la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration, une de mes opinions à propos de cette communauté a été confirmée : il y a peu d’Égyptiens en France (bien que selon eux, il y en ait beaucoup ; opinion sûrement due à la vie en autarcie : employeurs, collègues et amis sont égyptiens).

Mon projet a donc été de les rendre visibles, ces hommes doublement invisibles (peu nombreux en comparaison d’autres communautés d’étrangers et en situation irrégulière) en les faisant poser
selon cette esthétique devant des monuments de Paris ou des lieux fréquentés par des Parisiens.

Celle-ci s’inspire directement des photographies d’Eugène Atget. Au tournant du XXe siècle, il a photographié, notamment, Paris et ses alentours. Et en raison du temps de pose assez long, il ne reste des personnes dans la rue qu’une trace vaporeuse qui les fait ressembler à des fantômes.

En reprenant cette impression née de la vue de ses photographies, j’ai fait poser ces hommes dans différents endroits symboliques ou non de Paris. Au contraire des passants, des voitures, ils sont demeurés immobiles, pendant une seconde. De cette manière, j’ai voulu montrer leur présence et la beauté de ces personnalités qui contribuent à l’économie de notre pays.

Avant chaque prise de vue, je leur ai posé quelques questions sur leur parcours, leur vie en France, leurs projets. J’ai découvert des chemins de vie émouvants et engagés qui peuvent résonner avec chacun.

Tous cherchent une vie meilleure qu’ils ont réussi à trouver en France. Parfois, ils ont aussi trouvé un accès et une qualité de soin dans notre pays qu’ils n’ont pu avoir dans le leur. J’ai aussi senti la douleur de ne pouvoir revoir les parents, les amis, du fait de leur situation précaire. C’est pourquoi beaucoup font des démarches, dans des préfectures surchargées, pour obtenir un jour des papiers qui leur permettront de revoir ces êtres aimés.

Ludovic Bruneaux

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