Rechercher un article

LOOK3 2016 : Rencontre avec Mary Calvert

Preview

Photojournaliste engagée, Mary F. Calvert se sert de la photo pour susciter des changements sociaux significatifs. Connue pour son travail sur les problèmes de droits de l’homme liés au genre sexuel, elle estime que les journalistes ont le devoir d’allumer une lanterne dans les recoins les plus sombres de l’expérience humaine et de tendre un miroir à la société pour qu’elle s’observe.

NM : Vous êtes engagée depuis trois ans dans un projet à long terme, « Sexual Assault in America’s Military » (« Les Agressions Sexuelles dans l’Armée Américaine »). Racontez-nous comment ce projet a commencé et pourquoi il signifie tellement pour vous.

MC : Je me suis spécialisée dans les problèmes de respect des droits de l’homme liés au genre, ceux qui sont négligés ou sous-représentés. C’est un travail qui m’a menée aux quatre coins du monde. Il y a six ans, j’ai été licenciée du journal où je travaillais : j’ai dû me réinventer du jour au lendemain car je n’avais plus les financements pour produire le type de travail que je faisais avant. Il y a trois ans, je cherchais un projet que je pourrais mener aux États-Unis. C’est mon mari, Joe Eddins (également photographe), qui m’a suggéré de m’intéresser aux agressions sexuelles commises dans l’armée américaine, un problème terrible contre lequel personne ne faisait rien. J’ai été très surprise car j’avais arpenté les couloirs d’installations militaires pendant 18 ans, en tant qu’instructrice pour l’Atelier Mondial des Photographes Militaires du Département de la Défense. Je passais devant des annonces sur les tableaux d’affichage, qui proposaient un suivi pour les victimes d’agressions sexuelles ou des numéros de hotlines disponibles 24h/24 pour ceux qui avaient besoin d’aide. Je me disais : « Il ne doit pas se passer ce genre de choses ici ». En commençant mes recherches, j’ai compris que ces annonces répondaient en fait à une véritable épidémie d’abus dans l’armée. J’étais très en colère et choquée quand j’ai lu qu’on estimait le nombre d’agressions sexuelles dans l’armée américaine à 26 000 par an. Ce sont ces statistiques et la pensée de tous mes amis qui servent dans l’armée qui m’ont décidée à raconter cette histoire.

NM : J’ai lu récemment que plus de 50% des agressions sexuelles dénoncées dans l’armée sont perpétrées par des hommes sur des hommes. C’est un phénomène dont on entend pourtant rarement parler. Les répercussions sont-elles différentes quand c’est un homme plutôt qu’une femme qui en dénonce un autre ? Aussi, envisagez-vous d’inclure des hommes à votre projet ?

MC : Dans l’armée, seulement 5% des femmes et 1% des hommes dénoncent les agressions sexuelles dont ils ont été victimes ou demandent de l’aide pour leur traumatisme sexuel. Le taux de condamnation étant de 7%, il n’y a rien d’étonnant à ce que 81% des hommes victimes de viol ne dénoncent jamais l’agression dont ils ont été victimes. Les hommes comme les femmes en service subissent du harcèlement et des représailles. Si les femmes ont tendance à chercher le réconfort auprès de leur famille, leurs amis, de thérapeutes ou d’autres victimes, les hommes mettent souvent 20 à 40 ans ne serait-ce que pour reconnaître le crime, ou évoquer l’agression avec quelqu’un. Avant, le « Don’t Ask, Don’t Tell » (« Ne demandez pas, n’en parlez pas », doctrine et législation en vigueur de 1993 à 2011 dans les forces armées américaines, qui engageaient l’armée à ne pas se renseigner sur l’orientation sexuelle de ses recrues, afin d’assouplir l’interdiction faite aux non-hétérosexuels de s’y engager. NdT. ), beaucoup étaient terrifiés à l’idée d’être exclus de l’armée pour avoir « commis » un acte homosexuel. J’ai déjà commencé à intégrer au projet certains survivants de crimes commis par des hommes sur les hommes.

© 2016 South x Southeast photomagazine, sxsemagazine.com

FESTIVAL
LOOK3
Conférence: Mary F. Calvert
Vendredi 17 juin 2016 à 11:00
The Paramount Theater
215 East Main Street
Charlottesville, VA 22902
États-Unis

Exposition : Missing in Action : Homeless Female Veterans
Du 13 au 19 juin 2016
Pop Up Gallery (à côté de Bank of America)
306 East Main St.
Charlottesville, Virginia
États-Unis

http://www.maryfcalvert.com
http://look3.org

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android