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La guerre de 1870, vue par Adolphe Braun

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Du 17 février au 14 mai 2018, le Musée Unterlinden de Colmar présente une rétrospective consacrée au photographe Adolphe Braun (1812-1877). Braun a été un photographe français parmi les plus influents du 19e siècle. Aujourd’hui, L’Œil de la Photographie vous présente ses images d’après la guerre de 1870 entre la France et l’Allemagne.

Peu de temps avant la guerre franco-allemande de 1870, la maison Braun a créé une véritable usine photographique à Dornach, près de Mulhouse. Elle poursuit son activité de production malgré l’annexion de l’Alsace à l’Allemagne et d’importantes pertes, tant matérielles que financières. En quête de nouveaux débouchés, Braun lance ses opérateurs sur les principaux lieux de combat dès la fin de la guerre, au printemps 1871. Sous le titre Siège de Belfort paraît un album d’une douzaine de tirages qui témoignent des conséquences de la bataille sur les habitations, les fortifications et la cathédrale de la ville. Les clichés des rues en contrebas des fortifications illustrent la violence de la dernière grande bataille de la guerre. Chaque album du siège de Belfort propose une sélection et un nombre de tirages différents, mais tous contiennent une vue des ruines de la tour de la Miotte. Cet ancien ouvrage défensif en bordure du mur d’enceinte faisait figure de principal symbole de la ville avant que ne soit érigée la statue du Lion de Belfort.

Traitée du format stéréoscopique jusqu’au 40 x 50 cm, la série intitulée Théâtre de la guerre compte plus de mille vues. A Strasbourg et dans ses environs (Niederbronn, Reichshoffen, Bitche, Haguenau), Braun doit affronter la concurrence du photographe local Charles Winter (1821-1904) qui parvient à imposer sa production.

A Paris, l’insurrection de la Commune de mars à mai 1871 a provoqué combats de rue, exécutions et incendies. Ces événements tragiques sont le sujet récurrent des gravures sur bois dans les illustrés étrangers. La presse privilégie alors la gravure comme technique d’illustration en raison de la difficulté à reproduire les photographies. Celles-ci peuvent néanmoins toucher un public plus large en servant de modèle aux illustrations de presse. Dans le même temps, la censure retire de la circulation les photographies montrant des acteurs et des événements précis, comme des portraits de communards ou les images de la démolition de la colonne Vendôme. À partir de juin 1871, les rues de la capitale sont parcourues par de nombreux photographes qui, comme Adolphe Braun, voient une opportunité commerciale dans les images des bâtiments détruits par la Commune.

Les gares, ponts et places de Paris apparaissent dans 86 clichés, suivis par 82 photographies des environs de la capitale, en particulier des forts de l’enceinte de Thiers (Rosny, Romainville, Ivry, Nogent, Choisy) détruits par l’armée allemande. Par son passé prestigieux de résidence royale et impériale, le château de Saint-Cloud, près de Paris, accède au statut de monument symbolique des destructions de guerre. Occupé par les troupes bavaroises et prussiennes, il a été détruit le 13 octobre 1870 par un incendie provoqué par des tirs d’artillerie au cours de la bataille de Bagneux. Les touristes en font après-guerre un but d’excursion privilégié : Parisiens faisant leur promenade dominicale, Français venus de province et surtout Anglais qui visitent les principaux sites du siège de Paris. Afin que les visiteurs ne manquent aucun détail, des vendeurs ambulants leur proposent des jumelles ou des guides des ruines rédigés à leur intention. Braun y réalise sept vues extérieures et six clichés montrant les vestiges des décors intérieurs.

Pour ses campagnes photographiques, Braun choisit très exactement les ruines proposées dans les guides comme buts de promenade. Le nouvel effet produit par les ruines prime sur l’importance passée des bâtiments. Écrivains et photographes sont fascinés par les bâtiments du centre de Paris, construits dans un style antiquisant et dont les vestiges produisent à présent l’effet de ruines romaines ou grecques. L’ancien ministère des Finances, le palais des Tuileries ou l’Hôtel de Ville se prêtent parfaitement à un rapprochement avec l’architecture de l’Antiquité. Le sentiment que la guerre faisait encore rage il y a peu est effacé par la recherche d’une expérience esthétique contemplative, proche du préromantisme à la fin du XVIIIe siècle. Le Théâtre de la guerre d’Adolphe Braun a contribué à ce changement de perception de la capitale et à faire de la ruine le symbole de la guerre de 1870 et de la Commune.

 

Adolphe Braun, l’évasion photographique
Du 17 février au 14 mai 2018
Musée Unterlinden
1 Rue des Unterlinden
68000 Colmar
France

http://www.musee-unterlinden.com/

Catalogue de l’exposition (versions en français et en allemand)
Adolphe Braun – Une entreprise photographique européenne au 19e siècle
Publié par Editions Schirmer / Mosel
260 pages (version française) 35 €
360 pages (version allemande) 58 €

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