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Jean Noviel

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« Le passé ne meurt jamais. Il n’est même pas passé. » William Faulkner.

Les paysages marqués par la Grande Guerre durant la bataille de Champagne sont au cœur de ce travail, et plus précisément l’ancien tracé du front situé au nord du département de la Marne. En septembre 1915, l’état-major Français décide de lancer l’offensive en ces lieux où les Allemands ont solidement pris position. Une lutte peu connue de douze jours s’ouvre alors et son triste bilan tient autant aux échecs d’artillerie successifs qu’aux milliers de pertes humaines, vite éclipsées par l’horreur de Verdun. C’est sur ces terres, entre Souain et Massiges, qu’Apollinaire a laissé quelques vers fulgurants, Cendrars sa main et mon grand-oncle la vie, comme tant d’autres tombés pour la France.

Cent ans plus tard que reste-t-il de mémoire et de souvenir sur ces terres que les remembrements et les pratiques agricoles ont profondément transformées ? De grands paysages clairs et de longues routes fuyantes, un horizon lointain que presque rien n’arrête, une campagne bien paisible sans tragique apparent. De rares cicatrices du conflit sont encore perceptibles mais peu d’indices laissent à penser l’histoire de la guerre sur ces terres ni le destin des hommes à jamais enterrés au coeur des territoires.

Comment dès lors redonner sens au paysage qui par définition reste muet et ne dit rien de lui-même ? Comme interroger cette force de rémanence du passé et de l’histoire enfouie dans le présent d’aujourd’hui ? Comment parler de la Guerre en questionnant le paysage et sa représentation ? Seuls des mots et des bribes de paroles pouvaient alors donner à comprendre la notion du souvenir en ces lieux.
J’ai donc cherché à entendre ceux qui pouvaient évoquer une mémoire où le conflit avait encore toute son empreinte dans le paysage local. Je les ai questionnés, écoutés, accompagnés au milieu de la nature, en quête du lieu-dit Beauséjour, pour essayer de comprendre et relire le paysage dans toute l’ambiguïté d’un témoignage photographique et sonore a posteriori. Terres des hommes* est le fruit de ces rencontres et des allers-retours sur place : une suite photographique où chaque image est légendée d’un court texte qui donne à repenser le conflit en creux de ce qui est montré et un film où des voix questionnent la campagne d’hier et la confrontent avec celle d’aujourd’hui. Deux manières d’aborder de concert notre rapport mémoriel – intime et collectif – à l’histoire et sa représentation dans le paysage… et cette question cruciale du souvenir qui tend à disparaître.

Jean Noviel, 2014

Voir aussi:
vimeo.com/106750539

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