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Jean-François Jonvelle, tendresse amoureuse

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Ce second portfolio est consacré aux actrices françaises. Jean-François Jonvelle l’avait commencé pour Photo dans les années 80. En préface du livre, vous trouverez un très joli texte de Frédéric Beigbeder, suivi d’une courte biographie:

Jean-François Jonvelle a été cueilli par la mort aussi instantanément que les photographies qu’il prenait. Il n’a dédié sa vie qu’aux moments volés ; la mort l’a imité, l’emportant sur le vif. Une tumeur décelée début janvier, un adieu quinze jours après. Une disparition soudaine comme un flash. Je feuillette le dernier livre de mon ami et je vois flou. Mes larmes font ressembler le travail de Jonvelle à du David Hamilton !

Selon la formule consacrée, on dit de Jonvelle qu’il faisait du « sexy sans être vulgaire ». Je lui emprunterais plutôt sa propre définition : « la poésie du quotidien », voila ce qu’il traquait. La photo fige des instants de vérité, il suffit de choisir les plus jolis. « Je me dis que le présent et le futur n’existent pas » disait-il aussi. « Chacun crée tous les jours son passé ». Ce qui rendait ses images plus troublantes que les autres, c’est leur fragilité. Jonvelle m’a appris une choses très importante : en photo comme en littérature, l’essentiel c’est l’émotion. Or l’érotisme n’est pas l’ennemi de la tendresse. On peut bander pour un bras duveteux, une nuque fragile, un téton dardé, un dos rond sous les draps, des cheveux mouillés, des paupières fermées, et la trace d’un baiser dans le cou.

Les femmes de Jonvelle sont fraîches parce qu’elles ne savent pas que nous les regardons. Jonvelle fait de nous des voyeurs amoureux. Il montre pourquoi il est si douloureux d’être hétérosexuel : partout, dans chaque maison, dans n’importe qu’elle salle de bain, se cache le paradis. Le paradis retire délicatement son tee-shirt, et se brosse les dents torse nu, les fesses cambrées en arrière, les seins tendus, ronds, éternels. Soudain le paradis écarte les jambes en silence, le paradis se ronge les ongles en te regardant droit dans les yeux, le paradis te provoque et t’attend sur les draps. Jonvelle est désormais au paradis mais pour lui cela ne fait aucune différence : il y était déjà de son vivant.

En admirant comme toujours ses clichés sans stéréotypes, je pense à toutes ces beautés qu’il a immortalisées. La photo fige le provisoire, immortalise l’éphémère. Beaucoup des femmes qu’il a photographiées sont désormais vieilles ou mortes, mais grâce à Jonvelle, photographe lui aussi décédé, leur perfection ne mourra jamais.

Toutes les photographies de Jonvelle sont des déclarations d’amour. Un jour, à ma demande, il a photographié la mère de ma fille, Delphine Vallette. Je voulais offrir à cette brune dont j’étais amoureux un portrait : je ne me suis jamais senti aussi cocu. Mais c’était très érotique !

La beauté est un mystère fugace que certains artistes ont le pouvoir de capturer. En revoyant toutes ces images merveilleuses, je pense au titre d’une comédie américaine : « Drop Dead gorgeous ». Toute l’œuvre de Jonvelle n’est pas une ode à la féminité mais l’histoire d’une lutte contre la mort par la célébration du désir. Et toutes ces épaules surprises, ces seins entrevus, ces pieds cambrés, ces dos immaculés, cette solitude sensuelle, cette paix entre deux orages, toutes ces belles qui s’en fichent ne sont rien d’autre que des portes entrebâillées sur la vie éternelle.

Frédéric Beigbeder

Jean-François Jonvelle est né en 1943 à Cavaillon. Bientôt il va vendre les célèbres melons pour s’acheter un Hasselblad. Ses inspirations viendront de la peinture de Balthus, de Bacon, de Schiele, mais la véritable influence vient des films de Mankiewicz, Lubitsch, Fritz Lang, Orson Welles, Arthur Penn, Minnelli et plus récemment de Terry Gillian dont il avoue avoir vu onze fois le film Brazil ; Enfin son film préféré : Jules et Jim de François Truffaut.

En 1959, c’est le photographe Georges Glasberg qui l’initie à la photographie en lui faisant faire le tour de France des cathédrales. C’est une révélation photographique qui ne le quittera plus jamais. A l’âge de 20 ans il devient l’assistant du photographe américain Richard Avedon. Après cette expérience enrichissante il devient son propre « maître » dont le sujet favori sera la femme.

Sa maman et sa petite sœur dont il a toujours été très proche seront ses « premières victimes consentantes ». Puis viens la première muse et complice, Tina Sportolaro qu’il rencontre en 1982 et avec qui il réalise quelques-unes de ses plus belles images. Se sera ensuite Béatrice, Myriam et bien d’autres……

Il est notamment l’auteur des photos de la campagne de pub qui avait révolutionné l’affichage publicitaire dans les années 80 « Demain j’enlève le bas ».

Vont être entre autres les livres : 1983 : Celles que j’aime ; 1989 : Jonvelle Bis ; 1994 : Avril, mai, juin ; 1996 : Fou d’elles ; 1998 : Balcons.

Une importante monographie va être publiée en 2011. Il disait volontiers que son sujet préféré était la femme qu’il aimait. « Quand je photographie une femme disait-il, je veux qu’elle sache qu’elle est la plus belle de la terre, parce qu’une femme qui se sent belle devient vraiment la plus belle femme du monde. Mon bonheur, c’est aussi de n’avoir jamais entravé ma liberté, ni perdu ma fraîcheur, mon instant».

Jean-François nous a quitté le 16 janvier 2002.

Jean-François Jonvelle, les 100 plus belles photos
Sous la direction de Didier Poupard
Editions Gourcuff Gradenigo
ISBN 978-2-35340-112-3

Format : 24 x 32 cm à la française – Nombre de pages : 208
Nombre d’illustrations : 100 – Ouvrage relié, plein papier pelliculé, dos toilé. Imprimé sur papier couché mat 150 g – 39 euros TTC

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