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Georges Thiry et les filles de joie

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Amateur de génie, il disait : « Je suis photographe pour me distraire ». Pendant plus de quarante ans, Georges Thiry a promené son Rolleiflex comme un troisième œil sur le ventre, Bruxelles offrant le cadre privilégié de ses « promenades artistiques », comme il les appelait. Cette obsession, qui l’occupa de 1935 à 1975, est à l’origine d’une production de 40 000 négatifs, presque autant de contacts et un petit nombre de tirages.

Ami des Surréalistes belges, il aimait les artistes en général et les prostituées en particulier. Les portraits qu’il a fait des premiers, les notoriétés comme René Magritte, Paul Nougé, Christian Dotremont ou Louis Scutenaire, ont certainement contribué à sa reconnaissance. Quant aux secondes, les belles inconnues, les filles de joie, elles sont restées dans l’ombre discrète des savants contre-jour qu’il affectionnait.

Illustres ou non, tous ses modèles bénéficiaient du même traitement : il les photographiait de préférence chez eux, à leur aise dans leur décor familier. Pour les prostituées, ce dernier se confond souvent avec le lieu de travail, généralement une chambre où elles posent sans artifice, fumant une cigarette, réajustant un bas… Parfois, elles se prêtent au jeu d’une petite saynète improvisée dans l’arrière-cour : Finette en peignoir, Finette lisant un livre, Finette montrant ses fesses…

Dans l’histoire de la photographie, ils ne sont pas si nombreux à avoir franchi le seuil des maisons closes avec un appareil photo. On connaît, au XIXe siècle, quelques images d’Eugène Atget, un reportage sur les maisons closes d’Albert Brichaut, les séries photographiques de Bellocq à Storyville, puis quelques années plus tard, les fascéties érotiques de Monsieur X, les filles de la nuit de Brassaï, enfin les travaux de Jane Evelyn Atwood ou de Christer Stromholm. Une poignée de photographes pour une poignée d’images… sans compter toutes ces photographies anonymes prises dans le secret des alcôves que nous ne connaîtrons jamais.

Georges Thiry fait donc partie de ces rares initiés qui ont su gagner la confiance des prostituées. Il était le client photographe, suffisamment ami de ces dames pour qu’elles s’offrent à l’objectif sans minauder, ni jouer les prostituées. D’ailleurs, il ne les photographiait pas pour ce qu’elles avaient à vendre, le sexe, mais pour ce qu’elles étaient réellement, au-delà des étiquettes, saisissant des moments rares d’abandon comme cette femme en contre-jour, fumant une cigarette devant la fenêtre, le regard perdu…
C’est cette confiance établie entre le photographe et ses modèles, cette sincérité de part et d’autre, cette impression, souvent, de bonne humeur partagée qui font le prix de ces images dénuées de voyeurisme.
A ce titre, le fonds Georges Thiry (ces quelques centaines de négatifs retrouvés par la galerie Lumière des roses et cet autre millier de négatifs déposé au Musée de la photographie de Charleroi) est un ensemble exceptionnel.

De la photographie, Georges Thiry disait simplement : « Voilà ma petite passion. » Des filles qu’il fréquentait, des portraits tendres et superbes qu’il faisait d’elles, il aurait pu dire de même.

L’exposition présente des tirages vintages contacts (format 6×6) ainsi que des retirages argentiques réalisés par l’Atelier Isabelle Menu à Montreuil.

EXPOSITION
Georges Thiry et les filles de joie
du 28 avril au 23 mai 2014
Lumiere des Roses
12-14, rue Jean-Jacques Rousseau
93100 Montreuil
France
Du lundi au vendredi 14-19h et sur rendez-vous

http://www.lumieredesroses.com

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