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Galerie du Château d’Eau : Marion Gronier : We were never meant to survive

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Marion Gronier expose une série intitulée We were never meant to survive à la Galerie du Château d’Eau à Toulouse. Elle nous a donné ces photos et ce texte :

L’ Amérique du Nord est hantée par la violence de son histoire coloniale. Terre promise fantasmée par une poignée de dissidents religieux blancs fuyant l’Europe, elle a été arrachée à ses indigènes pour être exploitée par des esclaves importés d’Afrique. À travers les visages des descendants de ces peuples qui fondèrent les États-Unis, j’ai cherché à faire resurgir les fantômes qui hantent cette histoire et à attester de la persistance de cette violence qui s’est instituée dans la société américaine par une séparation et une hiérarchisation des races. J’ai photographié des Amérindien.ne.s en Arizona, au Nouveau-Mexique et dans le Montana, des Africains-Américain.e.s à la Nouvelle-Orléans en Louisiane et des Mennonites en Pennsylvanie1 . Mon travail s’inscrit dans la réflexion portée aujourd’hui par les études décoloniales qui dénoncent et déconstruisent les structures impérialistes sur lesquelles se sont édifiées nos sociétés occidentales. Mettre en évidence ces structures c’est déjà les ébranler dans la mesure où l’une de leurs forces est leur invisibilité et leur naturalisation. Cette réflexion m’a amenée à prendre conscience de ma position d’artiste européenne blanche et à mettre en question mon médium artistique, ses usages et ses pouvoirs, pour faire également réapparaître les fantômes qui le hantent. La photographie, inventée au XIXe siècle par les sciences positivistes, est en effet, elle aussi, un produit de cette société qui entend dominer, exploiter et objectiver le monde. Elle est un instrument de son savoir et de l’imposition de celui-ci. Ainsi, le portrait signalétique d’Alphonse Bertillon, appliqué aux populations colonisées, prouvait « scientifiquement » leur infériorité génétique et légitimer leur assujettissement. Ce dispositif (plan serré sur le visage, sujet immobile, regard frontal, centralité du cadrage, neutralité de l’expression) a laissé une empreinte indélébile dans l’histoire du portrait photographique, il a créé un codage qui opère à chaque fois qu’il est mis en place. « Le portrait signalétique excède par son statut de document « scientifique » (…). Loin de se limiter à enregistrer l’apparence de tel ou tel individu, il suscite une véritable prolifération de sens seconds. D’emblée, il désigne son sujet (…) comme un être coupable. »2 Ainsi, ce classement typologique, sous une forme en apparence froide et neutre recèle une extrême violence dans la mesure où « cette figuration ne peut s’accomplir que dans une dénégation mortelle de son propre sujet. »3 […].

 

Marion Gronier : We were never meant to survive
Jusqu’au 31 décembre 2022
Galerie du Château d’Eau
1 Place Laganne
31300 Toulouse, France
https://www.toulouse.fr/web/cultures/lieux-d-expositions#/annuaire-des-lieux/27/Ch%C3%A2teau%20d’eau?_k=ila1g3

 

Livre :
Marion Gronier, We were never meant to survive
Texte de Marion Gronier, citation de James Baldwin en avant-propos, édition Fabienne Pavia
140 pages – 51 photographies
Photogravure Le Bec en l’air
Le Bec en l’air, 2021
https://www.becair.com/

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