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Francesca Piqueras : Territoire Tranquille

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Alors que le Brexit relance le débat sur l’indépendance de l’Ecosse, c’est vers ses rivages que nous invite à faire cap Francesca Piqueras avec la série “Territoire tranquille” qu’elle présente Galerie de l’Europe (Paris), à partir du 18 février. Les plateformes pétrolières et les dispositifs militaires en ruine qu’elle a pris pour sujet semblent ici être des monuments immémoriaux. Comme s’ils formaient une prolongation sur mer du mur qu’Hadrien fit construire pour isoler de l’Empire Romain ce territoire au destin singulier.

Pour cette série “Territoire tranquille”, Francesca Piqueras s’est intéressée à trois types de structures maritimes :
– celles que l’on trouve sur le chantier de maintenance de plateformes pétrolières de Cromarty, où elle s’était déjà rendue il y a une dizaine d’années ;

– des cibles d’entrainement pour les bombardiers de la Royal Air Force, construites en 1937 à Luce Bay, et aujourd’hui abandonnées ;

– les vestiges de la barrière anti sous-marins édifiée pendant la Seconde Guerre mondiale entre l’Ile de Cramon et le rivage Ecossais.

Ces structures de béton et d’acier permettent à Piqueras de jouer sur les paradoxes. D’abord parce qu’emblématiques de l’ère industrielle, elles paraissent ici sorties du fond des âges. Les plateformes évoquent des totems érigés à la gloire de quelques divinités marines.

Les enfilades de pyramides de Cramon font écho aux alignements de Sphinx de Louxor. Les cibles de Luce Bay font penser à ces pierres levées du mégalithique, que l’on trouve d’ailleurs en nombre en Ecosse.

Autre paradoxe sur lequel joue la photographe : si ces plateformes et ces vestiges marquent les liens étroits (militaires, économiques) de l’Ecosse avec le reste du Royaume-Uni, ils semblent ici délimiter et isoler le “territoire tranquille” que l’on aperçoit en arrière-plan de ses photographies. Comme si ces structures étaient des éléments d’une seule et même barrière immémorielle, qui prolongerait par mer le mur qu’Hadrien fit édifier pour isoler de l’Empire Romain cette terre, l’antique Calédonie.

Dans ses premières séries sur les structures maritimes, le point de fuite des photographies de Francesca Piqueras était constitué par l’horizon marin. Son propos était alors essentiellement de souligner la fragilité des œuvres humaines face aux éléments naturels. Le changement qu’elle opère ici et qu’elle a initié dans sa série “In Fine” (2018), prise en Sibérie, marque au propre comme au figuré un changement de perspective.

Ses photographies sont moins méditatives, plus frontales. Le rapport aux éléments et à la lumière est à la fois plus naturaliste et plus nuancé. Si son œuvre atteint un point de maturité en continuant à nous interroger sur la destinée humaine au travers de ses artefacts, il ne s’agit plus de les confronter à l’élément marin mais à ce rivage qui apparait désormais en arrière-plan.

Pour les aborigènes d’Australie, chaque parcelle de territoire est habitée depuis les origines par un rêve. Quel rêve habite donc ce territoire pour s’entourer de tels monuments marins ?

 

FRANCESCA PIQUERAS : TERRITOIRE TRANQUILLE

18 février – 4 avril 2020
Vernissage jeudi 27 février 18h30 – 21h30

Galerie de l’Europe

55 rue de Seine, 75006 Paris

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