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Festival Phémina 2020 : Sladjana Stanković

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Aménagements successifs du noir

Pendant les années ’90, mon pays la Yougoslavie s’écroule. Les ex-républiques se déchirent et prennent leur indépendance au prix de guerres et d’une violence terrible. Cette violence se déchaîne et envahi non seulement le quotidien mais aussi les esprits. La violence est manipulée par tous et toutes les raisons sont bonnes : guerre de territoire, conflits religieux et ethniques, montages mafieux, luttes de pouvoir, avidité, jalousies, rancœurs accumulées, …

En Serbie, Slobodan Milosevic a besoin de la violence, du chaos et du conflit pour se maintenir au pouvoir. C’est la loi de plus fort qui règne sans pitié. Les groupes paramilitaires font régner la peur, les armes sont omniprésentes, l’embargo puis les bombardements de l’OTAN font des citoyens des otages Les frontières se ferment, l’inflation bat des records, la société sombre dans la misère économique et dans la misère culturelle. Les valeurs sur lesquelles nous avions bâti la vie d’avant d’écroulent.

La plupart de mes amis ont réussi à quitter le pays dès début des conflits. J’ai vécu cette période en Serbie du début à la fin. Avec tout l’optimisme nécessaire pour tenir et se tenir debout.

Pour finir, les bains de sang s’espacent, et Milosevic est finalement renversé. Mais évidemment tout ne change pas d’un coup, la société est perdue, la violence s’est imprégnée partout, elle est là. Et cet optimisme qui ne m’a pas quitté commence à se briser quand je me rends compte que le départ de Milosevic ne change pas fondamentalement les choses. Et réaliser ça c’est encore plus violent que tout, le noir déborde de partout. Je dois partir. Je fuis le noir.

En 2011 je retrouve la Serbie et Belgrade. La photographie va me permettre de me confronter à tout ça. Sylvain Prudhomme y pose des mots : Aménagements successifs du noir.

 

Sladjana Stankovic est née en 1966 à Trstenik en Yougoslavie, elle vit et travaille entre Belgrade et Paris depuis 2002. Ses pas et ses projets l’ont conduit régulièrement à la recherche d’une autre réalité humaine des Balkans d’aujourd’hui. En Serbie, elle s’est intéressée à ces ouvriers et ces mineurs qui poursuivent leur travail quand tout s’est arrêté autour d’eux. A Belgrade, des enfants Roms des rues l’ont emmenée chez eux, elle a passé du temps à les suivre et à partager leur quotidien des bidonvilles. Attentive à ces univers à la marge, elle a rencontré des enfants dans un orphelinat en Bulgarie, perdu au pied de la montagne. A Paris, pendant une année, elle a photographié ces hommes qui vivent dans la rue.

Pour explorer le sujet plus intime de son rapport à Belgrade, elle a choisi de s’associer à l’écrivain français Sylvain Prudhomme qui y a séjourné en résidence. Le résultat de leur conversation artistique, Aménagements successifs du noir, a été présenté en 2014 dans le cadre du festival littéraire Krokodil, repris dans la galerie de l’Institut français de Serbie et exposé en Bulgarie à l’Académie des Beaux-Arts de Sofia dans le cadre du mois européen de la photographie en novembre 2014. La sortie du livre éponyme aux éditions Rue du Bouquet en 2019 est l’occasion de composer une nouvelle version qui est présentée à la galerie Folia à Paris dans le cadre du festival Week-end à l’Est et plus récemment au festival Phémina à Fontainebleau.

 

https://croisonsnosregards.fr/

 https://www.facebook.com/pheminafestival/ 

@festivalphemina

 

 

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