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Festival de Photographie de Busan : Dina Goldstein : 10 Commandements

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Dina Goldstein est la star du Festival de Photographie de Busan en Corée du Sud jusqu’au 12 octobre.
L’exposition a pour titre : 10 Commandements.
Elle est accompagnée de ce texte:

Lincoln, œuvre marquante de la série, figure le 16e et le plus populaire des présidents américains, suite à la fusillade ayant eu lieu à l’école primaire de Sandy Hook. Sa grande silhouette imposante tient à peine dans le couloir de l’école vide, jonché de vêtements d’enfants, d’éclats de verre, de cartouches vides et de taches de sang. Et pourtant, l’atmosphère de deuil et de perte qui émane de la scène le rend diminué et démoralisé. Par extension, l’imagerie amenuise ici les principes sur lesquels les Etats-Unis ont été fondés. Associée au 6e commandement, « Tu ne tueras pas », l’œuvre évoque le propre assassinat public du président et souligne encore davantage les problèmes persistants du pays concernant la violence et la législation des armes à feu.

En recourant à sa méthodologie cinématographique reconnue, Goldstein dirige minutieusement la scène de Lincoln. Chaque partie, chaque accessoire stratégique comme symbolique, s’assemble après un processus de pré-production qui dure plusieurs mois. Dans cette image fixe et singulière, elle saisit un indice, un morceau du scénario qui compose la grande séquence narrative de la série.

Ce récit cherche à examiner l’identité socio-politique de l’Amérique à travers ses icônes politiques : les personnalités présidentielles qui ont marqué les chapitres les plus remarquables comme les plus controversés de l’histoire américaine. Chaque image-tableau montre un président représenté au travers du prisme de sa politique, de sa popularité et/ou de sa réputation, transposé dans un contexte contemporain et à qui on a attribué l’un des postulats moraux et éthique des 10 commandements bibliques. Ces juxtapositions narratives, souvent humoristiques, déconstruisent les strates de tromperie politique, exposant les hypocrisies latentes et remettant en cause l’intégrité d’un système censé être un modèle de démocratie et de progrès social. Au sein de la série, Lincoln réaffirme cette gravité, accidentellement éclipsée par la légèreté et l’humour d’autres œuvres.

La série des 10 Commandements s’inspire des bouleversements socio-culturels des Etats-Unis et des répercussions de la crise d’identité américaine sur le monde. L’élection de Donald Trump, homme d’affaires et ancienne star de télé- réalité aux compétences politiques douteuses, au poste de président, a révélé les failles d’une société aux valeurs en déclin. C’est donc avec un malaise tangible que le monde entier observe toujours l’actualité socio-politique américaine ; vu de l’extérieur, ce malaise est devenu beaucoup plus proche qu’on ne pourrait s’y attendre et l’imaginer. En d’autre terme, le rêve a disparu.

C’est précisément ici le domaine de Dina Goldstein. Avec les 10 Commandements, elle s’attaque une fois de plus aux subtilités d’un simulacre culturel, recréant un sentiment de désillusion inhérent à son œuvre et à sa voix d’artiste.

Contrairement aux autres séries de Goldstein, celle des 10 Commandements se lit de manière plus directe et est ouvertement militante. L’artiste revêt plus que jamais ce désenchantement, contrainte à observer et commenter en tant qu’être humain dont la vie et l’œuvre ont également été assombris par un idéal américain désormais fracturé. Ainsi, cette série montre une nouvelle facette du répertoire de Dina Goldstein, celle de la critique politique.

Traduction : Pierre-François Galpin

www.dinagoldstein.com

 

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