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Émile Savitry (1903-1967), Un Photographe de Montparnasse

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L’académie de peinture de la Grande Chaumière, les cafés du Dôme, la Rotonde et la Coupole, les ateliers d’artistes où posaient des modèles nus, le boulevard Edgar Quinet et les boîtes de jazz :  c’est au cœur de Montparnasse qu’Émile Savitry a entamé sa carrière de peintre, développé celle de photographe, fréquenté ses amis sculpteurs, peintres, poètes et musiciens, c’est là que ce talentueux touche-à-tout qui « avait plus d’une corde à son art » vécut toute sa vie.

Son œuvre ravive « les heures chaudes de Montparnasse », cette ébullition artistique et amicale qui prenait racine dans l’atmosphère enfumée des cafés du carrefour Vavin. On y voit Alberto Giacometti, Victor Brauner, Anton Prinner que Savitry photographia dans l’intimité de leurs ateliers, Samuel Granowski qu’il saisit au zinc de la Rotonde, Pablo Neruda de retour d’Espagne après la victoire de Franco, ici photographié à la Coupole en compagnie de Paul Grimault et quelques amis latino-américains en deuil de l’Espagne républicaine qu’il avait toujours soutenue.
C’est à son retour des îles du Pacifique où il avait fui un succès trop vite acquis lors de sa première exposition de peinture à la galerie Zborowski en 1929 et qui l’effrayait, qu’il fait la connaissance de Django Reinhardt sur le port de Toulon. Il offre le gîte et le couvert au guitariste manouche encore inconnu et lui révèle la musique de Duke Ellington et Louis Armstrong. La famille Reinhardt rejoindra bientôt Savitry à Paris et trouvera refuge quelque temps dans le bel appartement du photographe, boulevard Edgar Quinet, des photographies touchantes en témoignent.

Cette exposition reflète l’atmosphère du Paris des années 1930 à1950 et le parcours d’un photographe proche des surréalistes, du groupe Octobre et des frères Prévert où les lumières drues éclairent des visages de masque, le petit peuple de Pigalle croise la jeunesse jazzy des caves de Saint-Germain-des-Près, les rues de la capitale prennent des allures de décors de cinéma. Ce cinéma en noir et blanc magnifié par Marcel Carné et Jacques Prévert que Savitry accompagnera sur les tournages faisant surgir « l’éblouissante clarté » des Portes de la nuit et la beauté mélancolique d’Anouk Aimée dans La Fleur de l’âge, film maudit et inachevé, tourné à Belle-Ile-en-Mer en 1947. Les photographies de Savitry en sont désormais le seul témoignage visuel à ce jour, les bobines ayant mystérieusement disparu.
L’exposition nous imprègne de ce réalisme poétique que Savitry partageait avec Brassaï, Willy Ronis et Robert Doisneau avec qui il fit équipe au sein de l’agence Rapho. Elle nous rappelle à chaque silhouette de ces nus aux galbes harmonieux que le photographe n’a jamais abandonné les thèmes chers au peintre qu’il demeure.
Et sur un ton badin elle se termine avec l’envol de Charlie Chaplin et des marionnettes d’Yves Joly, élégante et légère révérence d’un homme discret « trop vivant pour se vouloir artiste » comme l’écrivait Claude Roy.

Sophie Malexis
Commissaire d’exposition

EXPOSITION
ÉMILE SAVITRY, un photographe de Montparnasse
du 5 mars au 24 avril 2016
Espace Exposition Cour des Boecklin
17 rue Nationale
67800 Bischheim
France
Mardi, mercredi, dimanche de 14h à 18h
Samedi de 10h à 12h et de 14h à 18h
http://www.ville-bischheim.fr
http://www.emilesavitry.fr

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