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Edition spéciale Iran :

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Ruth Web décrit l’ekphrasis comme « un propos qui fait surgir son sujet de manière vivace sous les yeux de son destinataire ».  Le sujet de Sina Boroumandi est la photographie, qu’il décompose en deux caractéristiques : c’est un procédé chimique, d’une part, et une captation de la lumière, d’autre part. La série se présente ainsi en deux fois sept images – 7, puisqu’il n’en finit pas de jouer sur les symboles. Pour chaque paire, l’une des photographies est une expérience de chimie, l’autre de lumière. Avec ses rectangles noirs aux coins arrondis, la partie “chimie” évoque au premier regard des négatifs qui auraient été agrandis pour permettre leur observation de près. Et de fait, certaines semblent être le résultat de l’étude au microscope d’un organisme indiscernable prenant soudain la forme d’un nuage, d’un démon, d’un squelette ou d’une abstraction laissée à l’imagination du spectateur. On pense alors, avec ce papier presque transparent des négatifs, à des radiographies, à des images pré-naissance, comme si le photographe décortiquait le processus créatif depuis son origine la plus intime. Avec leurs rectangles noirs alignés, ses images évoquent enfin un train laissant défiler le temps et la vie à travers ses fenêtres. Et n’est-ce pas ce qui se passe devant l’objectif, finalement, un défilement de temps que la prise de vue cadre pour tenter de l’arrêter ?

Sina Boroumandi associe a Ekphrasis un extrait du Corbeau, d’Edgar Allan Poe. Si le corbeau est connu pour sa longévité, la photographie incarne aussi depuis ses débuts le conflit de tout homme entre le désir pervers d’oublier et le désir de se souvenir. La partie “lumière” de la série, aux nuances toujours abstraites, semble expliciter cette tension émotionnelle. Dans les clairs-obscurs et le flou des photographies se distinguent une flamme vacillante, un dessin des ossements d’un corbeau, et même le visage de l’artiste lui-même, transformé par le mouvement du temps, aussi infime soit-il, pour ne laisser que l’empreinte de son âme. « Et mon âme hors de cette ombre qui flotte sur le sol sera élévée – plus jamais ! », écrivait Poe.

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