Project Misplaced retrace les chroniques loufoques de Simon (Soleyman) Ordoubadi, personnage fictif qui incarne les tribulations mégalomaniaques d’un immigrant iranien aux Etats-Unis. La série se présente sous la forme d’encarts publicitaires publiés pendant plusieurs mois dans la presse persane de Los Angeles en 2003 et de flyers distribués dans les rues californiennes à la même époque. Il se trouve qu’avant de déménager aux Etats-Unis en quête de liberté artistique, Houman Mortazavi travaillait dans une agence de publicité a Téhéran.
Le vocabulaire – et jusqu’à la grammaire – privilégié par Houman Mortazavi dans ces publicités évoque l’ambiguité identitaire auxquels sont confrontés ses compatriotes lorsqu’ils s’installent aux Etats-Unis. Simon Ordoubadi offre ainsi de satisfaire tous leurs besoins, depuis l’éducation jusqu’à la politique. Dans un mélange de persan et d’anglais cabossé, il propose par exemple : « Je garde votre enfant. J’aime aussi votre vieille mère. » En alphabet arabe, il précise : « Nous prenons soin de votre enfant dans un style traditionnel, religieux et basé sur des exercices : *On compte *Auto défense * Morsures de chien * Chute et glissade * Résister aux mafias urbaines (gangs) * Libido accrue * Avec de la danse et de la musique», et signe : Professeur Simon Ordoubadi.
Autoproclamé professeur, athlète, homme d’affaires, guide spirituel et même diplomate, Simon Ordoubadi représente pour Houman Mortazavi la génération d’Iraniens post-Révolution qui ont quitté le pays pour les promesses du rêve américain. Il s’évertue à flatter, à se fondre dans la masse, à prétendre qu’il a tout compris avec une prétention déplacée qui le rend étrangement attachant. « Project Misplaced traite du déplacement qui à son tour devient déplacé (comme le personnage principal). Quand son ego le fait par erreur affronter Arnold Schwarzenegger pour le poste de gouverneur, les publicités se mettent en anglais (le pauvre gouverneur a besoin du vote des natifs) »,
« Même Foreigner comprend que je suis un bon leader. »
L’humour fait autorité. Houman Mortazavi n’en dénonce pas moins la situation inquiétante de la politique iranienne, qui avance éhontement l’argument de l’unité pour mieux diviser. Sous le slogan « Who cares ? I cares », Simon Ordoubadi défend ainsi sa campagne politique en ces termes : « * Personne ne s’occupe de vous les vôtres * Voter pour un autre signifie trahir l’Iran * Souvenez-vous de vos amis aux prochaines élections ».