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Denis Brihat : Edition Spéciale

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C’est le dernier monument de la photographie française. Un formidable personnage et un être humain rare. Ce que l’on appelait dans ma jeunesse avec respect et admiration : un vrai homme de gauche.

Un puits sans fond de tolérance, de générosité, de respect, de culture…

Trois expositions lui rendent hommage ce mois-ci ; on a envie de murmurer : Enfin !

Depuis quelques années, vue notre proximité dans le Luberon, ma femme et moi voyons régulièrement Solange et Denis.

Chaque déjeuner est une merveille, et, si Denis avait quelques années de moins, ma femme m’aurait sans le moindre doute quitté pour le séduire.

Regardez bien, dans le dernier sujet : les amis de Bonnieux. Il y a un portrait de Julien Levy. Julien Levy dans les années 30 et 40 du siècle dernier fut a New York le premier et le plus grand des galeristes photo. Un jour, il vint voir Denis, il aurait pu croiser un autre monument, New Yorkais d’adoption celui-là: Alexey Brodovitch

Merci à Didier Brousse , à Heloise Conesa , à Patrick Clamaron , à Nico Foss et à Solange Brihat grace à qui nous avons pu réaliser cette journée.

Jean-Jacques Naudet

 

Héloïse Conésa, de la BnF, a écrit le texte suivant:

Denis Brihat ou la « nature naturante »

Regarder une photographie de Denis Brihat est une expérience fascinante. Au-delà d’un prodigieux savoir-faire argentique que l’on finit par oublier parce que l’on est avant tout saisi par la beauté irradiante de la nature transcendée par son regard, il faut aussi reconnaître l’audace d’une prise de position : celle d’un photographe qui, comme d’autres à son époque, aurait pu choisir de s’engager dans une veine humaniste où l’instantané et l’empathie composent la prose du quotidien mais qui a préféré questionner la nature en l’enrichissant d’une poésie méthodique faite de variations lentes autour du même – un citron, un kiwi, un cerisier, un champignon…  -, de semailles visuelles éclatantes et de matières perlées d’argent.

On aurait tort d’oublier ce que la photographie française doit à Denis Brihat, ce à quoi il a volontairement tourné le dos pour poursuivre une route artistique singulière sur le plateau des Claparèdes, si singulière qu’elle a ouvert à d’autres une voie. Il fut l’un des premiers à proposer que la photographie fasse le mur et voit en grand son désir de liberté artistique, qu’elle s’affranchisse du livre, qu’elle affirme sa place sur les cimaises aux côtés des tableaux et qu’elle accentue sa rareté, se parant de mille atours de sulfure, de fer-vanadium et d’or, pour mieux nous subjuguer.

On a souvent dit de lui qu’il vivait en ermite, pour avoir choisi les paysages du Lubéron, plutôt que le tumulte parisien ; certains ont pu trouver que les stages qu’il organisait chez lui requerraient d’entrer en photographie comme on entre en religion, mais il n’y a pas de dogmatisme chez Denis Brihat, encore moins de grandiloquence, mais bien plutôt la recherche d’une maïeutique qui permettra à chaque photographe en herbe, d’exprimer son originalité.

Denis Brihat est un être chaleureux, d’une grande culture et d’une infinie délicatesse qui réconcilie le fruste et le raffiné, le frugal et le fastueux, la rigueur formelle et le lyrisme visuel pour faire jaillir du trivial l’extraordinaire.

Dans l’exposition de la BnF, on (re)découvrira entre autres, cette aubergine en majesté, grignotée par un escargot, celui-là même peut-être qui dans un autre tirage s’est lové au creux d’une poire du verger, ces truffes coupées dont les circonvolutions deviennent des vaisseaux palpitants, cet oignon tantôt nu, tantôt vêtu, ce coquelicot comme un œil ouvert sur le monde dont l’iris darde des pistils curieux, et l’on sera touché par une grâce païenne qui nous permet de voir dans ces représentations élémentaires un humanisme métamorphosé. Ainsi, chaque expression du règne végétal et animal s’affirme comme la transposition de différentes modalités sensibles où se lit le pouvoir d’enchantement et d’émerveillement d’une « nature naturante ».

Héloïse Conésa, conservatrice du patrimoine, chargée de la collection de photographie contemporaine à la BnF

www.bnf.fr

www.denisbrihat.com

 

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