Né en 1974 à La Havane, Alejandro González apprend la photographie au cours d’ateliers animés par Diego Goldberg, Luis González Palma et Edgar Moreno. Il entre ensuite en résidence à l’École supérieure des arts et médias de Cologne, en Allemagne. En 2009, il reçoit le prix Casa de las Americas de Cuba, section photographie. Ses œuvres sont exposées dans son pays ainsi qu’au Mexique, aux États-Unis, en Espagne et en Italie.
Pour Alejandro González, la photographie est nécessairement documentaire. D’autant plus à un moment où, comme toute sa génération, il voit à la fois s’évanouir le monde rêvé qu’on lui promettait quand il était enfant et émerger une jeunesse qui, malgré la lenteur de changements inéluctables, n’a plus rien à voir avec ce que fut la sienne.
Alors, il documente et construit de façon extrêmement pensée des séries qu’il édite scrupuleusement. Ainsi, dans des tonalités douces, Alejandro González a observé les plantes rescapées du bétonnage, s’accrochant aux murs décatis, pointant à travers l’asphalte, difficilement, comme une métaphore d’un quotidien complexe. Puis, empruntant l’esthétique des magazines soviétiques des années 1970, il est allé revisiter, du parc Lénine à la monumentale ambassade de ce qui était alors le pays frère, un univers qui devait donner un avant-goût de la victoire du socialisme. Aujourd’hui, rouille et herbes folles se sont emparées du songe. Quelques familles viennent y pique-niquer le dimanche. La nouvelle génération est apparue sur le Malecón (front de mer) et en ville, avec d’autres looks et de l’énergie, prête à inventer d’autres nuits.
Alejandro González l’a cadrée au carré, saisie au flash, pour une galerie efficace et juste. Car il ne veut rien juger, juste documenter. Comme il l’a fait avec la communauté gay pour la série présentée ici. Le 17 mai 2008, lors de la deuxième célébration à Cuba de la Journée internationale contre l’homophobie, il réalise en couleurs treize portraits serrés d’homosexuels et travestis. Un mois après, sur la plage ouvertement gay de Mi Cayito surveillée par la police, il laisse les participants à la première Gay Pride jouer devant son objectif.
Christian Caujolle, commissaire
Texte extrait du livre-catalogue « Photoquai » coédition Musée du Quai Branly- Actes-Sud