Celebrating the Negative : Dmitri Baltermants by John Loengard

Dmitri Baltermants, diplômé en mathématiques de l’université de Moscou juste avant la Seconde Guerre mondiale, a choisi par la suite de devenir photographe. Correspondant de guerre pour le journal Izvestiya, il s’envole pour Kerch, en Crimée, à bord d’un petit avion d’observation d’artillerie. Non loin de la piste d’atterrissage, des hommes et des femmes identifiaient les corps de 7000 villageois exécutés par les Allemands qui battaient en retraite.

Des photographies de la scène ont été publiées en Russie et dans l’Ouest. Hélas, l’impression n’était pas de grande qualité et elles ont été beaucoup trop recadrées. Après la guerre, Baltermants récupéra ses négatifs auprès des archives du Izvestiya, mais deux points tachaient le ciel sur un des meilleurs clichés. Le film avait dû rester collé sur lui-même sur la bobine dans la cuve de développement. Au tirage, Baltermants ajouta donc des nuages bas issus d’une autre prise de vue, parvenant ainsi à cacher le défaut tout en accentuant le côté dramatique de l’image.

Grief est une des photographies les plus émouvantes de la Seconde Guerre mondiale. Elle est passée totalement inaperçue dans l’Ouest jusqu’en 1967, lors de l’exposition « Photography in the Fine Arts » au Metropolitan Museum of Art de New York. Le jury était composé de onze directeurs de musées et de conservateurs de peinture. La photo n’était pas du goût du directeur d’un musée de Philadelphie car elle « ne véhiculait aucune idée », opinion partagée par un de ses collègues de Boston. Ils ont donc tous deux refusé d’inclure le tirage dans l’exposition. Fort heureusement, la majorité suivit l’avis du conservateur du musée des beaux-arts de Virginie : selon lui, c’était « une des plus belles images du jour ».