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Biennale des photographes arabes : « On pense souvent à un seul pays, mais les expériences sont bien différentes »

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Du 13 septembre au 12 novembre 2017 se tient à Paris la deuxième édition de la Biennale des photographes du monde arabe contemporain. Plusieurs lieux comme l’Institut du monde arabe ou la Maison Européenne de la Photographie participent en proposant des expositions complémentaires. Dans une interview à L’Œil de la Photographie, sa commissaire Olfa Feki évoque le territoire arabe et sa photographie.

 

En quelques mots, comment peut-on résumer aujourd’hui la situation de la photographie en Tunisie, en comparaison celle que vous connaissez dans les autres pays du Maghreb et plus généralement dans le monde arabe ? S’agissant de la création, mais aussi de la diffusion des œuvres photographiques. 

Je crois que nous ne pouvons pas vraiment comparer les différents pays du monde arabe, en particulier l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Chaque pays a ses propres particularités. Je pense qu’ils progressent tous, mais de différentes façons.

En Tunisie, nous avons assisté à un bouleversement de la scène artistique, en particulier la scène photographique après la révolution, car les médias se sont davantage intéressés à publier des reportages sur cet évènement. Des centaines de personnes sont devenues photographes, mais pas exactement artistes, c’était à titre documentaire. Après la vague du coup du printemps arabe, beaucoup ont arrêté leurs activités photographiques, et seulement quelques-uns ont continué. La scène artistique tunisienne, avant même la révolution, était florissante. La réaction et l’impact du printemps arabe ont fait en sorte que tout commence à évoluer. Nous avons déjà des artistes internationaux tunisiens exposant dans des musées et des institutions prestigieux et même collectés par les musées. Et il est normal que cela se développe encore plus.

En ce qui concerne les autres pays « arabes », je peux dire que chacun va dans une direction différente selon sa scène artistique. Je crois que la scène artistique marocaine n’est pas encore aussi importante que ce qu’on croit  par exemple, mais ils en su bien communiquer et comment diffuser une photographie à l’échelle internationale. Contrairement à la Tunisie par exemple, Le Maroc a dix fois plus d’espaces artistiques, ce qui permet une meilleure visibilité et la distribution de la création locale. La scène artistique égyptienne est elle aujourd’hui à un autre niveau. Ils ont une belle scène artistique et de meilleurs espaces d’art qui travaillent vraiment sur l’exportation. Ce qui peut être très surprenant, c’est la scène artistique de l’Arabie saoudite qui, à mon avis, peut être comparée aux scènes internationales.

Quelles sont les tendances thématiques et esthétiques que l’on pourrait aujourd’hui déceler au sein de la photographie du monde arabe : les sujets traités et les inspirations, mais aussi la forme visuelle à laquelle les artistes ont recours ?

Je ne pense pas qu’il y faille dégager un thème ou une tendance spécifique. C’est comme dire parce qu’il/elle est Arabe ou qu’il/elle est Français, que cette personne travaillera absolument sur ce sujet ou ce sujet. Être artiste est d’abord une manière de penser à exprimer, à l’international. Chaque artiste a sa manière personnelle et intime d’interpréter des idées, des positions … à travers différents supports photographiques. Aujourd’hui, dans le monde arabe, si vous préférez le mentionner, nous pouvons trouver différents ensembles d’œuvres, du documentaire au conceptuel et aux nouvelles technologies. Le contenu du travail est principalement une interprétation personnelle du monde et de la société. Cela peut être sur les pays du monde arabe ou sur ce qui se situe au-delà de leurs frontières.

Quelle place les femmes artistes occupent-elles dans la photographie contemporaine au sein du monde arabe ? Développent-elles des projets différents de ceux traités par les hommes ? S’intéressent-elles à des sujets particuliers et différents de ceux que les femmes européennes ou américaines peuvent traiter ?

Je ne crois pas que le genre soit la composante principale de la création d’un artiste. La décision est très personnelle. Certaines photographes peuvent choisir de travailler sur des sujets féministes ou de documenter des guerres. Je crois que leur travail reste lié à leur expérience, à leur vécu et à leurs croyances.

Quel message véhicule selon vous la deuxième édition de cette biennale par rapport à la première ? Quels en seraient les marqueurs dominants ?

Lorsque nous parlons du monde arabe, les gens ont tendance à penser à un seul pays. Mais du Maroc, à la Jordanie ou à l’Égypte, la société, les peuples et les expériences sont très différents. Au cours de cette deuxième biennale, j’ai essayé de communiquer un regard spécifique à chaque pays à travers les yeux de différents points de vue personnels. J’ai fait de mon mieux pour recréer une image réaliste de chaque pays et éviter de tomber dans les clichés occidentaux auxquels l’Europe est habituée. Certes le choix de l’affiche de la biennale, en ce qui me concerne, est un mauvais choix, qui a résulté d’un vote. Elle brise la dynamique de ce que j’ai voulu exprimer dans ma direction artistique. Mais je crois que l’expérience d’un tel événement est à la fois difficile et très enrichissante.

 

Olfa Feki est une architecte et commissaire d’expositions basée entre la Tunisie, la France, le Maroc, l’Égypte et les Pays-Bas.

Biennale des photographes du monde arabe contemporain
Du 13 septembre au 12 novembre 2017
Institut du monde arabe – Maison Européenne de la Photographie – Cité internationale des arts – Mairie du 4e arrondissement – Galerie Binome – Galerie Clémentine de la Féronnière – Galerie Photo12 – Galerie Thierry Marlat.
Paris, France
http://biennalephotomondearabe.com/

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