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Alison Wright : « Je pense qu’il est important de montrer l’espoir »

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Photographe documentaire basée à New York, Alison Wright a consacré sa carrière à capter l’âme humaine universelle par ses photos et ses écrits. Un grand nombre de ses projets commerciaux et éditoriaux l’amène à voyager dans toutes les régions du globe, pour photographier des cultures et des peuples en danger et réaliser des reportages sur la condition humaine. Celle qui a photographié de nombreuses organisations humanitaires et non gouvernementales concentre son travail sur l’apaisement qui suit les conflits ou les catastrophes, mais aussi sur les droits de l’homme, notamment des femmes et des enfants. Souhaitant donner à son tour aux communautés qu’elle photographie, Wright a lancé sa propre fondation, nommée Faces of Hope Fund (Fonds Visages de l’espoir) (www.facesofhope.org), pour soutenir les femmes et les enfants en crise dans le monde entier, à travers l’éducation et les soins de santé. Wright est également l’auteur de neuf livres, dont Learning to Breathe : One Woman’s Journey of Spirit and Survival (« Apprendre à respirer : Voyage de l’esprit et de la survie d’une femme »), qui raconte sa rééducation physique et spirituelle après un accident de bus destructeur au Laos, dans lequel elle a failli perdre la vie.

 

Y a t-il eu quelqu’un ou quelque chose qui vous a amenée à voyager et prendre des photos lorsque vous étiez jeune ?

Comme ma mère était hôtesse de l’air britannique pour la compagnie américaine Pan Am, j’ai développé mon goût du voyage in utero, en voyageant avec mes parents. J’avais aussi ce professeur formidable au lycée, Mr. Lee, qui a été assez attentionné pour me prendre à part et m’apprendre à utiliser mon premier réflex mono objectif. Je me souviens avoir entendu pour la première fois le mot « photojournalisme » quand j’avais quinze ans : c’était ce que je voulais faire, voyager dans le monde et prendre des photos. Je n’ai jamais flanché, et me suis toujours accrochée à cette voie. Après l’école, mon père m’a conseillé de partir voyager en Europe avec mon sac à dos. Je l’ai fait, en un sens pour l’apaiser, mais je trouvais que c’était trop prosaïque. En fait, je suis allée en Afrique du Nord. C’est ce qui a défini pour moi ce que je voulais faire avec mes photographies. C’était la première fois que je voyais vraiment la pauvreté et les réfugiés qui essayaient de s’en sortir. Cela m’a beaucoup touchée. Je voulais aider d’une façon ou d’une autre, faire quelque chose qui ait du sens avec mon appareil. C’est là-bas que j’ai eu l’idée de faire ce genre de documentaire social. Ce sont toujours ces photographes que j’admire le plus, comme Lewis Hine, Eugene Smith et Sebastião Salgado.

Vous avez photographié et vécu longtemps en Asie. Quand avez-vous finalement réussi là-bas professionnellement et qu’est-ce qui vous a attirée dans cette région à l’origine ?

J’ai été envoyée là-bas à l’époque où je travaillais pour un journal, mais c’était pour faire des photographies pour l’UNICEF. La mission devait durer trois semaines, mais je suis tombée amoureuse de l’Asie et je suis restée plusieurs années au final. L’Asie et sa spiritualité m’attirent depuis que je suis enfant. J’étais basée à Katmandou, et les Nations Unies ont créé un poste pour que je prenne des photos pour la Convention pour les droits de l’enfant, qui couvrait tous les aspects, le travail, la santé, les rituels. Je voulais faire quelque chose pour aider à défendre ces droits, et j’ai adoré ça. Chaque matin avant d’ouvrir les yeux, je me disais : « Waouh, c’est exactement ce que je veux être, ce que je veux faire. » C’était un travail déterminant.

Vous avez photographié le Dalaï Lama à plusieurs reprises et il a également écrit la postface de trois de vos livres. Comment l’avez-vous rencontré la première fois ? 

Il a demandé à me rencontrer en 1986. Je pensais qu’il allait juste me bénir, mais en fait, il m’a accordé ce long entretien d’une journée. Nous avons fini par développer une relation qui dure depuis plus de 25 ans. On m’a demandé de voyager avec lui à plusieurs reprises et j’ai maintenant fait plus de quarante couvertures de livres pour lui. Un éditeur est venu me voir un jour pour me demander si j’avais d’autres photos du Dalai Lama et je me suis rendue compte que j’en avais publié plus de 2500.

Vous avez aussi rencontré Aung San Suu Kyi. Comment avez-vous vécu cette expérience ?

La première fois que je suis allée en Birmanie en 1996, j’ai senti que j’étais censée la rencontrer, même si elle était encore en maison d’arrêt et qu’il était difficile de la voir. Je ne suis pas allée là-bas en tant que journaliste, je portais une petite robe d’été jaune, et je leur ai demandé de m’appeler. Vous me croirez si vous voulez, mais ils m’ont appelée pour me dire qu’elle avait un jour de sortie et sa famille m’a invitée à passer le Nouvel An avec elle. C’était impressionnant de la prendre en photo. C’était pour la couverture de son livre et je l’ai également interviewée. C’est une femme très forte et très inspirante, et c’est ce sur quoi je me concentre. Je ne fais plus d’actualités car j’ai l’impression que beaucoup peuvent vraiment finir par tourner les pages sans faire attention. Je veux montrer la beauté de ces gens et de ces cultures, parce qu’on se rend compte qu’on aimerait les voir traîner sur la planète encore un peu.

Comment définiriez-vous votre travail ?

Vous savez, il m’est très difficile de définir ce que je fais. Je me considère parfois comme une photojournaliste, même si je ne traite pas de sujets difficiles. J’ai l’impression d’être une conteuse. Ce qui m’intéresse, c’est l’après-conflit, la façon dont les gens s’en sortent. Je suis là sur long terme, c’est ce qui m’intéresse. J’ai lancé ma fondation Faces of Hope il y a huit ans. J’ai reçu des critiques parce que les gens disaient que les photojournalistes ne s’investissent pas. Je me suis dit : « Waouh, si cela fait de moi une activiste, j’accepte le terme. » Je veux m’investir. Je veux donner en retour, aider d’une façon ou d’une autre. C’est aussi pour ma propre santé mentale, parce qu’en toute bonne conscience, je ne peux pas me contenter de rester là à prendre des photos sans rien faire. Si je vais en Haïti au beau milieu d’un tremblement de terre pour dire : « Oh, je fais ces potos parce que j’espère que cela fera une différence pour vous », alors pourquoi ne pas aussi lever des fonds pour leur envoyer des tentes ?

D’après vous, qu’essayez-vous de montrer dans vos photos avant tout?

J’essaie de porter mon attention sur la connexion universelle de l’esprit humain. Nous voulons tous aimer et être aimés, nous voulons tous la sécurité et la santé pour nos amis, notre famille, nos enfants, un travail qui a du sens et un peu d’argent pour nous en sortir. C’est plutôt simple, mais on essaie de compliquer les choses plus que nécessaire. Je pense qu’il est important de montrer l’espoir.

 

Cet entretien intègre une série menée par la Holden Luntz Gallery, basée à Palm Beach, en Floride.

Propos recueillis par Kyle Harris

 

Holden Luntz Gallery
332 Worth Avenue
Palm Beach, Floride 33480
USA

http://holdenluntz.com/

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