On avait quitté une première fois Irène, rencontrée dans un bar parisien au lancement d’un de ses premiers numéros. Elle se disait Erotic Fanzine mais se montrait trop vite, et trop instable ; si toute chose a ses mystères et que la poésie c’est le mystère de toutes les choses, Irène manquait à la fois de poésie et de mystère : elle ressemblait à un mélange de porno chic et d’esthétique arty, trop jeune et trop fébrile pour donner corps au plus beau des troubles.
Depuis, et à la veille de la sortie de leur quatrième numéro, les trois jeunes françaises exilées à Londres qui sont à l’origine du projet semblent avoir passé leur sélection à un tamis plus fin et ralenti leur tempo. Une douzaine de contributeurs pour ce format légèrement plus petit qu’un A4 et limité à deux cents exemplaires pour le troisième numéro ; des noms essentiellement confidentiels.
On sait que c’est en touchant à l’objet de son fantasme qu’on le perd, et que tout le talent d’un écrit érotique c’est de tourner de son objet comme un pendule d’hypnotiseur, d’à la fois l’interdire et le promettre. A ce petit jeu Irène se débrouille bien, notamment grâce à une torpeur commune à la majorité des images ; on attend de voir si les choix de maquette du prochain numéro sauront travailler cette équilibre et offrir de belles images – comme ces pétales blancs posés sur deux seins blonds qui, à eux seuls, valaient le précédent.
Antoine Soubrier