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Werner Bischof, Sardaigne 1950

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Apres une tumultueuse guerre européenne aux répercutions internationales durables, Capa, Cartier-Bresson, Chim et Rodger décident de se diviser le monde afin de le documenter de façon exhaustive et sincère, libérés de l’exigence sensationnelle des médias pour lesquels la photographie est encore la seule source d’information visuelle. Inspiré par leurs idées de gauche et leur indépendance professionnelle, Werner Bischof les rejoint rapidement, peu après avoir quitté sa carrière commerciale pour témoigner des désastres de l’apres-Guerre dans une Europe fraichement libre. Frustré par la superficialité qui fait loi dans les bureaux éditoriaux, il s’engage dans des projets au long cours, convaincu a la fois idéalistiquement et naïvement que ses images peuvent changer le cours des choses. Il veut révéler l’inconnu a la face du monde avec ses yeux d’explorateur contemporain et engagé et sera d’ailleurs récompensé par une action du Congres américain pour son reportage sur la faim en Asie. C’est avant de se lancer dans ce grand tour qu’il fait escale en Sardaigne, au début des années 50, poussé par sa soif d’humanité et son désir de fouler des territoires ignorés. L’ile, qui vient tout juste d’éradiquer une malaria ravageuse et de bénéficier de la réforme agraire italienne, est a cette époque toujours considérée a tort comme arriérée. Loin d’une misère photogénique attendue, Bischof y trouve une ruralité bucolique et active dont aucune archive locale ou internationale ne fait état et a laquelle son approche photographique s’adapte immédiatement. Les images de ce reportage inédit rendent donc justice a une période rayée de l’histoire visuelle sarde bien que cruciale dans son émancipation. Elles le font avec une poésie des situations qui frôle parfois l’abstraction. Fierté, humilité, bonheur doux de l’enfance, le vaste champ des émotions qu’il capture transparaissent dans un jeu de sourires, de regards, de mains surgies dans le champ ou de poses auxquelles répond une géométrie expressive. L’icône et le symbole y jouent un rôle subtil, ils informent sans clichés ni concession esthétique. Ils rendent comptent de changements majeurs au rythme paisible de l’humain. Les générations et les genres s’y mêlent dans un portrait patient d’un territoire vivant. On sent le temps de l’enquête dans cette succession d’intérieurs et d’extérieurs, de géographies arpentées, de lumières de toutes les heures. Dans l’expression complice des sujets, aussi, qui donne probablement aux images de Bischof leur pouvoir de susciter l’empathie.

Laurence Cornet

Werner Bischof, Sardinia 1950
Du 12 Octobre au 3 Décembre 2012
MAN Museo d’Arte Provincia di Nuoro
via S. Satta, 27 – 08100 Nuoro – Italie
Tel. 39 0784 252110

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