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War is for the living –Le medium et les conflits

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Si l’exposition n’est pas exclusivement photographique, présentant notamment plusieurs oeuvres vidéos et quelques peintures, elle n’en présente pas moins un large éventail, rappelant la relation ténue que le médium entretient avec le conflit.
Les propositions sélectionnées par les commissaires Chuong-Dai Vo et Midori Yamamura ne sont pourtant pas exclusivement documentaires.

Nina Berman, avec son projet sur la militarisation post-09/11, est celle qui s’en approche le plus, mais ses compositions subtiles sont loin de faire de cette série un inventaire exhaustif et formel de l’anticipation du conflit.
C’est cette présomption de danger imminent qui guide également le dernier travail d’An-My Lé, récompensée d’une bourse de la fondation MacArthur. Larges paysages vierges de l’Antarctique, d’Afrique ou d’Asie étrangement métamorphosés par la présence de bunkers et autres géants de la militarisation habillent froidement les murs de la Sylvia Wald and Po Kim Art Gallery dans une sublimation de la puissance armée.

L’exposition s’intéresse en réalité à une temporalité souvent ignorée par les médias, celle de l’avant et de l’après-conflit, celle, digérée, qui s’écarte de l’information pour entrer dans le champ de la réflexion. C’est ainsi que des démarches plus conceptuelles complètent la sélection, comme celle de Dinh Q. Lê qui commémore les victimes du camp de concentration Khmer Rouge de Tuol Sleng entre 1975 et 1979. Avec ses « Misprints« , images des victimes de la guerre d’Irak imprimées au verso d’un papier inkjet, dégoulinant donc jusqu’à rendre impossible tout identification du sujet.
La vidéo d’Hiroshi Sunairi, intitulée « Tree Project Film » simple dans son esthétique et son idée, trouve son impact dans sa capacité à mêler le passé et le futur : l’artiste a pointé sa caméra sur les arbres rescapés d’Hiroshima, les présentant comme les modèles d’une capacité de régénération dont les hommes devraient s’inspirer.
Dans un écho aux traces invisibles et inaltérables des radiations, la performance inaugurale de Viêt Lê intitulée « Incredible, Indelible Invisible Man » était troublante. Nu sur une poudre blanche et muni d’un verre d’eau, l’artiste commence à mélanger les deux matières pour obtenir une boue immaculée dont il se recouvre intégralement et délicatement, devenant soudain étrangement familier sous ce masque homogène. A peine recouvert tente-t-il de se débarrasser de cette pellicule asphyxiante qui malgré sa blancheur bouche tous les pores de sa peau. S’en suivent des gestes d’une souffrance communicative, des positions proches de la prière, de la prosternation, une agitation hystérique, angoissée, la peau devient de plus en plus rouge sous l’effet du frottement ininterrompu, son corps est secoué de tremblements de résignation jusqu’à ce qu’il finisse par abandonner, toujours imprégné de cette couche nocive. On ne peut que penser à la façon dont le peuple japonais a, à plusieurs reprises, été exposé aux radiations, substance invisible menaçante s’insinuant dans chaque recoin du pays et dont la disparition est incertaine pour ne pas dire impossible.

Laurence Cornet

War is for living
Exposition jusqu’au 23 mars 2013
The Sylvia Wald and Po Kim Art Gallery
417 Lafayette Street, 4th Floor
New York, NY 10003
USA
Tél. : 212 598 1155

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