Après Varsovie, Kiev, Budapest, et Belgrade, la 5e édition du Festival pluridisciplinaire Un week-end à l’Est se déroulera du 24 au 29 novembre 2021, avec cette année SOFIA la capitale bulgare comme invitée à l’honneur dans une quinzaine de lieux du 6e arrondissement à Paris. Cinq jours d’effervescence de cette manifestation qui s’affirme d’année en année comme une opportunité unique d’appréhender toute la création vivante de la capitale invitée, à travers ses écrivains, ses penseurs et ses artistes, tout en créant un espace d’échanges et de partage entre l’Est et l’Ouest.
Pour cette 5e édition consacrée à la capitale bulgare, une trentaine d’invités et d’intervenants, artistes et intellectuels, seront présents dans quinze lieux du Quartier Latin pour la plupart : des librairies, des galeries, les Beaux-Arts de Paris, l’Espace des femmes-Antoinette Fouque, l’Odéon-Théâtre de l’Europe, le Christine Cinéma Club… Cette 5e édition met résolument en avant les arts visuels, avec un parcours artistique dans plusieurs galeries du 6e arrondissement et plusieurs conférences aux Beaux-Arts de Paris, avec un hommage particulier à Christo aux Beaux-Arts de Paris. Le parrain de cette édition est le cinéaste d’animation bulgare Theodore Ushev.
Les dix artistes plasticiens invités cette année sont : Christo; Eugenia Maximova, photographe ; Nikola Mihov, photographe & le Collectif PUK, photographes ; Elina Kechicheva, photographe ; Nina Kovacheva, artiste plasticienne ; Stefan Nikolaev, artiste plasticien et sculpteur ; Iona Pelovska, artiste plasticienne et vidéaste, Nedko Solakov, artiste plasticien ; Luba Haleva, illustratrice, et le parrain de l’édition, le cinéaste Theodore Ushev.
Les lieux partenaires où retrouver les expositions sont : les Beaux-Arts de Paris, l’Institut culturel bulgare, l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque, Delpire & Co, la Galerie du Crous, la Galerie Vellutini, la Librairie-Galerie Métamorphoses, la Librairie Polonaise, et la Mairie du 6e arrondissement. Avec le soutien de Galleria Continua et de la Galerie Michel Rein.
Un parcours de vernissages des expositions aura lieu le jeudi 25 novembre 2021 de 18h à 20h dans ces différents lieux. Un verre avec les artistes sera proposé à la Galerie Delpire & Co à partir de 19h30.
Le programme complet du Week-end l’Est 2021 est à retrouver sur le site internet et dans la newsletter sur inscription : https://weekendalest.com
Eugenia Maximova : « The places you called home »
L’exposition « The places you called home » fait dialoguer deux séries de la photographe : « Kitchens stories from the Balkans » et « Of Time and Memories ». Elle y interroge le rôle des espaces de vie intimes, dans notre lien au passé, à l’histoire, à une mémoire à la fois personnelle et universelle.
La nourriture, plus que tout autre chose, nous relie les uns aux autres dans un esprit de communion, de partage, d’humanité. Besoin physiologique, routine quotidienne et triviale, elle est aussi rituel, cérémonie, offrande, elle est constitutive de notre identité, de notre culture, de notre H(h)istoire.
Ainsi les traditions culinaires des Balkans rassemblent-elles les peuples au-delà des frontières et des conflits qui les ont déchirés. Cuisines, chambres, natures « mortes », papiers peints, toiles cirées… Par l’intelligence du cadrage, l’agencement des formes, l’harmonie des couleurs… Eugenia Maximova insuffle au banal et au kitsch, voire à la laideur, une beauté picturale qui invite à la contemplation. Elle parvient à extraire à la superficialité sa profondeur, au quotidien sa charge de mystère, au silence le grésillement des aliments dans les casseroles.
Ses compositions, dénuées de personnages, semblent pourtant grâce à la puissance du hors champs, habitées d’une présence humaine. Avec une distance délicate, l’artiste nous invite à pénétrer dans ces espaces de vie, à imaginer le quotidien de ces peuples dont l’identité, héritière de la domination ottomane puis bolchévique, est encore à construire. Les œuvres d’Eugenia Maximova incarnent l’esprit des Balkans aujourd’hui, où subsistent les stigmates de l’ère communiste, mais aussi l’optimisme, la résilience d’une culture riche et complexe.
Les peuples des Balkans vivent dans l’ombre d’une longue succession de guerres, de conflits et de tensions ethniques irrésolues. L’énergie qui aurait dû servir à construire le futur n’a servi qu’à entretenir ces tensions et le résultat en est un présent appauvri. Les jeunes familles doivent payer des loyers exorbitants ou vivre serrées comme des sardines chez leurs parents. Et la plupart des appartements sont désespérément laids, des blocs de bétons en décrépitude, héritage de l’ère communiste.
Le terme « Balkan », qu’il serve à décrire une culture ou une zone géographique, a une forte connotation de ruralité doublé d’une consonance avec l’Orient. Peu importe le contexte dans lequel le mot est utilisé, il est teinté de connotations socio-culturelles et porte le sens de la division et de la discorde.
Lorsque j’ai voulu raconter une histoire à propos des Balkans, c’est la nourriture qui m’est venue à l’esprit en cela qu’elle est la seule chose qui dans toute la région rassemble les gens. Après cinq siècles d’occupation ottomane nous avons tous continué à manger les plats qu’ils nous ont apportés.
Réfléchissant à cet héritage culinaire partagé, j’ai voulu savoir ce qui se passait dans les cuisines des Balkans aujourd’hui.
La cuisine est une pièce multifonctionnelle, un espace qui reflète l’identité et la perception de soi. Elle incarne l’âme de la maison balkanique et reflète la société dans son ensemble. Les habitants des Balkans préfèreraient dépenser le peu d’argent qu’ils ont dans un café plutôt que dans la décoration de leur intérieur. L’aspect fonctionnel, le style sans fioritures qui en résulte rend tangible la perte d’identité dans cette région, héritage d’un demi-millénaire sous le joug ottoman et d’un demi-siècle derrière le Rideau de fer.
Mes photographies des cuisines des Balkans reflètent la réalité des Balkans aujourd’hui telle que je l’ai vue.
Of Time And Memory
Memories. Memories blur into dreams. Light brings them to truth. Everything unforgiving. Everything becoming hallow. Loneliness consumes and there is no way back. The places you played, the places you called home, the people you thought you loved, all of them, reduced to a memory of another life. A life you never lived. All the yesterdays that came from tomorrow, all the tomorrows that never came from yesterday. A new beginning because forever is never forever. — Olafur Arnalds
“Of time and memory” est une part plus personnelle de mon travail. Il s’agit de ma tentative de rafraîchir les souvenirs de mon enfance et de comprendre comment le lieu où j’ai grandi a pu façonner ma jeunesse.
Of time and memory est un projet en cours. C’est une étude culturelle de la façon dont l’histoire a défini et déterminé la culture post-soviétique et comment cette culture a défini et déterminé la société. Ces photographies explorent les espaces physiques et mentaux des humains dans un climat de désillusion et de manque de confiance, avec un focus sur l’influence du communisme sur la culture visuelle des gens. Avec un intérêt particulier pour le lien entre totalitarisme et kitsch, spécialement dans l’espace domestique. À l’époque soviétique, le kitsch était la forme d’esthétique la plus répandue et la seule abordable.
Vingt années ont passé depuis la chute de l’Union soviétique. Pour la jeune génération des anciens pays membres, cette période de temps pourrait sembler une éternité. Mais le régime totalitaire a dicté leur vie aux gens pendant très longtemps et a laissé des stigmates sur tous les aspects de leur être. Cela a modifié leur culture, leurs perceptions, leur mentalité et jusqu’à leurs souvenirs. Une nouvelle forme d’existence a émergé. Aujourd’hui, les traces et les conséquences de cette époque sont encore vivaces.
Et comme cela arrive toujours dans la vie, le temps guérit toutes les blessures. Peu à peu les souvenirs les plus durs s’estompent. Les formes et les figures disparaissent pour être remplacer par de nouveaux motifs et éléments de la vie moderne.
—-Eugenia Maximova est une photographe et artiste visuelle bulgaro-autrichienne établie à Vienne. Elle est diplômée en journalisme et en communication de l’Université de Vienne. Son bagage journalistique oriente nombre de ses projets artistiques. Que ce soit dans ses portraits, ses paysages urbains ou ses séries de natures mortes, il y a toujours un angle socio-politique que ses photographies abordent et cherchent à remettre en question. Travaillant principalement avec un appareil photo analogique de format moyen et dans des couleurs vibrantes, Eugenia Maximova se propose d’explorer les interconnexions entre les réalités politiques et la vie privée des personnes, comment l’identité se forme dans différents contextes culturels et les liens étroits entre les effets personnels et leurs propriétaires.
Exposition d’Eugenia MAXIMOVA « The places you called home »
Espace des Femmes -Antoinette Fouque
Du 25 au 29 novembre 2021