David
Ghetto de Varsovie
Septembre 1948
Varsovie, ma Varsovie, qu’ont-ils fait de toi?
Là où il y avait des maisons, des monuments, des rues, il n’y a plus que des ruines. On me l’avait dit, mais le voir, c’est autre chose.
Je marche dans ce qu’ils ont appelé le ghetto et que moi j’appelais mon quartier : Wola. Au 18 de la rue Nowolipki, ma rue, seule l’église Saint Augustin reste debout, ses briques rouges noircies par le feu. On m’a dit que son clocher avait servi de base aux mitraillettes allemandes pendant le siège de Varsovie en 44. Plus avant, il n’y a plus de trace de notre maison ou de la maison d’édition de mon père. A notre adresse, le soleil accroche une lueur et je ramasse dans les décombres une petite tuile jaune, qui faisait partie de la mosaïque du hall d’entrée; je la mets dans ma poche.
On m’a dit qu’il y a deux ans à peine, le 18 septembre 1946, au 68 de la rue Nowolipki, deux bidons de lait ont été déterrés dans les ruines du ghetto. C’étaient des archives secrètes constituées par Emanuel Ringelblum et un groupe de Juifs qui se sont donné le nom ironique de « Oyneg Shabbos » (Joie du Shabbat). Ils avaient écrit leur histoire, devenant ainsi historiens de l’extermination de leur peuple par les nazis. Les boîtes contenaient également des documents de la vie ordinaire, des programmes de concerts, des coupons de lait et des emballages de chocolat.